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Avec "Arthur, malédiction", Luc Besson lance un sort au cinéma

Une scène du film "Arthur: Malédiction" de Barthélémy Grossmann. [LBP]
Le mercredi, cʹest cinéma! / Vertigo / 11 min. / le 29 juin 2022
Cousue sur mesure pour les fans de la trilogie "Arthur et les Minimoys", sortie entre 2006 et 2010, cette variation opportuniste s’écarte du film familial pour fouler sans grand talent les plates-bandes du slasher horrifique. Même pas peur!

Une bande de gosses se pâme devant ses films préférés: la trilogie "Arthur et les Minimoys" de Luc Besson, qui emmène le petit Arthur dans un monde miniature peuplé de créatures de deux millimètres que menacent le diabolique Maltazard.

Dix ans plus tard, les enfants sont devenus grands et se retrouvent pour fêter les 18 ans d’Alex. Ses copains lui annoncent un cadeau-surprise: ils ont retrouvé la maison où a été tourné "Arthur et les Minimoys". Le groupe part pour un week-end sur place sans se douter qu’une présence assassine rôde aux alentours.

Le fond de la piscine

Mis en image par le réalisateur vaudois Barthélémy Grossmann ("13m2", la série "No Limit"), cet "Arthur, Malédiction" porte bien son titre. Un concept maudit, faussement malin, qui insulte autant les adeptes de cinéma d’horreur que les fans d’"Arthur et les Minimoys". Les premiers devront subir les pires clichés du genre, un premier degré inouï, des effets de mise en scène d’un autre âge, des scènes de frousse qui provoquent l’hilarité. Les seconds ne verront qu’une exploitation opportuniste de la trilogie de leur enfance, si tant est qu’"Arthur" soit un étalon dans l’imaginaire des anciens enfants devenus jeunes adultes, ce qui ne semble relever du fait établi que dans le fantasme vrillé de Luc Besson.

Il faut dire que pour son grand retour au cinéma après son dernier film, "Anna", sorti en 2019, l’ancien nabab du cinéma français a touché le fond de la piscine. En cinq ans, le cinéaste, producteur et scénariste a connu le bide planétaire de son "Valérian", le rachat de sa société de production, EuropaCorp, par un groupe américain et une plainte pour viol qui a abouti à une ordonnance de non-lieu.

En finançant et écrivant cet "Arthur, malédiction", Besson s’enlise dans les méandres d’un cinéma qui ressemble à un brouillon mal rédigé, un objet tourné à la hâte, par-dessus l’épaule, porté par un groupe de jeunes comédiens (dont la propre fille de Luc, Thalia Besson) qui passe son temps à commenter les situations au lieu d’agir véritablement. A ce stade, on a vite l’impression de regarder un film amateur entre potes plutôt qu’une production digne de ce nom.

"Les films, ça peut causer des dégâts"

Au bout de deux heures sidérantes de nullité, lorsque le spectateur le plus courageux ou masochiste comprend enfin le fin mot de l’histoire, un policier profère une morale qui pourrait tout aussi bien s’appliquer au métrage lui-même: "Les films, ça peut causer des dégâts".

A ce stade, on ne sait plus s’il faut considérer la phrase comme un mea culpa subconscient de la part du producteur de "Taxi", "Taken" et "Le transporteur" ou si l’on doit deviner une manière de s’excuser des dommages collatéraux causés par cet "Arthur, malédiction" au cinéma d’horreur, au jeu d’acteur, à la mise en scène, au scénario, et, in fine, au public.

Rafael Wolf/aq

"Arthur, malédiction", de Barthélémy Grossmann, avec Mathieu Berger, Thalia Besson, Mikaël Halimi, Lola Andreoni, Yann Mendy. A voir actuellement dans les salles romandes.

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