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Massimo Furlan, le souvenir et le réel comme moteur théâtral

Portrait Massimo Furlan [DR - Pierre Nydegger]
L'invité: Massimo Furlan, "Les italiens" / Vertigo / 41 min. / le 23 janvier 2019
Le metteur en scène Massimo Furlan invite au Théâtre de Vidy-Lausanne des immigrés italiens sur scène, rejoints par des fils d'immigrés et deux danseuses. Ensemble ils partagent leurs souvenirs et leurs rêves. Trajectoire d'un inventif.

Dans "Les Italiens", immigrés et fils d'immigrés évoquent leur Italie natale qu'ils ont quittée il y a 50 ans et une Suisse moderne qu'ils ont contribué à bâtir. Ce nouveau projet de Massimo Furlan prend son origine dans une performance présentée au Théâtre de Vidy voilà deux ans, où le metteur en scène avait collaboré avec huit des retraités italiens qui chaque jour se retrouvent dans le foyer ou sur la terrasse du théâtre pour jouer aux cartes. Certains d'entre eux poursuivent aujourd'hui l'aventure scénique.

Travail de mémoire

"Les Italiens" prend ainsi encore racine dans les souvenirs. Ces souvenirs d'enfance qui sont souvent la matière première des créations en forme de performances de Furlan, enfant d'origine italienne né en Suisse en 1965. Un travail de mémoire, souvent à mi-chemin entre le théâtre et l'art contemporain, qui part de l'individuel pour toucher ensuite le collectif ou une génération. Comme en 2002 par exemple, quand le comédien rejouait à lui seul la finale de la Coupe du monde 1982 au stade de la Pontaise à Lausanne au rythme du commentaire de Jean-Jacques Tillmann. Comme en 2006 aussi où, toujours avec la même époustouflante inventivité, le fan de football revêtait sur la pelouse parisienne du Parc des Princes le maillot numéro 10 de Michel Platini pour revisiter l'anthologique et dramatique demi-finale du Mondial 1982 qui avait opposé la France à la RFA. Comme dans "1973" aussi quand il recrée les airs de la finale 73 de l'Eurovision de la chanson.

A partir de son pays d'origine, du foot et de son vécu, ce Furlan qui enfant se rêvait aussi super héros - surtout Superman - aime ainsi à créer des icônes et des mythes artistiques. Pas étonnant de retrouver plus tard celui qui est devenu scénographe en 1987 sprintant sur le tarmac de l'aéroport de Genève avec l'utopique idée de s'envoler en relisant avec humour et poésie le mythe d'Icare d'après ses réminiscences des dimanches en famille où il venait voir décoller les avions.

Burlesque et philosophique

Les propositions scéniques et visuelles de Massimo Furlan mêlent depuis ses débuts en 2000 au Théâtre de l'Arsenic à Lausanne burlesque et philosophie, poétique et esthétique populaire. Lui dit qu'il "cherche à ouvrir son imaginaire", inlassablement, au côté de sa compagne Claire de Ribeaupierre, anthropologue et docteure en Lettres qui coécrit ses spectacles qu'elle nourrit de ses recherches.

Inventer du théâtre à partir du réel ou inventer des paris impossibles reste son leitmotiv artistique après plus de trente ans de créations. Une mécanique qui séduit les scènes européennes qu'il réenchante souvent avec plein d'autodérision.

Olivier Horner

"Les Italiens", Théâtre de Vidy-Lausanne, du 24 janvier au 2 février 2019.

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