Les principaux rassemblements ont eu lieu à Moscou et Saint-Pétersbourg, avec dans chaque cas quelque 20'000 participants, selon des journalistes de l'AFP. Des manifestations ont également eu lieu dans des dizaines d'autres villes, un mouvement d'une ampleur géographique rare dans l'histoire récente de la Russie.
A Moscou, des heurts ont opposé à plusieurs reprises dans l'après-midi des policiers armés de matraques à des manifestants leur jetant généralement des boules de neige, mais aussi d'autres projectiles.
En début de soirée, des centaines de personnes ont rallié la prison de Matrosskaïa Tichina où est détenu l'opposant Alexeï Navalny, dans le nord de Moscou. La police y a procédé à des arrestations, frappant des manifestants avec des matraques et les dispersant.
Ce mouvement de contestation a lieu à quelques mois des législatives prévues pour l'automne, sur fond de chute de popularité du parti au pouvoir Russie unie. Il s'agit des manifestations les plus importantes depuis plusieurs années.
Plus de 1000 arrestations à Moscou
Dans la capitale, les forces antiémeutes ont arrêté quelque 1320 personnes, selon l'ONG spécialisée OVD Info. Elle a également décompté 490 arrestations à St-Petersburg et 3324 au total sur l'ensemble du territoire russe, soit le plus grand nombre d'arrestations durant des manifestations de l'opposition enregistrées dans l'histoire de la Russie moderne.
Plus tôt, Ioulia Navalnaïa, la femme de l'opposant, a été arrêtée à la manifestation moscovite, puis libérée quelques heures plus tard.
La police a elle estimé que 4000 personnes avaient manifesté à Moscou et qu'une quarantaine de membres des forces de l'ordre avaient été légèrement blessés. A Saint-Pétersbourg, une foule importante a défilé sur le célèbre Prospekt Nevski.
Début des manifestations dans l'est
L'équipe du célèbre opposant politique russe anticorruption avait publié des appels au rassemblement dans 65 villes russes. Les premières manifestations ont eu lieu samedi dans l'extrême Est du pays, où plusieurs milliers de personnes sont descendues dans la rue à Vladivostok, Khabarovsk, Novossibirsk et Tchita, scandant "Liberté à Navalny!" ou encore "Liberté aux prisonniers politiques!". D'importants effectifs policiers ont été déployés face aux manifestants, selon les partisans d'Alexeï Navalny.
Des arrestations parfois violentes ont eu lieu notamment à Vladivostok, port russe sur l'océan Pacifique, où la police anti-émeute est intervenue contre des protestataires à l'aide de matraques, selon une vidéo publiée par l'AFP.
Placé en détention provisoire jusqu'au 15 février au moins et visé par plusieurs procédures judiciaires, Alexeï Navalny, 44 ans, a été appréhendé le 17 janvier, dès son retour d'Allemagne, après cinq mois de convalescence à la suite d'un empoisonnement présumé dont il accuse le Kremlin.
Son appel à manifester a été accompagné d'une enquête vidéo, visionnée plus de 70 millions de fois depuis mardi sur YouTube, dans laquelle il accuse Vladimir Poutine de s'être fait bâtir pour un milliard d'euros une fastueuse demeure privée.
Arrestations préventives
Les précédents grands rassemblements de l'opposition à Moscou, durant l'été 2019, avaient entraîné des milliers d'interpellations de manifestants pacifiques. Plusieurs d'entre eux avaient été condamnés à de lourdes peines de prison pour des violences supposées contre les forces de l'ordre.
Comme en 2019, la police russe a également interpellé cette semaine en amont des mobilisations des alliés de premier plan d'Alexeï Navalny, dont deux ont été condamnés vendredi à de courtes peines de prison.
>> Plus de détails : La Russie multiplie les arrestations avant des manifestations pour Navalny
ats/vkiss
Réactions diplomatiques
La diplomatie russe a accusé l'ambassade des Etats-Unis d'avoir publié "des messages sur les réseaux sociaux pour soutenir les manifestations" et "d'encourager des actions violentes". Dans un communiqué, le ministère des Affaires étrangères a indiqué que la direction de l'ambassade serait convoquée pour une "conversation sérieuse".
La représentation diplomatique avait appelé sur son site les Américains à ne pas se rendre à ces rassemblements, précisant les lieux où ils se déroulaient. L'ambassade des Etats-Unis a pour sa part dénoncé sur Twitter "la répression des droits" des Russes.
Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a déploré sur Twitter "les détentions massives" et "l'usage disproportionné de la force", affirmant qu'il discuterait "lundi des prochaines étapes avec les ministres des Affaires étrangères de l'UE". Dans un communiqué, Amnesty International a accusé la police d'avoir "battu sans discernement et arrêté arbitrairement" des manifestants.