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"Travaille bien à l'école, sinon regarde comment tu vas finir"

La couverture du livre "Des ordures et des hommes" de Mireille Dumas. [Editions Buchet Chastel]
Mireille Dumas, Denis Demonpion "Des ordures et des hommes", Bûchet-Chastel / Vertigo / 6 min. / le 16 avril 2020
Mireille Dumas vient de publier "Des ordures et des hommes", coécrit avec Denis Demonpion. Un livre qui donne visage et parole aux éboueurs, si souvent méprisés, et à leur indispensable travail. Surtout en cette période de pandémie.

Ce n'est pas le métier dont rêvent les enfants mais ils l'ont choisi. Les uns pour la sécurité de l'emploi, les autres par reconversion professionnelle, d'autres encore parce qu'ils ne pouvaient pas faire autrement. Pourtant, ces hommes et ces femmes qui oeuvrent dans l'ombre pour notre bien commun, qui effacent les traces de nos excès, qui nettoient nos incivilités, ont rarement la parole. "Des ordures et des hommes", livre coécrit par Mireille Dumas et Denis Demonpion, la leur donne, ainsi qu'un visage et un prénom.

Des acteurs essentiels de la société

Leurs témoignages sont non seulement émouvants, ils sont aussi salutaires pour comprendre comment fonctionnent nos sociétés. Tous relèvent un certain mépris à leur endroit. Jean-Paul se souvient par exemple de la remarque d'une mère à son fils: "Travaille bien à l'école, sinon regarde comment tu vas finir!". Pourtant, s'ils n'existaient pas, nos villes seraient de vrais dépotoirs. Rien qu'à Paris, c'est trois mille tonnes de déchets collectées par jour. "Sans eux, la crise sanitaire que nous traversons en ce moment serait doublée, voire triplée", explique Mireille Dumas au micro de la RTS.

Un documentaire d'abord, un livre ensuite

Au départ, cet hommage était un documentaire consacré à la Fonctionnelle, unité de choc parisienne unique au monde, qui s'emploie à la remise en état des parcours des manifestations, au nettoyage des rues après la Fête de la Musique, au décapage des graffitis sur le périphérique la nuit. D'autres missions plus délicates leur sont attribuées comme l’entretien ou la destruction des campements de migrants ou de SDF après évacuation par les forces de l’ordre ou la remise sur pied de quartiers après les attentats. Ils sont en prise directe avec la misère du monde.

Une certaine fierté

Sous-titré "Pour eux, nous sommes anonymes. Pour nous, ils sont invisibles", le livre met l'accent sur la trajectoire de chacun de ces nettoyeurs. "Cette plongée dans le quotidien des éboueurs m'a aidée à prendre le pouls de la société. Cette corporation est le miroir de notre rapport au monde", dit encore la journaliste.

Avec la pandémie liée au Covid-19, leur métier a été un peu revalorisé. D'autant que ces hommes et ces femmes de l'ombre y sont vraiment exposés. On les remercie désormais de leur travail qu'on salue comme indispensable. Ils commencent à exister en tant que personne. "Sans masque au début, ils ont accompli leur tâches sans faiblir. Je suis restée en contact avec certains d'entre eux qui me disent qu'ils éprouvent une certaine fierté à travailler pendant cette période" se réjouit Mireille Dumas.

Sujet radio: Linn Levy

Adaptation web: Marie-Claude Martin

Mireille Dumas, Denis Demonpion, "Des ordures et des hommes", éditions Buchet Chastel, mars 2020

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