L'avis de Sébastien Salerno, chargé d'enseignement UNIGE et spécialiste en communication politique:
Les partis misent-ils de plus en plus sur le divertissement pour séduire l'électeur ?
La tendance à une communication politique divertissante est manifeste en Suisse, comme ailleurs. Aujourd’hui sur les matériaux de campagne, la simplification des messages l’emporte sur les discours complexes et sérieux. Je crois que les politiciens ont compris la difficulté de persuader un électorat, plus volatil, de leurs arguments et préfèrent viser la mobilisation ou la séduction (d'où l'importance de l'humour).
Quel est l’impact au niveau électoral ?
L’impact sur le vote est assez faible. On ne fait pas basculer une campagne avec un clip sympathique. Pour susciter des votes, un parti doit surtout séduire d’importants groupes d’influence et des catégories sociales. Mais l’objectif du divertissement en politique est de toucher un plus large électorat que celui habituellement visé, un public plus jeune. C’est aussi le moyen d’exister dans les médias, d’être visible sur un maximum de plateformes.
En utilisant l’humour, y a-t-il un risque de tomber dans le ridicule ?
Non pas du tout. L’usage de l’ironie, le fait de se moquer de soi-même, montre que l’on est prêt à l’autocritique. Ce jeu de l’autodérision passe très bien auprès de l’opinion.
L’originalité en campagne n’est pourtant pas très présente en Suisse par rapport à l’étranger.
En Suisse, le marché électoral est très fragmenté en raison du fédéralisme et de nos trois langues nationales. Nous sommes donc face à de petits marchés politiques, qui impliquent de fait des campagnes de proximité. De plus, les techniques historiques de campagne, tel que les débats, les appels téléphoniques, les affiches, ou la distribution de tracts dans la rue, n’ont pas subi de dévaluation au profit des sondages d'opinion ou des grands médias nationaux, comme en France par exemple. Ces techniques sont encore bien perçues par les partis politiques.