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Roli Mosimann, le Thurgovien qui a sculpté un nouveau son rock

Le producteur suisse Roli Mosimann. [DR - Magdalena Ucinska/Prix suisse de musique 2021]
Roli Mosimann, le Thurgovien qui a sculpté un nouveau son rock / Vertigo / 8 min. / le 17 septembre 2021
Le batteur et producteur Roli Mosimann compte parmi les lauréats du Prix suisse de musique 2021 qui sont remis officiellement ce vendredi soir à Lugano. L'Alémanique a produit ou remixé de nombreux groupes majeurs du rock comme Faith No More, The The ou The Young Gods.

Depuis l’avènement de l’électronique, la création musicale a changé de paradigme. La manipulation sonore permise par les nouvelles technologies a redéfini la notion d’artiste. Les producteurs sont devenus de véritables créateurs, développant un son original et contribuant même parfois à lancer de nouveaux courants musicaux.

Le grunge ne serait ainsi rien sans Butch Vig, producteur culte de Nirvana ou des Smashing Pumpkins. Il en est de même pour l’electro-pop avec Andrew Weatherall, créateur de morceaux cultes de New Order ou Primal Scream. Roli Mosimann compte parmi ces producteurs novateurs qui ont réellement remodelé le son du rock.

Batteur des Swans avant d'être producteur

Avant de devenir un sorcier des studios, Roli Mosimann a été musicien. Fan de rock radical, le Thurgovien a développé sa carrière à l’étranger, à New York principalement. Il s’y installe au début des années 1980 et rejoint les Swans, un des groupes majeurs de la scène noise et post-punk américaine. Mosimann contribue alors grandement au son radical du groupe new-yorkais de par son jeu de batterie puissant et lancinant.

Au fil des albums, le Suisse se familiarise toujours plus avec l’outil studio. Il participe à l’élaboration de l’univers sonore des Swans, à la fois lourd, brutal et hypnotique. "Quand j’ai rejoint les Swans, ce n’était qu’un groupe local parmi d’autres. En Suisse, j’avais déjà joué en tant que batteur de studio pour différents groupes. Mais avec ce nouveau projet, des nouvelles possibilités d’exploration du son s’ouvraient à moi. Et cela me passionnait, car notre musique était totalement différente de ce que l’on pouvait entendre alors. Et rétrospectivement, cela faisait vraiment sens de collaborer avec eux. Le son était brutal, agressif. Avec les années, le goût des gens a évolué. Mais à l’époque, les Swans clivaient. C’était une vraie aventure de faire partie du groupe", se souvient Roli Mosimann.

L'aventure sonore avec The Young Gods


Parallèlement, il commence à être demandé par des groupes et des artistes séduits par sa maîtrise des outils digitaux. Il produit le deuxième album du groupe The The, une formation majeure de la scène indépendante anglaise du milieu des eighties. Parallèlement, Roli Mosimann lance un projet musical explosif mêlant électronique et rock industriel. Le duo piloté avec le chanteur J. G. Thirlwell, alias Fœtus, s’intitule Wiseblood. Leur premier single, "Motorslug", sort en 1985. Cet hymne lancinant compte parmi les morceaux les plus marquants d’une scène électronique industrielle en pleine éclosion.

Suit une collaboration sur le long terme avec le trio romand The Young Gods: le musicien s’affirme toujours plus comme un producteur inspiré, participant à sculpter le son du groupe suisse, mélange de furie punk et de maîtrise des machines. Roli Mosimann préside à la réalisation des cinq premiers albums des Young Gods. Il est recruté aussi par des groupes comme Faith No More ou Marilyn Manson, séduits tant par l’approche brute et radicale du Thurgovien que par sa science dans la définition d’un son futuriste et plombé.

La considération internationale d'un producteur novateur

Roli Mosimann revient sur l’évolution de son métier: "A l’époque des Swans et de Wiseblood, on ne travaillait pas avec un producteur externe. Quand les gens ont entendu le son de nos albums et le premier album des Young Gods, on a commencé à me considérer comme un producteur. Je n’ai pas voulu le devenir, mais c’est venu naturellement. Des possibilités se sont offertes, j’ai pu travailler ensuite dans des grands studios, on me mettait à disposition des outils performants, qui me permettaient de réaliser le son que j’avais dans ma tête. Le studio est aussi intéressant à manier qu’un instrument. Au fil des années, les offres se succédaient et j’ai fini par privilégier mon activité de producteur".

En pleine explosion des musiques électroniques, Roli Mosimann devient un ingénieur et remixeur prisé. Il travaille pour des groupes aussi divers que New Order, Scissor Sisters et les Smashing Pumpkins.

A la fin des années 1990, Roli Mosimann se lance dans une nouvelle aventure en travaillant avec le batteur alémanique Jojo Mayer dans le groupe NERVE. Ils reprennent un club à New York qui devient d’une certaine manière leur instrument de musique. Roli Mosimann développe un son pour l’espace qui accueille des concerts mêlant drum & bass, électronique et jazz. "Pour nous, cet espace était l’instrument principal. Il fallait qu’il sonne, qu’il sonne bien. Et ce qui est incroyable dans la production d’un son live, c’est que lorsque tu pilotes le son, tes mains vont plus vite encore que ton cerveau. Parce que quand tu entends quelque chose, il faut que ta main réagisse immédiatement, autrement c’est trop tard. Le moment est passé".

Le coup d'arrêt des productions dû à la pandémie

Aujourd’hui, Roli Mosimann vit en Pologne, à Wroclaw. Il supervise notamment le mix live du festival Eklektik Session. Cela fait plusieurs années qu’il n’a pas travaillé en studio avec un groupe. La pandémie a bloqué une grande partie de ses activités. A cela s’ajoute le fait que désormais il est possible de produire un album sur un laptop, il suffit d’avoir le bon programme et l’intelligence pour le piloter.

Michel Masserey/olhor

L'interview de Roli Mosimann est à découvrir ce vendredi à 17h dans l'émission "Vertigo".

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Les Prix suisse de musique remis à Lugano

Quinze artistes se sont vus décerner en mai dernier le Prix suisse de musique par l'Office fédéral de la culture. Le Grand Prix 2021 est revenu au chanteur et compositeur bernois Stephan Eicher.

Les lauréats, parmi lesquels figurent notamment Roli Mosimann, Roland Moser, Jürg Frey, Louis Jucker, Yilian Cañizares et Lionel Friedli, sont distingués ce vendredi soir au centre culturel de Lugano en présence du conseiller fédéral Alain Berset. La cérémonie se tient au lendemain de la Journée de la musique suisse qui a eu lieu sur les antennes de la SSR.