"Jurassic Park", décryptage d'une saga révolutionnaire

Grand Format

Reuters - Mario Anzuoni

Introduction

Alors que le cinquième opus de la série "Jurassic Park" débarque au cinéma, décryptage de la saga dont le premier épisode a révolutionné le monde du cinéma il y a 25 ans.

Chapitre 1
Les origines

Il y a 25 ans sortait "Jurassic Park", le film qui allait changer le monde des effets spéciaux et rendre possible les histoires les plus fantastiques au cinéma.

L'histoire commence en 1990 lorsque l’écrivain Michael Crichton sort "Jurassic Park", un roman d’aventure et de science-fiction qui emmène le lecteur au Costa Rica où une équipe scientifique réussit à recréer des dinosaures à partir d’ADN fossile (ce qui est absolument impossible en réalité). Mise en garde contre les manipulations génétiques, maltraitance des animaux et contrôle de la nature, le livre relance plus que jamais l’intérêt du public pour les dinosaures.

Steven Spielberg qui avait produit en 1988 "Le petit dinosaure et la vallée des merveilles" s'intéresse bien évidemment à cette histoire et comme Crichton travaille déjà avec lui sur ce qui deviendra la série "Urgence", Universal achète les droits pour 2 millions de dollars. L’écrivain devient alors co-scénariste de l'adaptation de son propre livre.

Deux ans plus tard, le 11 juin 1993, "Jurassic Park" débarque dans les salles américaines et devient le premier film à amasser plus de 900 millions de dollars. Il reçoit les Oscars du meilleur son, meilleur montage sonore et meilleurs effets visuels.

L'affiche du film "Jurassic Park". [AFP - Archives du 7eme Art / Photo12]
[AFP - Archives du 7eme Art / Photo12]

Les effets spéciaux

Au début des années 90, les pionniers de l’image de synthèse travaillent dur. La colonne d’eau dans "Abyss", les flammes de "Backdraft", le robot T1000 dans "Terminator 2" montrent la voie mais ce n’est pas encore ça.

Steven Spielberg n'y croit pas. Il veut faire beaucoup plus fort. Pour son film, il ne veut pas juste rendre ses dinosaures crédibles, il veut les rendre vivants. Il s’entoure donc de spécialistes en tout genre: le paléontologue Jack Horner, Stan Winston pour les animatroniques, des marionnettes robotisées et Phil Tippett pour le "stop motion", une technique qui permet de réaliser 24 clichés par seconde en faisant bouger à chaque fois très sensiblement la marionnette.

Steven Spielberg.
Steven Spielberg.

L’équipe fait d’abord une tentative en "stop motion", mais Spielberg ne trouve pas ça assez satisfaisant. En même temps, les animateurs Mark Dippé et Steve William créent un cycle de marche pour le squelette du tyrannosaure par ordinateur. Spielberg les encourage à en faire plus et quand il découvre l’animation d'un T-rex chassant un troupeau de Gallimimus, il est conquis.

Mais le réalisateur ne met pas de côté les maquettes et les robots pour autant. Bien au contraire. Si les plans larges des dinosaures sont presque tous réalisés en images de synthèse, les plans serrés des bestiaux sont créés en animatroniques.

Au final, les dinosaures apparaissent dans le film 15 minutes, dont 9 minutes réalisées avec des effets spéciaux traditionnels. En mêlant créatures animatroniques et dinosaures de synthèse, le réalisateur a évité l'écueil du 100% virtuel. Et c'est ce mélange subtil qui permettra désormais à d'autres cinéastes de réaliser le fruit de leur imagination. Stanley Kubrick contactera Spielberg pour "A.I", George Lucas commencera à réaliser les préquelles de "Star Wars" et Peter Jackson s’intéressera au "Seigneur des Anneaux" et à "King Kong".

Une scène du film "Jurassic Park" sorti en 1993. [AFP]
Une scène du film "Jurassic Park" sorti en 1993. [AFP]

Chapitre 2
"Jurassic World: Fallen Kingdom", une belle réussite

Universal Pictures

Suite au succès de ce premier film, Spielberg produit "Le Monde perdu" en 1997, "Jurassic Park 3" en 2001, le premier volet de "Jurassic World" en 2015, et finalement en juin 2018 "Jurassic World: Fallen Kingdom".

