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La Chine grimpe au 3e rang des pays de l'atome et vise 50 nouveaux projets

En surcoût ou à ban en Europe, les projets nucléaires se multiplient dans les pays émergents.
En surcoût ou à ban en Europe, les projets nucléaires se multiplient dans les pays émergents. / 19h30 / 2 min. / le 20 novembre 2018
Les pays de l'est, emmenés par la Chine, misent de plus en plus sur l'énergie nucléaire. Dans le même temps, l'Occident ralentit et les projets de nouvelles centrales piétinent, avec des surcoûts chiffrés en milliards de francs.

En Occident, il y a les pays qui ont décidé de sortir du nucléaire, comme la Suisse, l'Italie depuis les années 90 ou l'Allemagne, qui prépare sa sortie depuis 2011 et qui compte désormais plus de réacteurs à l'arrêt (25) qu'en service (7). Et il y a les champions historiques de l'atome, les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne, qui piétinent. Ils ont certes quelques chantiers en cours, mais ils présentent de gros retards et affichent des surcoûts chiffrés en milliards.

Ailleurs sur le globe, d'autres pays prennent le chemin inverse. Il y a ceux qui construisent leurs premières centrales, comme le Bangladesh, la Biélorussie, les Emirats arabes unis ou la Turquie mais aussi les pays qui agrandissent leur parc nucléaire de manière galopante, à l'image de l'Inde, de la Russie et surtout de la Chine.

Vers une Chine à plus de cent réacteurs

Cette dernière a construit pas moins de 23 réacteurs ces trois dernières années et en compte désormais 46 en activité, dérobant au Japon son troisième rang mondial, derrière les Etats-Unis (98) et la France (58). Et l'empire du milieu ne va pas en rester là. Un total de 50 projets de nouvelles centrales sont déjà sur la table, dont 11 sont déjà en construction.

Dans la liste des pays en pleine expansion nucléaire dans le monde, la Chine et ses 11 chantiers se situe tout en haut, suivie par l'Inde (7), la Russie (6) et la Corée du Sud (5).

Un tel boom à l'est, au nez et à la barbe des projets occidentaux, s'expliquerait par les régimes des pays qui misent beaucoup sur l'atome, selon le conseiller national Roger Nordmann: "Les régimes autoritaires ne se préoccupent pas des craintes de sécurité de la population, et ils achètent aux frais de l'Etat. La question des coûts ne les préoccupe donc pas vraiment, et encore moins les coûts de démantèlement et de gestion des déchets qui viennent après", souligne à la RTS le socialiste vaudois.

Une industrie qui ne s'arrête jamais

Selon Michael Keroullé, directeur commercial de General Electric Steam Power, dont les turbines équipent la moitié des centrales nucléaires en service dans le monde, les normes de sécurité ont été revues après la catastrophe de Fukushima en 2011. Et en Europe, l'industrie n'était pas prête pour ces changements, contrairement à la Chine ou la Russie.

"L'industrie chinoise ne s'est jamais arrêtée. Ils ont eu une continuité entre les réacteurs de deuxième et de troisième génération. Mais les pays qui n'étaient pas prêts ont dû faire redémarrer leur industrie, qui était vraiment le point principal de retard", explique-t-il.

La localisation de la technologie, dont la conception et la fabrication se situent en Chine, est ce qui donnerait un avantage aux Chinois, estime Nesimi Kilic, ingénieur nucléaire à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Selon lui, la Chine dispose des installations, de la technologie et des capacités humaines pour se développer. Et les réacteurs chinois en construction comprennent déjà plusieurs modèles avancés. "La Chine est devenue un pilote pour le monde", affirme-t-il sur le site de l'AIEA.

Des projets à l'est et en Angleterre

Outre les chantiers en cours, le nombre de projets de nouvelles centrales explose également à l'est: 39 nouveaux chantiers pourraient bientôt voir le jour en Chine, 20 en Inde et 19 en Russie.

Le Royaume-Uni a également 13 nouvelles centrales sur la table. Et certains projets ont de bonnes chances d'aboutir, selon Michael Keroullé: "En France, nous voyons probablement un ou deux projets supplémentaires, mais qui ne sont pas encore établis et qui n'ont pas encore été décidés de manière ferme par EDF. En revanche nous voyons sur le Royaume-Uni de nouvelles centrales sur lesquelles nous sommes déjà actifs et en discussion avec EDF. Donc le programme EDF en Angleterre figurera probablement dans nos prochaines prévisions".

Face à ce développement, la Suisse devrait-elle renoncer à sa sortie du nucléaire? "Non", répond Roger Nordmann. Selon lui, "c'est la façon la plus chère d'obtenir de l'électricité renouvelable sans carbone. C'est une technologie qui a quelque chose de démoniaque, qui attaque la matière. Et maintenant, on a de meilleures façons de produire de l'énergie que de développer le nucléaire".

Le nucléaire a l'atout de ne pas émettre de CO2, mais traîne toujours ses boulets: la radioactivité et le prix.

Sujet TV: Pascal Jeannerat

Adaptation Web: Feriel Mestiri

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