Au Liban et à Gaza, l'Unesco tente de protéger des dizaines de sites culturels d'importance
Ces sites culturels libanais "bénéficient désormais du plus haut niveau d'immunité contre les attaques et les utilisations à des fins militaires", selon le communiqué de l'organisation de l'ONU dédiée à la science, la culture et l'éducation (Unesco) publié lundi dernier.
"Le non-respect de ces clauses constituerait une violation grave de la Convention de La Haye de 1954 (pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé, ndlr) et ouvrirait la possibilité de poursuites", prévient l'Unesco.
Les temples de Baalbek parmi les mieux conservés au monde
Parmi la trentaine de biens listés au Liban se trouvent notamment les sites archéologiques de Baalbek et Tyr, la ville de Byblos, les ruines d'Anjar, la Foire internationale Rachid Karameh à Tripoli et la vallée de Kadisha, qui sont inscrits au patrimoine mondial et "près desquels des frappes ont été constatées récemment", alerte l'organisation onusienne, notamment dans la ville de Baalbek (nord-est).
Reçu dans Forum le 23 octobre dernier, Lorenz Baumer, professeur à la tête de l'unité d'archéologie classique à l'Université de Genève, déplorait la perte que cela pourrait représenter si le site archéologique de Baalbek était touché, tant "il est exceptionnel sur toute une série d'aspects".
"Pour commencer, par les dimensions des bâtiments qui s'y trouvent", soulignait-t-il. "Le Temple de Jupiter avec ses 88 mètres de longueur compte parmi les plus grands, si ce n'est le plus grand, temple de l'Antiquité encore existant. Sans compter le temple de Bacchus (en photo ci-dessus), plus petit, mais richement décoré, qui fait partie des mieux préservés au monde."
Session extraordinaire de l'Unesco à Paris
La décision de l'Unesco de placer ces 34 sites sous "protection renforcée provisoire" intervient après la tenue lundi dernier d'une "session extraordinaire" du Comité pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé, à la demande du Liban, dans les locaux parisiens de l'organisation de l'ONU.
Cela fait également suite à une pétition adressée à l'Unesco par 300 personnalités du monde de la culture, dont des archéologues et des universitaires, qui ont appelé dimanche l'institution à garantir la protection du patrimoine libanais.
Et il faut dire que, en poursuivant ses frappes, à la fois contre le Hezbollah au Liban et le Hamas dans la bande de Gaza, Israël a déjà visé à Gaza plusieurs sites d’intérêt culturels surveillés par l'Unesco (lire encadré). Et ce alors qu'il est signataire de la Convention de La Haye de 1954, "ce qui en fait un Etat renégat, car Israël est censé protéger ce patrimoine", déplorait début octobre au micro de Forum l'expert fédéral en archéologie méditerranéenne Marc-André Haldimann, craignant que le Liban ne soit pas épargné.
"L'Unesco entretient avec le Liban une coopération profonde et ancienne. Nous ne ménagerons aucun effort pour apporter toute l'expertise et l'assistance nécessaires pour protéger son patrimoine exceptionnel", a de son côté déclaré la directrice générale de l'organisation Audrey Azoulay.
Fabien Grenon avec afp
Une centaine de sites surveillés à Gaza
Dans la bande de Gaza, un site, le complexe monastique de Saint-Hilarion, a été provisoirement inscrit en décembre 2023 par l'Unesco sur la liste internationale des biens culturels sous protection renforcée, c'est-à-dire le plus haut niveau d'immunité établi par la Convention de La Haye de 1954.
Les ruines de Saint-Hilarion figurent parmi les plus anciens monastères du Moyen-Orient, offrant un témoignage remarquable des débuts du christianisme dans la région. Le site est actuellement placé sous la supervision directe du ministère du Tourisme et des Antiquités de l'Autorité palestinienne.
120 autres sites surveillés par imagerie satellite
A côté de cela, une centaine d'autres sites d'intérêt culturels sont également surveillés par l'Unesco dans la bande de Gaza. Les évaluations sur le terrain étant impossibles, l'Unesco effectue pour l'heure une évaluation à distance grâce aux images satellites et aux analyses fournies par l'institut Unitar/Unosat de l'ONU spécialisé dans l'imagerie satellite.
Parmi ces lieux, le 17 septembre 2024, l'organisation avait pu établir que 69 avaient subi des dommages depuis le 7 octobre 2023 – 10 sites religieux, 43 bâtiments d'intérêt historique et/ou artistique, 2 dépôts de biens culturels mobiliers, 6 monuments, 1 musée et 7 sites archéologiques.
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