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Abus sexuels: un rapport accable l'église irlandaise

Le juge Sean Ryan a livré les conclusions du rapport devant la presse.
Le juge Sean Ryan a livré les conclusions du rapport devant la presse.
Une commission d'enquête irlandaise a publié mercredi un rapport dénonçant des décennies d'abus sexuels, parfois "endémiques", survenus à partir des années 1930 dans les institutions pour enfants dirigées par l'Eglise catholique, accusée d'avoir gardé "le silence".

Réagissant au rapport, le cardinal Sean Brady, numéro un de
l'Eglise catholique irlandaise, s'est déclaré "profondément désolé
et extrêmement honteux".

Un rapport accablant de 2500 pages

Après neuf ans d'enquête auprès de plusieurs centaines d'écoles
et institutions de l'île et plus d'un millier de victimes
interrogées, la Commission créée par le gouvernement en 2000 a
rendu un rapport de 2500 pages qui accable l'Eglise catholique,
toute-puissante dans l'île, mais également le ministère de
l'Education.



"Les abus sexuels étaient endémiques dans les institutions pour
garçons", écrivent les auteurs du rapport, précisant que les filles
étaient quant à elles "soumises à des abus sexuels (qui) n'étaient
pas érigés en système".



Pendant la période concernée, de 1936 à la fin des années 90, "les
autorités religieuses savaient que les abus sexuels étaient un
problème persistant dans les institutions religieuses masculines".
L'Eglise catholique "n'a pas écouté les personnes qui se
plaignaient d'abus sexuels survenus par le passé ou ne les a pas
crues en dépit de preuves recueillies dans des enquêtes policières,
de condamnations criminelles ou de témoignages".

Culture du silence

Les abus sexuels commis par des membres des ordres religieux
étaient "rarement portés à l'attention du ministère de l'Education
par les autorités religieuses en raison d'une culture du silence",
regrette la Commission d'enquête. "Quand le personnel religieux
commettait des abus, le problème était plutôt traité avec des
procédures disciplinaires internes et avec la loi canonique.



La Gardai (police irlandaise, ndlr) n'était pas mise au courant",
ajoute-t-elle, soulignant que "des hommes ayant déjà commis des
abus sexuels quand ils étaient membres d'ordres religieux
continuaient à exercer en tant qu'enseignants".



"Je suis profondément désolé et j'éprouve une honte extrême", a
déclaré dans un communiqué le primat d'Irlande, le cardinal Sean
Brady, assurant que la hiérarchie catholique "restait déterminée à
faire tout le nécessaire pour faire de l'Eglise un lieu de
sécurité, de vie et de joie pour les enfants".

Déjà 14'500 victimes annoncées

Le rapport stigmatise également le ministère de l'Education qui,
"dans les rares occasions où il était informé, se rendait complice
du silence". Réagissant pour le compte du gouvernement, le ministre
de l'Education, Batt O'Keeffe, a présenté sa "sincère et profonde
compassion" aux victimes, s'engageant à "tirer les leçons du
passé". L'une des victimes, John Kelly, a quant à elle estimé que
"rien dans ce rapport n'était significatif en termes de justice
rendue".



Un organisme mis sur pied par le gouvernement parallèlement à la
commission d'enquête a déjà versé près d'un milliard d'euros de
dédommagements à 12'500 des quelque 14'500 victimes qui se sont
manifestées.



afp/ap/cht

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Plus de 30'000 enfants concernés

Plus de 30'000 enfants considérés comme des délinquants ou issus de familles à problèmes -une catégorie qui englobait souvent les mères célibataires- ont été envoyés dans les écoles techniques, maisons de redressement, orphelinats et foyers administrés par des catholiques, entre les années 1930 et les années 1990, période marquée par la fermeture des dernières institutions.

Selon les conclusions du rapport, attentats à la pudeur et viols étaient «endémiques» dans les établissements réservés aux garçons, principalement dirigés par la congrégation des Frères chrétiens.

Les filles, dont s'occupaient des religieuses, essentiellement les Soeurs de la miséricorde, ont moins souffert d'abus sexuels. Cependant, elles étaient victimes d'agressions et d'humiliations fréquentes, destinées à provoquer chez elles un sentiment de dépréciation.

Les pensionnaires étaient "dénigrés et humiliés quotidiennement" et leurs draps souillés montrés en public. Les fratries étaient séparées et les contacts avec les familles limités.

Les enfants souffraient "souvent de la faim". Les logements étaient glacials, spartiates et lugubres". Les sanitaires étaient rudimentaires.

Outre les abus sexuels, le rapport dénonce également de nombreux autres mauvais traitements, qu'ils aient été physiques, tels "des punitions corporelles sévères", ou mentaux. Les enfants étaient soumis à des "pratiques humiliantes" qui faisaient régner un "climat de peur".