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La Grèce, Chypre et Israël construisent un gazoduc pour tenir tête à la Turquie

Le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis (à droite) parle avec le président chypriote Nicos Anastasiades, lors de leur rencontre concernant le gazoduc Eastmed. Athènes, le 2 janvier 2020. [Keystone/epa - Alexandos Beltes]
La Grèce, Chypre et Israël signent jeudi un accord sur le gazoduc Eastmed / Le Journal horaire / 27 sec. / le 2 janvier 2020
La Grèce, Chypre et Israël ont signé jeudi à Athènes un accord sur le gazoduc EastMed, un projet majeur pour la Méditerranée orientale où l'exploitation d'hydrocarbures ne cesse d'alimenter les tensions avec la Turquie.

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, le président chypriote, Nicos Anastasiades et le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis,ont solennellement signé cet accord "inter-étatique" jeudi soir.

L'objectif est de faire de trois pays un maillon important de la chaîne d'approvisionnement énergétique de l'Europe mais aussi d'afficher leur détermination face aux revendications d'Ankara, qui convoite les gisements énergétiques de la région.

Un ouvrage sous-marin

D'une longueur de 1872 km, l'EastMed, dont la plus grande partie sera sous-marine, l'EastMed doit permettre d'acheminer entre 9 et 11 milliards de mètres cubes de gaz naturel par an depuis les réserves offshores au large de Chypre et d'Israël vers la Grèce, ainsi que vers l'Italie et d'autres pays du sud-est de l'Europe grâce aux gazoducs Poseïdon et IGB.

L'origine du projet remonte à l'an 2013: à l'époque la Depa – la société publique grecque de gaz naturel – avait inscrit ce projet sur la liste "des ouvrages d'intérêt commun" de l'Union européenne (UE) ayant ainsi bénéficié de ses fonds européens pour couvrir une partie des travaux préparatoires.

Le coût du gazoduc jusqu'en Italie est actuellement estimé à 6 milliards d'euros.

Contrer la Turquie

Pour Athènes et Nicosie, "l'accélération des procédures concernant le projet EastMed est un moyen pour Athènes de contrer les tentatives de la Turquie voisine visant à empêcher le projet", a commenté mercredi le quotidien grec économique Kathimerini.

Car la découverte ces dernières années de gigantesques gisements gaziers en Méditerranée orientale attise la convoitise des pays de la zone.

Les réserves de gaz et de pétrole au large de Chypre a déclenché une dispute avec la Turquie dont l'armée occupe le tiers nord de ce pays, membre de l'UE.

Chypre a signé début novembre son premier accord d'exploitation de gaz avec un consortium regroupant les sociétés anglo-néerlandaise Shell, l'américaine Noble et l'israélienne Delek.

Mais Ankara, qui conteste le droit de Chypre de mener toute exploration et exploitation des ressources énergétiques, s'est livrée à une démonstration de force ces derniers mois en envoyant des navires de forage dans la Zone économique exclusive (ZEE) de Chypre malgré des avertissements de Washington et de l'UE. Cette dernière a adopté une série de mesures politiques et financières pour sanctionner la poursuite de ces forages.

Accord maritime entre la Libye et la Turquie

Le président turc Recep Rayyip Erdogan (au centre) et son homologue d'Azerbaïdjan, Ilham Aliyev (3e depuis la gauche), lors de la cérémonie d'ouverture du Trans-Anatolian Natural Gas Pipeline (TANAP). Le TANAP, long de 1850 km, entend connecter le pipeline en Géorgie et en Grèce; son but est aussi d'accroître les exportations de gaz d'Azerbaïdjan vers l'Europe (Turquie, 30 novembre 2019). [Keystone/epa - Tolga Bozoglu]

Défiant ces avertissements et pour mieux renforcer sa position dans la région, Ankara a signé fin novembre un accord maritime controversé avec le gouvernement libyen d'union (GNA): "Avec cet accord, nous avons augmenté au maximum le territoire sur lequel nous avons autorité. Nous pouvons mener des activités d'exploration conjointes", a déclaré le président turc Recep Tayyip Erdogan, lors d'une interview à la télévision publique turque TRT le 9 décembre.

>> Lire : La Turquie d'Erdogan entend envoyer des troupes en Libye

Cet accord, qui délimite les frontières maritimes entre les deux pays, a été vivement condamné par plusieurs pays, dont Chypre et la Grèce, voisins de la Turquie.

Athènes a qualifié cet accord de "perturbateur" pour la paix et la stabilité dans la région et appelé le 10 décembre les Nations unies à le condamner en soulignant qu'il viole le droit maritime international et les droits souverains de la Grèce et d'autres pays".

afp/sjaq

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