"1803, la nuit de la sage-femme", roman historique signé Anne Villemin-Sicherman
Lundi 8 brumaire de l’an XII de la République. Au cimetière de la ville française de Metz, on retrouve un homme enterré vivant qui, gravement affecté, a tout juste le temps de souffler qu’on l’a assassiné avant de mourir pour de bon. Ce tragique fait divers intéresse grandement Victoire Montfort, sage-femme fraîchement formée aux techniques modernes d’accouchement, qui y voit l’occasion d’étudier de plus près les signes physiologiques de la mort auxquels elle est confrontée dans son métier.
En tandem avec son mari Albert, commissaire de police, Victoire est propulsée contre son gré dans une enquête qui prend des dimensions politiques alors que la France traverse sa période post-révolutionnaire et que se démarquent de grands esprits comme la baronne Germaine de Staël ou Benjamin Constant. Et que se dessine en parallèle l’autoritarisme croissant du Premier consul Napoléon Bonaparte qui s’est donné pour mission de faire oublier La Terreur, d’étouffer les complots royalistes et de réintroduire la liberté de culte.
Un nouveau personnage principal
Dans cette nouvelle enquête, Anne Villemin-Sicherman, habituée des romans historiques, délaisse après huit ouvrages son enquêteur-vétérinaire Augustin Duroch pour laisser les rênes à un nouveau personnage, celui de Victoire Montfort.
J’ai choisi une sage-femme parce qu’elle va partout. Elle nous introduit dans tous les milieux de la société d’alors: femmes du peuple ou aristocrates. Cela me permet de dresser un portrait de la société à travers ses yeux.
Moderne, émancipée, divorcée et pragmatique, Victoire est mariée à Albert Montfort, commissaire de police à Metz, chargé d’enquêter sur cette affaire de défunt ressuscité que, déjà, certaines voix sont prêtes à qualifier de signe divin. Si le couple est purement fictif, il en est autrement pour d’autres protagonistes de cette trame, parmi lesquels le préfet de la Moselle Jean-Victor Colchen, ou encore Rémy Ibrelisle et Etienne-Pierre Morlanne, tous deux chirurgiens et accoucheurs célèbres de ce début de XIXe siècle.
>> A écouter, un entretien avec Anne Villemin-Sicherman autour de son roman "1803, la nuit de la sage-femme"
Germaine de Staël à Metz
Au fil des pages, mystère, politique et médecine laissent une place égale au débat d’idées à travers l’autre personnage principal du roman d’Anne Villemin-Sicherman: la baronne Germaine de Staël. Fille de Necker, ministre des finances de Louis XVI, cette figure genevoise et calviniste est notamment l’autrice de "Delphine", ouvrage à succès qui fait l’apologie du divorce; chose qui déplaît tant à Bonaparte qu’il exile la baronne hors de Paris.
C’est ainsi que Germaine de Staël se retrouve pour quelques jours à Metz, en compagnie de Benjamin Constant et de l’homme de lettres Charles de Villers dont elle est amoureuse. "Elle a réellement séjourné pendant douze jours dans un hôtel à Metz, où elle avait donné rendez-vous à Charles de Villers pour tenter de parvenir à ses fins", précise Anne Villemin-Sicherman.
Aujourd’hui, le souvenir de ce séjour historique prend la forme d’une plaque posée sur la façade de l’hôtel en question, qui est aussi l’un des lieux centraux de la trame de cette "Nuit de la sage-femme" dont le témoin muet est la ville de Metz. Une cité à propos de laquelle le célèbre architecte Vauban disait que "si les autres places fortes défendent la Province, Metz, elle, défend l’Etat".
Cette affirmation se vérifiera lorsque les armées coalisées portugaise, espagnole et anglaise, tenteront d’envahir la France dix ans plus tard. Le décor idéal pour une future enquête de Victoire Montfort? Pourquoi pas, puisqu’Anne Villemin-Sicherman a déjà terminé le prochain volet des aventures de sa sage-femme, posée cette fois en 1812, à l’aube du départ de Napoléon pour le front russe.
Ellen Ichters/aq
Anne Villemin-Sicherman, "1803, la nuit de la sage-femme", ed. 10/18
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