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"Wir schaffen das": il y a 5 ans, Angela Merkel ouvrait sa porte aux migrants

Le bilan de la politique migratoire allemande 5 ans après l'accueil d'un million de réfugiés.
Le bilan de la politique migratoire allemande 5 ans après l'accueil d'un million de réfugiés. / 19h30 / 1 min. / le 31 août 2020
En 2015, prise de court, l'Europe accueillait plus d'un million de personnes fuyant la guerre et la pauvreté. Cinq ans après cet afflux record de réfugiés, l'UE a renforcé le contrôle de ses frontières mais cherche encore une politique d'asile efficace.

"Wir Schaffen das" (ndlr. en français, "nous y arriverons"), ces trois mots on porté l'espoir de millions de réfugiés syriens ou irakiens au plus fort de la crise migratoire.

Avec cette phrase prononcée il y a cinq ans jour pour jour, Angela Merkel encourageait son pays à ne plus fermer les yeux mais à ouvrir ses bras aux migrants.

Dès 2015, l'Allemagne a accueilli près de 900'000 demandeurs d'asile, essentiellement syriens. Dans la foulée, des pays comme l'Autriche et la Suède ont ouvert leurs portes.

>> Revoir le sujet du 12h45 qui revenait sur la politique d'accueil d'Angela Merkel :

Migrants: Angela Merkel  appelle à une entente européenne à propos des migrants
Migrants: Angela Merkel appelle à une entente européenne à propos des migrants / 12h45 / 1 min. / le 17 août 2015

De la volonté à la discorde européenne

Mais, très vite sous pression, le système d'asile européen organisé par le règlement de Dublin, qui confie le traitement des demandes d'asile au premier pays d'entrée dans l'UE, a explosé, après avoir pesé notamment sur la Grèce ou l'Italie.

Face à l'urgence, l'UE a fixé, à la demande de Berlin, des "quotas" pour répartir les candidats à l'asile au sein des Vingt-huit. Mais ce plan de "relocalisation", initialement imaginé pour 160'000 personnes, est quasiment resté lettre morte.

L'élan de solidarité initial s'est notamment fracassé sur la ferme opposition des pays d'Europe centrale, la Hongrie de Viktor Orban en tête, et la montée des mouvements populistes.

>> Retour également sur le discours anti-migrants de Viktor Orban :

Hongrie: un vote pourrait dire "non" aux réfugiés et "oui" à Viktor Orban
Hongrie: un vote pourrait dire "non" aux réfugiés et "oui" à Viktor Orban / 12h45 / 1 min. / le 1 octobre 2016

L'espace Schengen fragilisé

Sans consensus européen, "l'espace Schengen a été grandement fragilisé, avec le rétablissement de contrôles sur plusieurs frontières" intérieures, rappelle un haut fonctionnaire français, fin connaisseur des questions migratoires.

Les différences de législation et la possibilité pour les déboutés de déposer une demande d'asile dans un autre pays ont poussé certains migrants à errer au sein de l'UE.

En parallèle, "les législations nationales se sont durcies: certains Etats ont réduit les droits des réfugiés, restreint le regroupement familial, d'autres ont renforcé les conditions d'octroi du droit d'asile", rappelle le haut fonctionnaire.

Des accords à double tranchant

En 2019, l'UE a enregistré 612'000 premières demandes d'asile selon Eurostat, soit la moitié du pic historique de 2015 et 2016, lorsqu'elles oscillaient autour de 1,2 million par an.

Les arrivées ont été réduites grâce notamment à "des accords passés avec des pays tiers, qui fragilisent les valeurs européennes et mettent l'UE en position de faiblesse", analyse Matthieu Tardis, de l'Institut français des relations internationales.

L'accord européen avec Ankara, qui prévoit depuis 2016 que les migrants arrivant en Grèce soient renvoyés en Turquie en échange notamment d'une aide financière, a institutionnalisé la "situation sanitaire déplorable" des camps en Grèce et est "devenu un levier" pour le président turc Recep Tayyip Erdogan, poursuit-il.

>> Revoir à ce propos le reportage du 19h30 :

Crise migratoire - Lesbos: l'accord entre la Turquie et l'Union est entré en vigueur
Crise migratoire / Lesbos: l'accord entre la Turquie et l'Union est entré en vigueur / 19h30 / 1 min. / le 20 mars 2016

En février, le dirigeant a ordonné l'ouverture de ses frontières avec l'Europe, réveillant le spectre de la crise de 2015.

L'UE soutient aussi un accord controversé, conclu entre l'Italie et la Libye, pour aider les garde-côtes libyens à bloquer les départs de migrants, alors que le pays est en proie au chaos depuis 2011.

>> Un selfie iconique entre un jeune réfugié syrien et Angela Merkel :

Le selfie d'un jeune réfugié syrien et Angela Merkel est entré dans l'histoire. Rencontre.
Le selfie d'un jeune réfugié syrien et Angela Merkel est entré dans l'histoire. Rencontre. / 19h30 / 2 min. / le 31 août 2020

Un nouveau plan bientôt dévoilé

Au fond, les Européens "ont enregistré très peu de réussites, hormis le renforcement de Frontex", affirme Marie De Somer. Cette agence, chargée de la surveillance des frontières extérieures de l'Union, disposera notamment d'ici à 2027 d'un corps permanent de 10'000 agents pour aider les pays débordés.

Cinq ans après, la question d'une véritable solidarité européenne reste centrale. Plusieurs fois repoussée, un plan doit être dévoilé en septembre par la Commission et pourrait notamment prévoir davantage de sélection des demandeurs d'asile aux frontières extérieures et un retour des déboutés dans leur pays assuré par Frontex.

>> Les explications d'Anne Maillet à Berlin :

Politique migratoire allemande, les explications d'Anne Mailliet
Politique migratoire allemande, les explications d'Anne Maillet / 12h45 / 1 min. / le 31 août 2020

afp/ther

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