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A Sion, la Maison du diable expose les dessins rêvés de Federico Fellini

Une des salles de l'exposition "Felliniʹs Oniric Obsessions" à la Maison du diable de Sion. [fondation-fellini.ch - Indra Crittin]
A la Maison du Diable, Fellini aux Enfers / Vertigo / 7 min. / le 7 août 2020
A lʹoccasion du centenaire de la naissance du maître italien, la fondation Fellini expose à la Maison du diable de Sion des dessins nombreux et inédits du cinéaste et offre un voyage dans son inconscient sous le titre "Felliniʹs Oniric Obsessions".

Federico Fellini dessinait tout le temps: ses rêves, ses idées de films, ses décors. Pour les 100 ans de sa naissance, la fondation Fellini propose une plongée dans l'inconscient du cinéaste. On peut y admirer beaucoup de dessins, souvent inédits, tirés de son fameux "Livre des rêves" et de la collection Jakob & Philipp Keel de Zurich. On y voit aussi quelques objets, comme un phallus géant qui a servi pour sa biographie de Casanova ou le clap de la première scène d'"Amarcord".

Depuis les années 1940 et ses débuts comme caricaturiste, Fellini n'a jamais cessé de poser sur le papier des personnages, des femmes plantureuses, des scènes de films, des décors avant et pendant les tournages. Dès les années 1960, sur les conseils de son psychanalyste, il commence à dessiner ses rêves. Ceux-ci sont souvent hantés par la peur de la mort et inspirent parfois un film. Une nuit par exemple, Fellini rêve que sa femme, Giulietta Masina, et lui-même meurent dans un accident d'avion et se retrouvent dans l'au-delà.

Un film inachevé

Fellini dessine la scène, qui devient le début d'un projet de film intitulé "Le Voyage de G. Mastorna", avec Marcello Mastroianni dans le rôle principal. Fellini voit ce film comme le récit d'une descente aux Enfers inscrite dans la tradition de Virgile ou de Dante. "En 1966, Fellini se jette à l'eau pour faire son enfer à lui, d'après Dante", explique Stéphane Marti, président de la Fondation Fellini et co-commissaire de lʹexposition. Hélas, très malade, le réalisateur finit par tout arrêter. Le film ne sera jamais réalisé, mais imprégnera durablement son oeuvre. Dès 1967 débute la seconde partie de sa carrière, où il se met à filmer des catabases, des descentes aux enfers. "Par morceaux, il réalise le film qu'il n'a pas pu faire", résume Stéphane Marti.

Mais contrairement à Virgile, qui voit dans la catabase quelque chose de transcendant, Fellini n'y rencontre que de l'absurde. L'exposition montre comment le réalisateur tente de sortir de cet enfer: par l'exaltation de la femme, l'amour - l'eros - et l'art. "L'oeuvre à venir, le film, la beauté esthétique...c'est une manière de ne plus être en enfer", dit Stéphane Marti.

 >> A voir également: le cinéaste de génie a laissé des traces dans les archives de la RTS. Entre 1960 et 1988, des équipes suisses l'ont suivi sur les tournages de Fellini Roma, du Satyricon et de Casanova:

La passion Fellini

Les dessins, fragments de l'inconscient

Quant aux dessins de Fellini exposés à Sion, certains sont peints à la gouache et parfois dédicacés à ses collaborateurs, d'autres sont griffonnés au stylo et paraissent avoir été effectués sur un coin de table. Le réalisateur y inscrit des numéros de téléphone, parfois des additions. Ces dessins font vraiment partie de sa vie quotidienne.

Et parfois, lorsqu'il travaille sur un film, Fellini donne à ses acteurs non pas un texte, mais un dessin. Marcello Mastroianni en fait l'expérience lors de sa première rencontre avec Fellini pour "La dolce vita": "Il y avait simplement un dessin avec la mer et un monsieur qui nageait avec un sexe énorme qui, de la surface de la mer, arrivait jusqu'au fond. Autour de ce phallus énorme, il y avait des sirènes qui nageaient et dansaient. Je suis devenu rouge, j'étais très gêné (...). Au fond c'est vrai, c'était un symbole de "La dolce vita". Alors j'ai appris tout de suite qu'il ne fallait jamais demander un scénario à Fellini".

Sujet radio: Raphaële Bouchet

Adaptation web: Melissa Härtel

"Felliniʹs Oniric Obsessions", Maison du diable de Sion, jusqu'au 27 septembre

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