Au cœur de l’hiver, six silhouettes, deux chiens, une femme et trois hommes s’engagent dans la Vallée des Glaces. Leur destination: le Reculoir, là où le père Salomon, plongé dans l’obscurité suite à une avalanche, les attend pour lui venir en aide. Le temps est hostile, la route longue, difficile, et comme si cela ne suffisait pas, l'un des protagonistes a un autre plan derrière la tête.
Gaspard, seul alpiniste de la cordée, s’apprête à tenter, pour la septième fois, la Grande, montagne dont le sommet n’a encore jamais été atteint. Et pour cause, on ne lui connaît pas de limite. 9000, 14'000 mètres ou au-delà, aucune technique ni science humaine n’est parvenue à percer sa hauteur, qui reste un mystère et une quête.
Roche et gel en guise de ciel: voici la Montagne sans sommet, voici le Bord vertical du monde.
Une montagne initiatique
Pour y parvenir, Gaspard veut entraîner Solal avec lui. Pour le jeune Solal, surnommé le Gamin, aspirant à croquer la vie à pleines dents, cette aventure sonne comme une opportunité et prend la forme d’une initiation.
Simon Parcot déroule dans son récit une galerie de personnages qui tous ont un rapport très singulier et personnel à la montagne. En auscultant les relations que les personnages tissent entre eux et surtout avec ce milieu, l’auteur raconte comment la montagne fait et défait les humains.
Le décor hivernal qui se noie dans les flocons de neige et recouvre tout de glace et de blanc donne une impression d’atemporalité et favorise une mise à nu des corps et des âmes.
Un roman à l'accent poético-philosophique
Davantage qu’un terrain de jeu, la montagne confronte celles et ceux qui vont à elle. Elle éprouve leur limite, questionne le sens qu’ils donnent à leur existence, la place qu’ils octroient à l’amour et rappelle que la puissance de la vie tient aussi dans sa fragilité et sa brièveté, dans sa constante oscillation avec la mort.
Des thématiques qui donnent à ce roman aux accents poétiques des allures de conte philosophique.
Le sommet de la Grande ne pouvait se révéler que suite à une "conversion du regard": ce n’était plus sur la matière que l’esprit devait concentrer son attention, c’était sur lui-même! Il fallait tourner son regard vers l’intérieur et découvrir en soi les obstacles intimes dont les difficultés du terrain ne sont que les représentations physiques.
Une ascension infinie, celle que représente aussi le travail de l’écrivain. Pour le romancier philosophe, trouver les mots qui diront ce qui ne se laisse pas facilement saisir et exprimer est à l’image d’une montagne dont on ne cesserait de faire le tour sans jamais en atteindre le sommet.
Céline O’Clin/ls
Simon Parcot, "Le bord du monde est vertical", ed. Le mot et le reste.
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