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Les frais bancaires sont en constante augmentation en Suisse

Les frais bancaires facturés aux clients ont augmenté en moyenne de 45% depuis 2012. Colère des défenseurs des consommateurs
Les frais bancaires facturés aux clients ont augmenté en moyenne de 45% depuis 2012. Colère des défenseurs des consommateurs / 19h30 / 2 min. / le 3 novembre 2019
Les frais bancaires ont connu une hausse moyenne de 45% depuis 2012 en Suisse, selon une estimation de la Fédération romande des consommateurs (FRC) qui dénonce une absence de transparence. Les banquiers justifient notamment ce phénomène par la digitalisation des activités.

Deux francs. C'est le montant que doivent débourser depuis le 1er juillet les clients d'UBS pour tout retrait d'argent liquide au guichet. Une prestation qui était précédemment gratuite. Du côté de Postfinance, la tenue des comptes sur lesquels sont déposés plus de 7500 francs est soumise à une taxe mensuelle de cinq francs depuis le 1er janvier dernier. Il ne fallait pourtant pas débourser un seul centime jusqu'alors.

La tendance est observable partout en Suisse: les frais bancaires ne cessent de s'accroître. "On estime la hausse à 45% depuis 2012", explique Robin Eymann, responsable de la politique économique à la FRC. Si son organisation ne tient pas un relevé précis de la multitude des prestations facturées par les établissements bancaires, elle réalise chaque semestre un panorama général qui lui permet de dégager une tendance.

Robin Eymann constate que "des paliers supplémentaires sont actuellement franchis, comme à la Banque cantonale neuchâteloise". Les propriétaires qui y possèdent un compte courant de propriété par étage (PPE) ont récemment appris que leurs frais allaient grimper de 60% d'un coup.

Directeur général de la Banque cantonale neuchâteloise (BCN), Pierre-Alain Leuenberger tempère: "C'est un tarif qui n'a pas été revu à la hausse depuis 2010. Si le pas peut paraître important aujourd'hui, il faut voir que les tarifs n'ont pas bougé durant dix ans. Utiliser le pourcentage dans ce contexte n'est pas forcément très heureux. On parle d'un tarif de 1,35 franc par mois et cela ne me paraît pas complètement disproportionné".

Pression des taux négatifs

Comment expliquer ces hausses? Pour Robin Eymann, la tendance s'est accentuée depuis l'instauration des taux d'intérêt négatifs par la Banque nationale à la fin de 2014. Une décision qui a réduit les marges des banques. "On voit que ces taux sont appliqués de manière détournée sur les clients, ce n'est pas transparent", juge le spécialiste de la FRC.

Pierre-Alain Leuenberger explique en revanche que les taux négatifs ne rentrent pas "directement" dans le calcul des banques même s'ils impliquent des dépenses très importantes: "Les hausses de frais ne représentent donc qu'une petite fraction de ce montant-là".

Le directeur de la BCN avance un autre élément pour expliquer ces augmentations: la digitalisation des activités. "Contrairement à ce qu’on pourrait penser, elle ne réduit pas les coûts. Elle aurait plutôt tendance à les dédoubler parce que les banques gardent leur offre traditionnelle à côté de la mise en place d’une offre digitale". Selon Pierre-Alain Leuenberger, la réglementation, "devenue extrêmement dense" depuis la crise de 2008, entraînerait aussi des coûts supplémentaires répercutés sur les clients.

Importante perte de clients chez Postfinance

Les frais bancaires pourraient encore grimper à l'avenir. Dans un marché libre, il n'existe aucune autorité légale pour réglementer la pratique. Même l'Ombudsman des banques déclarait forfait dans un communiqué daté du 27 juin dernier: "La problématique du caractère adéquat des frais et commissions bancaires échappe à son appréciation, les questions de politique commerciale et tarifaire générale ne relevant pas de la compétence de l’Ombudsman."

La réaction des clients pourrait cependant faire réfléchir à deux fois les établissements bancaires avant de modifier leurs tarifs. Au cours de l'année 2018, 300'000 comptes ont été fermés chez Postfinance, comme l'indique son rapport de gestion.

Contacté par la RTS, l'établissement relativise ce chiffre en indiquant qu'environ "60'000 nouvelles relations clients" ont été ouverte au premier semestre de cette année. Et de préciser toutefois: "Nous ne cacherons pas le fait qu'environ 130'000 relations clients ont été supprimées" dont près de 70'000 "en raison des augmentations".

Kevin Gertsch, Thierry Clémence

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