Dans le nouvel opus, on retrouve le Costa Rica et son île, Isla Nublar, abandonnée par les humains mais pas par les personnages principaux du film qui tentent cette fois de sauver les derniers dinosaures alors que le volcan de l'île commence à rugir. Un épisode qui n’est pas sans rappeler l’extinction des dinosaures à la fin du Crétacé, il y a 66 millions d’années.

Le premier volet de "Jurassic World" en 2015 n'était pas parvenu à retrouver la magie des premiers épisodes de la série. Trop "fan service", des effets spéciaux qui manquaient de folie et de crédibilité. Et au final, un film qui a moins bien vieilli en quelques années que "Jurassic Park" en 25 ans.

La réalisation de ce nouvel opus, toujours produit par Spielberg est confié au réalisateur Juan Antonio Bayona à qui l'on doit "L'orphelinat", "The Impossible" ou encore "A Monster Calls". Un réalisateur aux mises en scène sombres et réalistes qui produit des films pleins de tension et d’émotion. Des qualités qui manquaient à "Jurassic World" mais qui sont bien présentes dans "Fallen Kingdom".

Alors non, l’histoire ne va toujours pas chercher très loin, et les personnages ne sont pas toujours en adéquation avec le ton du film, mais en termes d’action et de visuel, c’est une belle réussite.

"Jurassic World: Fallen Kingdom" combine magie et noirceur, peur et émerveillement, ce qui donne un film beaucoup plus effrayant que le premier "Jurassic World". Tout est visuel et d’un réalisme assez bluffant avec des plans qui ressemblent à des toiles de peinture gothique. Et c'est grâce à cette noirceur que le film est plus crédible. Le réalisateur, comme Spielberg ou Hitchcock avant lui, joue aussi beaucoup sur les ombres, une technique qui permet de ne pas tout montrer pour attiser encore plus la peur.

L'actrice Isabella Sermon dans une scène de "Jurassic World: Fallen Kingdom". [Universal Pictures / AP /Keystone]
[Universal Pictures / AP /Keystone]
Une des affiches du film "Jurassic World: Fallen Kingdom". [Universal Pictures]
Une des affiches du film "Jurassic World: Fallen Kingdom". [Universal Pictures]

Dans cet opus, il y a certes beaucoup d'effets spéciaux numériques, mais des décors et des animatroniques ont été utilisés dès que c'était possible. Le film a été écrit dans ce sens, avec des plans très serrés pour favoriser les marionnettes.

Neal Scanlan et son équipe ont réalisé un travail formidable avec les dinosaures faits main et à taille réelle. Il a fallu jusqu'à douze marionnettistes par créature. Des effets numériques ont été ajoutés pour le mouvement des lèvres ou des yeux.

Pour concevoir l’éruption volcanique qui a lieu dans ce nouvel épisode, l'équipe technique a consulté des volcanologues pour pouvoir créer les effets pyrotechniques les plus crédibles qui soient. Chaque phase est réelle et basée sur des données scientifiques.

Chapitre 3
"Jurassic World 2": mieux que "Jurassic Park"?

Universal Pictures /AP/Keystone

Avec "Jurassic World Fallen Kingdom", Bayona a réussi là où Trevorrow s’était planté avec le premier volet de "Jurassic World". Il a su garder le style de l’ancien tout en proposant quelque chose de nouveau. Il a apporté une touche européenne, de la noirceur et du réalisme.

Les points négatifs de "Jurassic World 2"? Une histoire un peu simpliste, des personnages pas très en adéquation avec le style du film, des scènes d’action parfois trop rapides et surtout des opérations de promotion interminables.

Les points positifs: la mise en scène de Bayona, la lumière, l’équilibre entre le fait main et le numérique.

Mais au final, c'est très certainement le "Jurassic Park" de 1993 qui restera dans les mémoires car il a révolutionné quelque chose, il a changé la façon de faire des effets spéciaux et il restera un de ces films "hors compétition".

>> A voir: la séance "Shinema" de "Tataki" consacrée à "Jurassic World II" :

Jurassic World II : mieux que Jurassic Park ?
Shinema - Publié le 17 juin 2018