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La culture se déconfine, mais le monde de la danse reste dans l'expectative

Des danseurs lors d'une répétition publique du Ballet du Grand Théâtre le 23 mars 2019 à Genève. [Keystone - Martial Trezzini]
Le monde de la danse reste confiné: interview de Marco Cantalupo / Le 12h30 / 6 min. / le 15 mai 2020
La pandémie de coronavirus est particulièrement difficile à vivre pour le domaine de la danse. Les compagnies peinent à imaginer comment respecter les mesures de distanciations physiques sans dénaturer l'essence même de leur art.

Le déconfinement dans le monde de la culture a commencé la semaine dernière, avec la réouverture des bibliothèques, librairies et musées. Et si pour ces derniers, la règle étant en général de "ne pas toucher", l'exercice se passe bien, il en va tout autrement de la danse, toujours confinée et en attente d'une potentielle ouverture le 8 juin. Mais à quelles conditions?

Le monde de la danse vit cette crise de manière particulièrement aigüe: non seulement tout est à l'arrêt, les spectacles reportés, les tournées annulées, mais la douzaine de compagnies en Suisse romande interrogée peine à imaginer comment respecter les mesures de distanciations physiques sans dénaturer l'essence même de son art.

Tout contact banni

Selon les consignes recommandées par la branche, rappelons que tout contact doit être banni pendant les répétitions. Et si les danseurs se produisent à moins de deux mètres pendant cinq minutes, ils doivent ensuite s'éloigner pendant dix minutes.

Plusieurs chorégraphes estiment impensable pour des danseurs de ne pas se toucher. Cet automne par exemple, deux compagnies devraient présenter un spectacle l'une autour de la rencontre, et l'autre de la réciprocité. Sans contact, cela semble impossible à réaliser.

Par définition, les plus petites compagnies s'en sortent mieux. Aucun problème pour ceux qui dansent en solo par exemple. La Compagnie du Marchepied par exemple travaille sur un spectacle avec quatre danseurs. Ils peuvent ainsi répéter deux par deux, matin ou après-midi. La situation est plus compliquée pour le Ballet du Grand Théâtre de Genève, qui compte 22 danseurs. Il est envisageable d'organiser des créneaux, répéter en deux groupes, avec la distance. Mais pour le directeur du Ballet, ce n'est pas viable à terme: pour la dynamique de groupe, il faut pouvoir se toucher.

Diriger à distance

Il est par contre possible de diriger des chorégraphies à distance, par vidéo. C'est le cas, pour la première fois, de Ioannis Mandafounis, qui crée un solo pour l'opéra de Lyon. József Trefeli, lui, travaille avec des danseurs en Nouvelle-Zélande. Ils sont déconfinés et peuvent se toucher, mais pas voyager. Le chorégraphe les dirige par écran interposé, la nuit, en raison du décalage horaire.

La crise aura sans doute un impact sur la chorégraphie. Certains veulent profiter de cette crise pour réfléchir autrement et imaginer des pièces qui, justement, montrent la distance sur le plateau. La Compagnie Alias travaille sur un projet avec une partie de public virtuel. Mais beaucoup disent qu'ils ne veulent pas travestir leur métier et refusent de réduire leurs possibilités expressives. D'autres, comme Yasmine Hugonnet, parlent même d'entrer en résistance.

Sylvie Lambelet/mh

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