D'ordinaire, l'Allemagne ne célèbre pas les anniversaires du 8 mai 1945, date de la capitulation du régime nazi face aux Alliés.
Exceptionnellement, la ville de Berlin avait décidé de déclarer férié ce jour synonyme de défaite mais aussi de libération du national-socialisme et des camps de concentration.
Angela Merkel présente
A l'origine, le chef de l'Etat Frank-Walter Steinmeier avait prévu d'organiser une grande cérémonie officielle allemande, avec 1600 invités, mais a dû annuler en raison de la pandémie. Une telle célébration pour le 8 mai n'avait eu lieu qu'une fois en Allemagne, en 1995.
A la place, il a déposé avec la chancelière Angela Merkel une gerbe de fleurs à la mémoire des victimes de la guerre et de l'Holocauste, qui a coûté la vie à 6 millions de Juifs, et prononcé un discours en milieu de journée.
C'est un geste symbolique en forme de rappel à l'ordre, dans un pays qui connaît une résurgence de l'antisémitisme et où le devoir de mémoire est régulièrement remis en cause par le parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD), entré il y a trois ans au parlement.
>> Lire aussi : Pour le renseignement allemand, l'extrême droite menace la démocratie
Une "défaite absolue" pour l'extrême droite
Son chef de file Alexander Gauland, qui a déjà fait scandale en qualifiant la période hitlérienne entre 1933 et 1945 de "pipi de chat" dans la "grande histoire" allemande, a déclenché de nouveau une controverse autour du 8-Mai.
Il a critiqué la célébration selon lui d'une "défaite absolue" pour le pays, caractérisée par la perte pour l'Allemagne d'autonomie pour "façonner son avenir".
Pour l'Afd, le jour est "ambivalent", car il signifie aussi la perte de territoires en Europe orientale et la mort de centaines de milliers de civils allemands lors des bombardements alliés.
"Les Allemands sont ainsi présentés surtout comme des victimes", a réagi le président du conseil des Juifs en Allemagne Josef Schüster. "Je trouve qu'il s'agit d'une relativisation historique irresponsable des crimes nazis", s'est-il offusqué.
La position de l'AfD a aussi été fermement condamnée par les autres formations politiques allemandes. "Nous connaissons les leçons de notre lourde histoire. De la haine est née la dictature, et la dictature a conduit à la guerre", a notamment déclaré la secrétaire d'Etat à la Culture Monika Grütters.
"Jour de la Victoire" sans défilé en Russie
A Moscou, où le "jour de la Victoire" est fêté le 9 mai, le grand défilé militaire sur la Place Rouge auquel étaient invités des dizaines de dignitaires étrangers, dont le président français Emmanuel Macron, a été reporté au nom de la sécurité sanitaire, seule la partie aérienne étant maintenue.
Le président Vladimir Poutine devait s'adresser aux Russes, qui attendent surtout des décisions pour l'après 11 mai, quand s'achèvera le confinement décrété depuis plus d'un mois pour empêcher la propagation du coronavirus.
"Ne baissez jamais les bras"
En Grande-Bretagne, les fêtes de rue et autres processions de vétérans ont dû être annulées. Lors d'un discours diffusé vendredi à 20h00 sur la BBC, la reine Elisabeth II s'est employée à remonter le moral des Britanniques, durement touchés par la pandémie.
"Au début, les perspectives semblaient sombres, l'issue lointaine, le résultat incertain", a déclaré la reine en évoquant la Deuxième guerre mondiale. "Mais nous avons continué à croire que la cause était juste et cette conviction (...) nous a portés. Ne baissez jamais les bras, ne perdez jamais espoir, tel était le message du jour de la Victoire en Europe".
Appel à l'engagement européen
Cérémonies restreintes en France aussi, où le président de la République a déposé une gerbe devant la statue du Général de Gaulle à Paris, puis devant la tombe du Soldat inconnu.
Lors d'un entretien téléphonique, Emmanuel Macron et Angela Merkel ont insisté sur la nécessité "plus impérieuse que jamais" de l'engagement européen.
"A l'occasion du 75e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre Mondiale, Angela Merkel et Emmanuel Macron ont en effet souhaité partager un message de mémoire et d'amitié, en soulignant la nécessité, plus impérieuse que jamais, de l'engagement européen", a indiqué la présidence française.
Emmanuel Macron s'était déjà entretenu jeudi avec son homologue russe Vladimir Poutine en saluant "l'amitié et la reconnaissance" entre les deux pays.
"L'Amérique triomphera" à nouveau
Le président américain a assuré que, comme en 1945, l'Amérique "triompherait", cette fois face au coronavirus.
Pandémie oblige, la victoire des Alliés contre l'Allemagne nazie a été célébrée en très petit comité à Washington. Donald Trump, accompagné de son épouse Melania, s'est rendu devant le mémorial de la Seconde Guerre mondiale situé à quelques pas de la Maison Blanche.
afp/cab