Publié

Au Brésil, la Cour suprême donne raison à Netflix face à la censure

Cette "autre création de Dieu" a suscité l'indignation d'une partie des Brésiliens. [Netflix]
La justice brésilienne empêche la censure d’une série Netflix campant un Jésus gay / Le 12h30 / 1 min. / le 13 janvier 2020
La Cour suprême brésilienne a donné raison jeudi à Netflix. Elle a annulé une décision judiciaire ordonnant à la plateforme de vidéos en ligne de retirer de son offre une fiction dans laquelle Jésus semble entretenir une relation homosexuelle.

La Cour suprême a estimé que cette fiction controversée, "La Première Tentation du Christ", "ne faisait pas fi de la nécessité du respect de la foi chrétienne (ni des autres croyances religieuses ou de l'absence de celles-ci)".

"On ne peut pas supposer qu'une satire humoristique ait la capacité d'affaiblir les valeurs de la foi chrétienne, dont l'existence remonte à plus de 2000 ans, et qui est intériorisée dans la croyance de la majorité des citoyens brésiliens", a encore justifié la Cour.

Netflix avait annoncé jeudi avoir saisi la Cour suprême. "Nous soutenons fortement l'expression artistique et nous allons lutter pour défendre ce principe important", avait annoncé le géant américain des vidéos en ligne dans un communiqué.

"Calmer les esprits"

Mercredi, un juge de Rio de Janeiro avait ordonné à Netflix de retirer de son offre "La Première Tentation du Christ", fiction du collectif d'humoristes brésiliens Porta dos Fundos vertement critiquée par des associations catholiques et évangéliques.

Le magistrat avait annoncé avoir pris cette décision afin de "calmer les esprits" au sein de "la communauté chrétienne et la société brésilienne".

Netflix avait mis en ligne cette vidéo le 3 décembre. "La Première Tentation du Christ" raconte sur le ton de la comédie loufoque une soirée familiale surprise au cours de laquelle Jésus arrive en compagnie d'un autre homme, visiblement homosexuel.

ats/afp/olhor

Publié

La figure de Jésus cristallise les passions

Ce n'est pas la première fois que la figure de Jésus cristallise les passions, comme l'explique Alain Boillat, professeur en histoire et esthétique du cinéma à l'Université de Lausanne: "C’était le cas avec le film de Mel Gibson ou avec Godard à la sortie de "Je vous salue, Marie", par exemple. Dans les années 1980-1990, le phénomène s'est répandu. Dans les années 1930, le code Hays d’autocensure hollywoodien interdisait la représentation en gros plan du Christ. C'est de cette période que résulte toute cette vague de films où le Christ est rejeté hors-champ, les "Ben-Hur", etc... Cette tradition se perpétue".

Jésus est aussi souvent utilisé pour faire passer un message. Pier Paolo Pasolini, athée, a ainsi livré en 1964 un "Evangile selon Saint Matthieu" au ton poétique, et politique. Quant au dramaturge et metteur en scène bernois Milo Rau, il a imaginé un Jésus révolutionnaire et noir.

Les polémiques liées à Jésus ne sont pas l'apanage du cinéma. On pense notamment à la photographie contemporaine. Alain Boillat: "On a effectivement des Jésus noirs, des artistes homosexuels qui s’emparent de Jésus. Mais dans l’art contemporain, le public est plus restreint".
Julie Liardet