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"Hammam", le répertoire rock moite des Romands Alice Roosevelt

Les musiciens d'Alice Roosevelt [Alice Roosevelt]
Pony Music - Alice Roosevelt vernissent leur album "Hammam" / Pony Express / 26 min. / le 28 novembre 2019
Après deux mini albums en 2016 et 2017, le groupe de rock vaudois Alice Roosevelt publie son premier véritable album, "Hammam", qui oscille entre mélancolies moites et tensions rythmiques.

"On avait envie de proposer aux gens 40 minutes de musique où ils se plongeraient dans notre univers", raconte à la RTS David, le guitariste d'Alice Roosevelt. Après deux mini albums exploratoires en 2016 et 2017, "Hammam" constitue aujourd'hui leur premier véritable album. Le répertoire oscille entre rock et électronique, mélancolies chaleureuses et tensions rythmiques. "On a mis deux ans à le composer parce qu'en 2018, on était encore en train de donner des concerts. Cela nous a permis de tester quelques morceaux en live et de voir s’ils nous plaisaient. En 2019, on a vraiment stoppé les concerts et on s’est concentrés sur la composition de "Hammam"", ajoute-t-il.

Un titre humide

Lorsqu'on leur demande comment est née l’idée du titre de leur disque, Alice Roosevelt répond en riant: "La chaleur, la moiteur, ça nous parlait! On jouait au Langenthal l’année passée, pour notre avant-dernier concert. Il y avait un hammam dans notre loge au centre-ville. C’était incroyable, et du coup on y a passé la soirée à boire des coups. La musique pour nous, cela sert à passer de bons moments et à rigoler."

Il faut dire que le groupe ne manque pas d’humour en nommant ses chansons "Lobster" (le homard) ou encore "Perlimpinpin". Cette dernière n'est cependant pas une référence exclusive à Emmanuel Macron: "Le titre est arrivé avec la composition du morceau. C’était la ligne de basse, je la chantais dans ma tête et cela donnait quelque chose comme "per-lin-pin-pin-pin…"", explique Cyril, le bassiste.

>>A regarder: le clip "Lobster" d'Alice Roosevelt

Malgré ce côté comique, la sélection des chansons devant figurer sur le disque était très sérieuse. Le groupe raconte: "Nous avons fait pas mal de tests; il y a beaucoup de morceaux qui sont passés à la poubelle. Il y a neuf titres sur l’album, mais nous avions 25 à 30 pistes au total. Nous avons beaucoup discuté et fait écouter les morceaux à nos familles, nos amis et des gens qui travaillent dans la musique. Cela nous a permis d'avoir un regard extérieur, parce qu'on avait peut-être un peu trop la tête dans le guidon", explique la formation originaire de Nyon.

Prendre le temps de faire de la musique, un luxe?

Dans le monde de la musique, deux ans d’absence, c’est beaucoup. "Je crois qu’on s’est juste dit qu'on allait prendre le temps", raconte Cyril. "Nous ne nous sommes pas demandés si les gens nous avaient oubliés. Si nous avions composé l’album uniquement entre les concerts, nous n'aurions pas eu assez de temps pour l’écrire. Nous n’y avons pas vraiment réfléchi, cela s’est fait naturellement."

En décidant de prendre le temps, Alice Roosevelt a pu façonner son album tranquillement de A à Z dans son local. Autrement dit, de l’écriture à l’enregistrement des chansons, tout est fait maison: "Nous avons chance d’avoir le matériel pour – on a investi au fil des années – et cela nous permet de prendre le temps et de s’amuser". "Nous ne sommes pas riches non plus, donc économiquement cela nous permet de garder le budget assez bas. Nous avons aussi un guitariste qui s’y connaît dans tout ce qui concerne l'enregistrement du son". Et d’ajouter: "Nous allons revenir au top avec ce disque, en donnant des concerts. Cela prendra forcément du temps, mais il n’y a pas 10'000 moyens d’y arriver quand on est un groupe romand."

La musique, c’est comme un classement ATP au tennis. Moins tu joues, plus tu perds des places. Tu dois jouer plus pour remonter dans le classement et redevenir visible!

Cyril Huguet, bassiste d'Alice Roosevelt

De la mélancolie dansante

Le spleen, Alice Roosevelt adore ça, et cela s’en ressent sur l’album. "Cela fait du bien d’extérioriser cela. On est comme dans un cocon avec un petit thé!". Patrick, le chanteur, ajoute: "Il y a toujours un côté positif dans les choses négatives. Je crois que notre musique est assez représentative de cela: certes, tu vas peut-être rentrer dans un univers un peu glauque et mélancolique, mais il y a cet aspect hyper positif qui va te faire taper du pied et qui finalement va te filer un énorme sourire. Le but c’est qu'en live, ça bouge et ça vive."

Le rock romand, toujours vivant

Cela fait maintenant quelques années qu'Alice Roosevelt évolue en Suisse romande. Que pensent-ils de la scène rock? "Ça repart un peu en ce moment. Il y a eu un creux, mais si tu regardes dix ans en arrière, en 2008, tout le monde était rockeur! Notre morceau "Leftovers" en parle justement: ces dernières années, c’est plutôt le rap qui est diffusé. J’ai l’impression que les jeunes sont beaucoup plus attirés par ce genre. Mais le rock revient, même si pour l’instant on n’a que les "Leftovers", les restes. La scène rock romande est très qualitative. Elle est juste un peu moins mise en avant."

Interview: Ellen Ichters/Yannick Neveu/Michael Marquet

Texte et adaptation web: Myriam Semaani

"Hammam" (Theodore Records/Irascible Music).

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