Musées, la nouvelle carte du monde

Grand Format

Keystone / EPA - Nic Bothma

Introduction

Aujourd'hui, l'Europe et les Etats-Unis n'ont plus le monopole des grands musées. Du Caire à Shanghai en passant par Le Cap, en Afrique du Sud, de nouveaux-venus élargissent l'offre culturelle mondiale et bouleversent les lignes d'une diplomatie culturelle héritée du passé.

Chapitre 1
De nouveaux acteurs

En Chine, Shanghai construit des musées à tour de bras avec l'ambition de devenir le pôle culturel le plus important d'Asie d'ici 2020. En Afrique, l'Egypte s'apprête à inaugurer un nouvel écrin pour ses antiquités, à deux pas des pyramides, avec l'espoir de faire revenir les touristes, tandis qu'à l'autre bout du continent, au Cap, le Zeitz MOCAA met l'art contemporain africain à l'honneur avec succès.

Cet été, la RTS s'intéresse à ces nouveaux musées qui défient des institutions historiques et ultra-fréquentées telles que le Louvre, le British Museum et le Metropolitan Museum de New York où le 19h30 s'est également rendu. Alors qu'en 2018, les vingt musées les plus fréquentés étaient tous situés dans l'hémisphère Nord, en particulier aux Etats-Unis et en Europe, reflétant l'ordre mondial du 20e siècle, le classement pourrait évoluer ces prochaines années.

La Chine et l'Afrique enfin sur la mappemonde

La Chine, déjà bien présente dans le classement, pourrait encore gagner du terrain, alors que l'Afrique revendique elle aussi de plus en plus son droit à exister sur la mappemonde.

Témoignant de ces temps qui changent, le président français Emmanuel Macron s'est engagé le 23 novembre 2018 à rendre au Bénin 26 pièces qu'il réclamait. Cette décision faisait suite à la remise du rapport Savoy-Sarr, lequel préconisait une restitution rapide des oeuvres d'art pillées par la France coloniale. "Il faut que les grands pays riches du 20e siècle acceptent de renoncer à la logique coloniale, mais il ne s'agit pas seulement de rendre des oeuvres, il faut encourager de véritables échanges", analyse pour la RTS le professeur Pascal Griener.

>> L'éclairage de RTSinfo :

Musees la revolution
L'actu en vidéo - Publié le 7 août 2019

Spécialiste d'histoire de l'art et de muséologie, il juge légitime les revendications des pays qui souhaitent récupérer leur patrimoine, et invite Européens et Américains à arrêter de croire qu'ils sauront mieux que des Africains ou des Asiatiques comment conserver des oeuvres d'art.

Aujourd'hui, les grands musées se conçoivent comme des forums

Pascal Griener, professeur d'histoire de l'art et de muséologie

"A l'ère d'internet, le musée permet à la population de se reconnecter avec le réel", relève Pascal Griener, qui enseigne à l'Université de Neuchâtel. Et l'on pourrait ajouter que le musée représente aujourd'hui un lieu où la population peut se reconnecter avec elle-même. "La conception de la contemplation du 19e siècle avec un individu seul devant un tableau a disparu. Aujourd'hui, les grands musées se conçoivent davantage comme des forums. Ils représentent un outil social d'être ensemble essentiel", précise-t-il.

Gare au mythe de Bilbao

Nouveaux lieux de rendez-vous d'un monde globalisé dans lequel les voyages se sont banalisés, les musées intéressent les villes pour les gains économiques qu'ils font miroiter, mais aussi parce qu'ils restent un outil de soft power non négligeable.

Pascal Griener appelle toutefois les collectivités à se méfier du mythe Bilbao. "Il ne suffit pas d'implanter un musée dans une région défavorisée pour changer la situation. En Espagne, le Guggenheim s'inscrivait dans une série d'investissements plus globale", rappelle cet expert sceptique sur la viabilité à long terme des franchises de musées qui s'exporteraient comme des marques de fast-food.

Chapitre 2
Malaga, le pari du tourisme culturel grâce à Pompidou

AFP - Jordan Banks/Robert Harding Heritage