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Frederik Peeters s'invente un double pour mieux se raconter

Frederik Peeters. [Keystone - Magali Girardin]
L'invité : Frederick Peeters, "Oleg" / Vertigo / 24 min. / le 13 janvier 2021
Le Genevois Frederik Peeters publie "Oleg", son nouveau roman graphique et autobiographique qui met en scène le quotidien d'un dessinateur de bande dessinée se révélant ermite assumé mais observateur attentif.

Vingt ans après "Pilules bleues" qui avait reçu le Prix Töpffer et dont l'histoire d'amour sur fond de séropositivité avait été traduite en plusieurs langues, Frederik Peeters revient à la forme autobiographique de son best-seller. En 184 pages en noir et blanc, "Oleg" raconte le quotidien d'un dessinateur de bande dessinée, double de l'auteur genevois.

Un avatar qui lui permet de lever le voile sur son métier et de pointer les contradictions qui hantent notre époque: ultra-modernité technologique et pensée réactionnaire, culte de la superficialité et quête d’authenticité, surabondance et désarroi. D'autant qu'Oleg est un ermite assumé, coupé du monde et déconnecté, qui vit plutôt replié sur son petit monde à lui, composé de la femme dont il partage la vie depuis deux décennies, et leur fille, en pleine adolescence, avec qui il partage vieux films et secrets de lycée.

Mise en abîme pleine de dérision

" 'Oleg'est une tentative de retour à l'autobiographie et qui prend en compte le fait que nous sommes tous des êtres de fiction, explique d'ailleurs Frederik Peeters à la RTS. (...) C'est l'histoire d'un personnage écrasé par le chaos du réel et qui rêve en cases".

Cette mise en abîme met ainsi en scène ces moments de doute où la création semble patiner malgré l'abondance de projets, comme si "l'influx était perdu". Alors Oleg creuse, cherche et réfléchit via le dessin qui met sa pensée en route. Et se fait violence pour sortir parfois de sa tanière afin de se confronter à son époque et aux autres.

Entre humour, amour, maladie, ennui et surprise, réalité et fiction, Frederik Peeters chronique avec justesse mais en brouillant les pistes son existence pleine à ras bord de questionnements et d'adversité. En déroulant son récit à la troisième personne, le Genevois parvient à "donner une forme de distance ironique qui fonctionne mieux".

Interview: Pierre Philippe Cadert et Julie Evard

Adaptation web: Olivier Horner

"Oleg", de Frederik Peeters, éditions Atrabile.

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