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Les sanctions menacent l'hégémonie du dollar, estime un expert du FMI

Le dollar reste la principale monnaie utilisée pour des réserves de change. [Keystone - Martin Rütschi]
Le FMI juge que l’hégémonie du dollar est menacée par les sanctions contre la Russie / La Matinale / 2 min. / le 12 avril 2022
Selon un expert du Fonds monétaire international (FMI), le gel des transactions en dollars pourrait provoquer à plus ou moins long terme une fragmentation du système actuel. Cela inciterait plus de pays à diversifier leurs précieuses réserves de change en dollars.

La Russie serait sur le point d'être en défaut de paiement, faute de pouvoir accéder à ses réserves de devises dans les banques internationales (lire encadré). Ce risque pourrait convaincre d'autres pays à diversifier leurs réserves de change pour plus de sécurité.

Le processus n'est du reste pas nouveau, il a débuté il y a une vingtaine d'années. Avec l'émergence d'autres monnaies, les réserves de change en dollars ont d'ores et déjà diminué, passant de 70% à 60% de l'ensemble des réserves.

"Une forme d'assurance-vie pour un pays"

Pour Cédric Durand, professeur associé en économie politique à l'Université de Genève, l'hégémonie du dollar dans le système financier international est déjà mise à mal aujourd'hui. Les réserves, a-t-il rappelé mardi dans La Matinale de la RTS, sont "ce qui permet à un pays de faire face lorsque des circonstances extrêmes arrivent. Elles permettent de continuer à acheter des biens dont il a absolument besoin à l'étranger".

Mais "cette forme d'assurance-vie pour un pays" n'est pas sûre si elle est détenue en dollars à l'étranger, a poursuivi Cédric Durand. "Et donc, ils vont chercher d'autres moyens de se constituer un trésor. Ce sera des réserves dans d'autres devises, de l'or ou d'autres ressources."

Le dollar comme arme des Etats-Unis

Il s'agit cependant d'une hypothèse à long terme, car pour l'instant aucune autre monnaie n'est en mesure de détrôner le dollar. "Cela fait longtemps que les Américains utilisent le dollar comme une arme pour sanctionner les pays qui les énervent" a relevé Charles Wyplosz, professeur honoraire à l'Institut de hautes études internationales et du développement à Genève.

"Mais détenir des réserves [dans d'autres monnaies] étrangères, dans quelle devise?", s'est-il interrogé. "On peut aller sur la monnaie chinoise, mais comme elle est très peu utilisée dans les transactions internationales, ça n'ira pas très loin."

Il n'empêche: l'importance des sanctions à l'égard de la Russie, qui avait pourtant réduit ces dernières années son exposition au dollar, pourrait inciter d'autres pays à être moins dépendants du billet vert.

Sylvie Belzer/oang

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Moscou prêt à aller en justice

Samedi dernier, l'agence de notation S&P a déclaré la Russie en défaut "sélectif", faute d'avoir pu régler une dette en dollars durant la semaine. C'est le signe que Moscou se rapproche d'un défaut de paiement général.

>> Lire : Le défaut de paiement de la Russie se rapproche, selon une agence de notation

Mais la Russie entamera alors une procédure judiciaire, a réagi son ministre des Finances Anton Silouanov dans une interview publiée lundi. "Nous irons en justice, car nous avons pris toutes les mesures nécessaires pour nous assurer que les investisseurs reçoivent leurs paiements", a-t-il déclaré au journal Izvestia.

Près de 30 milliards d'avoirs gelés par l'UE

Les pays de l'UE ont déjà gelé au moins 29,5 milliards d'euros (29,9 milliards de francs) d'avoirs russes et biélorusses dans le cadre des sanctions adoptées contre la guerre menée en Ukraine, selon un décompte encore partiel annoncé vendredi dernier par la Commission européenne.

L'UE a approuvé vendredi un cinquième paquet de sanctions contre Moscou, prévoyant un embargo sur le charbon russe et la fermeture des ports européens aux navires russes. Et des discussions sont en cours pour un sixième train de sanctions.