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Entre rires et quelques larmes, l'auteur Max Lobe nous entraîne au Cameroun

Max Lobe [editionszoe.ch - Romain Guélat]
Max Lobe: "Loin de Douala" / Versus-lire / 39 min. / le 1 mars 2018
L’écrivain d’origine camerounaise Max Lobe emmène ses lecteurs "Loin de Douala", un ouvrage qui raconte avec gouaille la beauté et l’humanité d’un pays menacé dans son extrême nord par la pauvreté et le terrorisme.

Il faut monter à bord de l’autocar qui relie Douala à Yaoundé, le voyage en vaut la peine. Bien sûr, il n’est pas tout simple, le véhicule est bondé, la chaleur étouffante, les fenêtres sont condamnées, les routes truffées de nids de poule, les altercations fréquentes et les vendeurs à la sauvette assaillent les occupants à chaque arrêt: "Bitter Kola? Bitter Kola madame, contre le mal de ventre?" Si cela ne vous dit rien, il y a toujours la noix de coco cassé ou les chenilles grillées, excellent pour les petites faims.

Suivre Max Lobe dans ce périple, c’est la garantie de passer un moment riche en couleurs, en images et en sensualité. Riche en mots aussi, car l’oralité est la marque de fabrique de l’auteur qui ne renie pas, bien au contraire, ses origines même s’il vit dans notre pays depuis plus d’une dizaine d’années et qu'il a acquis, tout récemment, la nationalité suisse.

C’est le ventre qui écrit

Cette traversée, humaine et géographique, Max Lobe l’a vécue en 2015. Pour s’imprégner du pays où il est né et où il a grandi, pour être au plus près des Camerounais, sentir leur peau, boire leurs paroles, avaler leurs rires.

On rit beaucoup dans les récits de Max, même si l’émotion n’est jamais très loin. "Il est difficile pour moi d’écrire sur quelque chose que je n’ai pas vécu. J’ai besoin de ressentir les choses, de les vivre, c’est le ventre qui écrit", confie l’auteur à la RTS.

Tout le monde était là, même les femmes que ma mère qualifiait matin-midi-soir de sorcières jalouses de son mariage. Les plus jeunes d’entre elles, les panthères, étaient très peu vêtues. Mâ Bomono s’en était étonnée: "C’est quelle façon de s’habiller comme ça, eh? On dirait que le tissu est fini au marché!"

Max Lobe dans "Loin de Douala" aux Editions Zoé

Ecrire à partir de ce que l’on est, écrire aussi pour dire des identités combinées, Max Lobe le fait depuis toujours et en particulier dans "Confidences" (2014) où il raconte avec humour ce jeu de miroir qui fait de lui un blanc en Afrique et un noir en Suisse.

Partir et faire boza

"Loin de Douala" se passe exclusivement au Cameroun. Au fil des pages, pas l’ombre d’un Européen. C’est son Afrique, son pays, ses racines que Max Lobe veut nous faire connaître et pour cela il a choisi de raconter les petites choses de la vie de famille. Mais comme tout le monde le sait, la famille c’est compliqué et cela peut mener très loin. Jusqu'à l’extrême nord du pays, si beau et si dangereux, car là-bas, Boko Haram tente d’imposer sa loi.

Roger, le frère du narrateur, a un rêve: devenir, à l’image de Roger Milla, une star du football. Alors il fait boza, entendez il fuit la maison familiale pour se jeter sur la route et tenter clandestinement de gagner l’Europe via le Nigéria. Jean, le cadet intello et religieux se lance à sa poursuite, entraîné par un frère-ami de la famille, le jeune et joli Simon. D’où l’aventure, belle et risquée, qui se révèle initiatique.

Anik Schuin/jd

"Loin de Douala" de Max Lobe (Editions Zoé).

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