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Des groupes de pression américains poussent à la démission du pape

Le pape François. [Pool/Keytone - Peter Klaunzer]
Les ultra-conservateurs veulent la peau du pape: interview de Nicolas Senèze / Forum / 5 min. / le 7 septembre 2019
Sorti il y a quelques jours, le livre "Comment l'Amérique veut changer de pape" fait l'effet d'une bombe. L'enquête, réalisée par le journaliste Nicolas Senèze, décrit comment un groupe d'ultra-conservateurs américains souhaite obtenir la démission du souverain pontife.

Correspondant permanent à Rome du journal La Croix, Nicolas Senèze est un fin observateur des intrigues vaticanes. Dans son dernier livre, il décrit les attaques qu'ont opérées plusieurs groupes américains influents pour faire démissionner le pape François.

Interviewé samedi dans l'émission Forum, le journaliste décrit ces individus qui souhaitent un changement à la tête du catholicisme.

"Ce sont de riches laïcs américains qui, depuis plusieurs années, ont un peu pris le pouvoir au sein du catholicisme américain, à coups de dollars (...) Ils ont apporté de l'argent aux diocèses après les multiples affaires d'abus sexuels, et ils entendent obtenir une sorte de retour sur investissement, en les orientant dans leur vision extrêmement conservatrice et, sur le plan économique, extrêmement libérale".

Et d'ajouter: "Le pape François, avec sa critique du capitalisme, sa critique d'un certain mode de vie américain, par exemple en ce qui concerne la peine de mort, est quelqu'un qui ne va pas du tout dans leur sens".

Des relais en dehors des Etats-Unis

Mais l'offensive dépasse le seul territoire américain. Selon Nicolas Senèze, ces milieux ont réussi à trouver des relais, jusqu'aux portes du Vatican.

"Il y a tout juste un an, Monseigneur Vigano, évêque italien, a appelé à la démission du pape. Une sorte de déclaration de guerre de ces groupes de pression américains. L'évêque Vigano est un ancien nonce apostolique, c'est-à-dire un ancien ambassadeur du pape aux Etats-Unis, où il a été pendant longtemps (...) Il connaît bien ces groupes-là, il a travaillé avec eux et d'une certaine façon les a promus dans l'épiscopat américain", explique-t-il.

Objectif, le prochain conclave

Pour l'enquêteur français, les faits sont limpides. Ces groupes conservateurs ont clairement oeuvré à une démission: "Au début, ils ont essayé d'influer sur le Vatican, car ils sont de grands bailleurs de fonds."

Une pression que le pape a refusée: "Ce chantage à l'argent n'a pas fonctionné (...) Aujourd'hui leur combat est donc plutôt de préparer le prochain pape, le prochain conclave, en pesant, en mettant beaucoup d'argent cette fois-ci, pour obtenir des dossiers sur un peu tous les cardinaux qui seront amenés à élire un jour le successeur de François, pour finalement mettre de côté ou discréditer tous ceux qui pourraient apparaître comme les continuateurs des réformes de l'Eglise catholique".

Une intrigue singulière

Questionné pour savoir s'il ne s'agissait pas là d'une intrigue parmi d'autres au Vatican, Nicolas Senèze confirme qu'il y a toujours eu des affaires, tout en affirmant que celle-ci est différente et singulière.

"Il y a toujours eu des combats, y compris à l'intérieur du Vatican. Ce qui est différent cette fois, c'est qu'on avait jamais eu une campagne aussi explicite pour pousser un pape à la démission (...) D'une certaine manière, la démission de Benoît XVI a fait sauter un verrou. Les groupes de pression américains se disent que si c'est arrivé une fois, cela peut arriver encore."

Et de conclure: "La différence avec François, c'est qu'il est un pape solide, qui garde de solides appuis. Sa démission apparaît comme peu probable (...) Quand il a eu vent de la parution de mon livre, il m'a dit que c'était un honneur que ces gens l'attaquent. Une façon de dire qu'il n'entend pas infléchir sa ligne de réforme car il sait que son combat est juste".

Propos recueillis par Renaud Malik

Adaptation web: Tristan Hertig

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Messe géante du pape à Madagascar

Le pape François a dénoncé dimanche à Madagascar la "culture du privilège" devant près d'un million de personnes. Elles étaient venues des quatre coins du pays pour assister à une messe géante en lisière de la capitale Antananarivo.

Samedi, lors d'une rencontre avec les autorités politiques et civiles du pays, le pape avait déjà appelé à lutter contre "la corruption et la spéculation qui augmentent la disparité sociale", évoquant "la grande précarité" parfois "inhumaine" de la population de l'île.

Plus tôt dans la semaine, le souverain pontife s'était rendu au Mozambique pour une visite pastorale.