Renia Spiegel est morte à 18 ans, sous les balles des Allemands. Tuée lorsque sa cachette, dans un attique de la ville de Przemysl, au sud-est de la Pologne actuelle, fut découverte.
Ce qui relie Renia à Anne Frank, auteur d'un journal universellement connu, c'est leur passion pour l'écriture. Car, entre 14 et 18 ans, la romantique polonaise Renia a, comme la petite Allemande réfugiée à Amsterdam, rédigé un journal émouvant, plein d'anecdotes sur sa vie quotidienne, de prières à Dieu et de poèmes.
Cachée grâce à son petit ami
Renia commence son journal en janvier 1939. Elle vit à Przemysl, au sud-est de la Pologne actuelle, encore sous régime soviétique.
Lorsqu'éclate la Seconde Guerre mondiale, elle reste chez ses grands-parents à Przemysl, ses parents habitant Varsovie. Mais bientôt, la persécution contre les juifs la contraint à être enfermée dans le ghetto juif de la ville. Grâce à son petit ami, Zygmunt Schwarzer, elle peut s'en échapper pour se cacher avec les parents de celui-ci.
Mais Renia, dénoncée, est arrêtée en juin 1942. Elle est tuée avec les parents de Zygmunt, en pleine rue. Zygmunt Schwarzer, lui, passera par Auschwitz. Mais il survivra. Il va récupérer le journal de sa bien-aimée. Une fois émigré aux Etats-Unis après la guerre, il remettra l'émouvant journal de 700 pages à la mère de Renia, elle aussi migrante.
Traduction en anglais
Ce journal restera stocké dans le coffre d'une banque. Mais la nièce de Renia, Alexandra Bellak, bouleversée à la lecture de ces écrits, veut les faire connaître. Avec l'accord de sa mère Elizabeth, la sœur de Renia, elle fait traduire le journal en anglais. La publication a eu lieu, en septembre, aux Etats-Unis et au Royaume-Uni. Et une quinzaine de traductions sont en préparation.
De son côté, la Pologne redécouvre le passé de Renia Spiegel. Le réalisateur Tomasz Magierski, également ému par l'histoire de l'adolescente juive, a présenté à Varsovie, le mois dernier, le film Les rêves brisés, inspiré du journal. De fait, Alexandra Bellak et sa mère ont souhaité faire de la publication du "Journal de Renia" un acte militant contre le nationalisme, le populisme et l'antisémitisme.
Bernard Litzler/sjaq
Ariana/Elizabeth, la petite sœur de Renia
Ariana, piégée depuis le début de la guerre à Przemysl où elle avait passé l'été 1939 chez ses grands-parents, a eu la vie sauve grâce au père de sa meilleure amie, qui l'a emmenée par le train à Varsovie: "Ma vie a été sauvée par un bon chrétien. Risquant la peine de mort, il m'a conduit, comme son propre enfant, chez ma mère", raconte la petite dame de 88 ans, qui habite New York.
A l'époque, elle est baptisée et prend le prénom d'Elizabeth. Un officier allemand, tombé amoureux de sa mère, les envoie toutes les deux dans un endroit sûr en Autriche. Après la guerre, elles émigrent aux Etats-Unis.
"Nationalisme, populisme, antisémitisme. Tous ces 'ismes' reviennent à nouveau. Et nous ne voulons pas que la mort de millions de personnes se répète", affirme aujourd'hui Elizabeth. "Savez-vous que certaines personnes ne l'ont jamais cru? J'étais là. Je peux dire que c'est arrivé".
afp/sjaq