Depuis des années, les deux rentrées littéraires – automne/printemps – ou les Salons du Livre sont perçus comme des vagues déferlantes de nouveautés, de promotions éditoriales, de littérature-spectacle où écrivains, libraires, lecteurs et critiques se noient.
Les écrivains doivent désormais assumer un nouveau rôle: promoteurs de leur livre sur une scène médiatique déjà formatée sans eux.
Par Gérald Hiestand et Christian Ciocca.
Dans son dernier roman "L'Infini livre", la Valaisanne Noëlle Revaz a mis en scène les avatars de la commercialisation du livre et la disparition de l'auteur en s'interrogeant sur ce signifie écrire un livre.
D'autres comme Michel Houellebecq ont même imaginé leur assassinat par des lecteurs en furie, ou Jean-Pierre Rochat ironisé sur son rôle d'écrivain-paysan en recevant en 2012 le Prix Michel-Dentan.
La littérature est faite de faux-semblant, de "mentir-vrai" comme l'écrivait Aragon. "Je suis un mensonge qui dit toujours la vérité" affirmait pour sa part Cocteau. Dès lors, comment s'étonner que Romain Gary ait pareillement trompé son monde en remportant pour la deuxième fois un Prix Goncourt sous le pseudonyme d'Emile Ajar en 1975?
Dans la "carnavalisation" de la littérature, selon l'analyse de l'écrivain et professeur de littérature Jérôme Meizoz, l'auteur s'est malgré lui "histrionnisé" sur une scène médiatique dont il ne contrôle pas la mise en place.
Ce phénomène était déjà dénoncé par Théophile Gautier en 1836 lors de la Bataille d'Hernani et Claude Frochaux ajoute que notre époque ne convient plus, par son agitation, à la lecture.
Pour l'écrivain et essayiste romand Etienne Barilier, l'effervescence de chaque rentrée littéraire s'apparente à un oxymore: on promeut à grand battage publicitaire un auteur et accessoirement son livre alors que la lecture est en soi un moment de grande intimité entre le texte et son lecteur.
Depuis le premier Salon du Livre et de la Presse à Palexpo-Genève en mai 1987 au dernier Le Livre sur les Quais à Morges, début septembre, les manifestations livresques accroissent le phénomène spectaculaire d'une littérature en pleine métamorphose commerciale.
![La rentrée littéraire de l'automne 2017. [Fotolia - adam121]](https://img.rts.ch/articles/2017/image/8jsqve-27775139.image?w=1920&h=383)
![Jean-Pierre Rochat, fermier et auteur, dans sa ferme de La Bergerie en 2017. [Keystone - Gaëtan Bally]](https://img.rts.ch/articles/2017/image/lmtlvp-26008939.image?w=960&h=384)
![Romain Gary (1914-1980), écrivain français. Paris, 2 mai 1974. [AFP / Jean-Régis Roustan / Roger-Viollet]](https://img.rts.ch/audio/2015/image/b8xwrt-25974385.image?w=960&h=384)
![Jérôme Meizoz [editionszoe.ch - Yvonne Boehler]](https://img.rts.ch/medias/2018/image/cayulu-25998715.image?w=960&h=384)
![Portrait de l'écrivain et essayiste romand Etienne Barilier en 1998. [Keystone - Gilbert Vogt]](https://img.rts.ch/articles/2017/image/quzshy-25984503.image?w=960&h=384)
![La première édition du Salon du Livre de Genève en 1987. [Keystone - STR]](https://img.rts.ch/articles/2017/image/7tw3mn-26008281.image?w=960&h=384)