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Le Mouvement 5 Etoiles et sa ligne anti-système en chute libre en Italie

Luigi Di Maio lors d'un rassemblement électoral pour les européennes en mai 2019 à Rome. [Keystone - Angelo Carconi]
La fin prochaine du Mouvement 5 étoiles en Italie / La Matinale / 3 min. / le 14 janvier 2020
En Italie, le Mouvement 5 Etoiles (M5S), formation politique actuellement au pouvoir avec la gauche, traverse une grosse crise: perte de vitesse dans les sondages, démissions de parlementaires et un leader, Luigi Di Maio, toujours plus contesté par une partie de ses troupes.

La crise n'est pas nouvelle au M5S, fondé il y a dix ans par l'humoriste Beppe Grillo. On peut même dire qu'elle a commencé dès que la formation est arrivée au pouvoir après son triomphe aux législatives de 2018, où elle avait obtenu 33% des voix et pas moins de 336 parlementaires.

Formation anti-système, le M5S n'était toutefois pas vraiment préparé à gouverner. Il a d'abord payé au prix fort son entente avec la Lega, le parti souverainiste de Matteo Salvini, en récoltant la réprobation de l'aile gauche du mouvement. Or, maintenant que le groupe a changé d'alliance pour gouverner avec le parti démocrate, c'est son aile droite qui fait entendre son désaccord.

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"Dans les prochaines semaines, il y aura vraisemblablement encore plus de parlementaires du M5S qui vont sortir du mouvement, pour rejoindre d'un côté la droite souverainiste et de l'autre la 'gauche écologiste'", explique le politologue Massimiliano Panarari, professeur à l'Université Luiss de Rome.

Aux élections européennes de mai dernier, le M5S était tombé à 17%. Il est aujourd'hui donné à un peu plus de 15% dans les sondages. Ce qui signifie que beaucoup de députés et de sénateurs ne seront sans doute pas réélus, et prennent d'ores et déjà leur distance avec le mouvement pour chercher un autre parti. Alors qu'une trentaine de parlementaires ont déjà claqué la porte, le ministre de l'Education Lorenzo Fioramonti a démissionné fin décembre pour créer un nouveau mouvement écologiste.

Méfiance vis-à-vis de la plateforme numérique

La crise se situe également dans le fonctionnement même du Mouvement 5 Etoiles, avec un début de rébellion contre la société Casaleggio, société privée qui contrôle le M5S et notamment sa plateforme numérique autour de laquelle devait s'organiser la démocratie directe. De nombreux parlementaires refusent désormais de verser une partie de leurs indemnités sur un compte contrôlé par cette société privée.

"On n'arrive pas à comprendre qui le gère", fustige l'ancien ministre Lorenzo Fioramonti. "Il n'y a pas d'organisme tiers comme une fondation ou une association où je pourrais m'adresser pour avoir un reçu, pour savoir exactement qui empoche cet argent et pour quel motif. Vous trouvez ça normal qu'un compte sur lequel il y a des millions d'euros ne soient pas au minimum géré comme un club de pétanque de quartier?"

Guerre des chefs

Dans ce contexte, le président du Conseil des ministres Giuseppe Conte pourrait être le sauveur du M5S. L'actuel chef du gouvernement est en effet très apprécié dans l'opinion publique. Mais c'est là aussi le problème: la popularité de Giuseppe Conte est mal vécue par le leader du mouvement Luigi Di Maio. D'autant que le premier voudrait renforcer l'alliance avec le parti démocrate, tandis que Luigi Di Maio, soutenu par la société Casaleggio, voudrait au contraire maintenir une certaine distance avec la gauche.

Au final, cette guerre souterraine entre chefs exacerbe les tensions au sein du mouvement et affaiblit durablement le M5S.

Eric Jozsef/kkub

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