Le pianiste suisse Thierry Lang, le jazz entre un sourire et une larme

Thierry Lang a fait sienne cette magnifique image qui a toujours imprégné le monde musical de l'harmoniciste Toots Thielemans: "Ma musique est dans un territoire qui se situe entre un sourire et une larme".

La musique est donc pour lui un chant avant d'être un… champ de courses et son envie profonde est de raconter de belles histoires avec des comparses qui partagent cette philosophie de vie. Appelé au tout début de sa carrière par des pianistes au jeu pétri de swing comme Erroll Garner ou Oscar Peterson (qu'il ne reniera bien évidemment jamais), le penchant lyrique de Thierry l'a tranquillement amené à déguster les dessins harmoniques de pianistes comme Bill Evans ou John Taylor, avec lesquels il se sentait de grandes affinités d'esprit. Sans oublier que son Romont natal est aussi un pays de chansons, auquel il a d'ailleurs rendu hommage au travers de différents concerts et enregistrements au fil des années.

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Personnage d'une gentillesse absolue

En 1989 et 1990, sur l'instigation de son ami Daniel Thentz, Titi (alias Thierry) va se retrouver propulsé sur la scène de la Salle Davel de Cully avec ce géant incomparable qu'est Jean-Baptiste Frédéric Isidore Thielemans, rapidement surnommé "Toots" dans le monde du Jazz. Un monde que ce petit "ketje" du cœur de Bruxelles va intriguer, puis enthousiasmer et bouleverser au travers de décennies de productions toutes plus inimitables les unes que les autres. Il devient ami avec Charlie Parker puis avec Miles Davis dès la fin des années 40, lorsqu'il débarque tout "épouéré" à New York; il est engagé par Benny Goodman en 1950 pour une tournée mondiale qui s'arrête même à Lausanne.

Et tout en demeurant le même personnage d'une gentillesse absolue, il voit sa carrière grimper à une altitude folle de lustre en lustre, entre Hollywood et le Brésil, entre Quincy Jones et Elis Regina, entre clubs et concerts "philharmoniques", à coup d'enregistrements qui démontrent que Monsieur Toots est tout simplement un des plus grands musiciens de l'Histoire.

Parce que tout en comprenant l'harmonie d'une manière intuitive et absolue, quelle que soit la complexité du matériel thématique proposé, Toots invente des chemins mélodiques qui chantent et qui nous parlent à l'âme. D'ailleurs, un jour, sur la scène du Festival de Jazz de Montreux, Quincy s'était mis à genoux devant Toots, après un solo particulièrement magique et inspiré, et lui avait dit, les larmes aux yeux: "Mon Château Petrus!".

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Deux univers qui se rencontrent

La rencontre des deux univers de Titi et Toots ne pouvait ainsi qu'être réussie et productive, et les meilleurs moments des deux concerts donnés en 1989 et 1990 voient donc désormais le jour dans le volume 44 de la collection Swiss Radio Days! On y entend de la musique à fleur de peau et de notes, caressées dans le beau sens par un trio en état de grâce: Thierry Lang, Ivor Malherbe et Marcel Papaux, avec leur invité rêvé, le Baron Thielemans, lui qui avait été anobli par le Roi Albert dans le cadre d'une cérémonie qu'il contait avec autant de malice que d'émotion…

Et puisque Quincy Jones lui-même situe Toots Thielemans comme "un génie qu'il place aux côtés de Charlie Parker", on peut affirmer aujourd'hui que, à l'instar du graffiti qui avait fleuri sur les murs de New York en mars 1955 à la mort de Bird, "Toots Lives"!

Yvan Ischer/ld

A l'occasion des 25 ans de la collection Swiss Radio Days en collaboration avec la marque de disques TCB et de la parution de l'album "Toots Thielemans presents The Thierry Lang Trio Cully 1989 & 1990".