En voisin, Jean-Luc Godard expose au Château de Nyon

"Le Livre d'image" est un film de Jean-Luc Godard, découpé en cinq chapitres et composé à partir d’images prises dans la mémoire vidéo du cinéma. Jean-Luc Godard en sature les couleurs, organise successions et surimpressions, décalages ou variations de formats et de rythmes. Le film n'est plus une toile mais une caverne, d'où émerge la voix d'outre-tombe de l'auteur lui-même.

Le film, présenté en compétition officielle au Festival de Cannes en 2018 avait donné lieu à une conférence de presse mémorable où Jean-Luc Godard, physiquement absent, répondait aux questions des journalistes par téléphone portable. Un happening en parfaite adéquation avec son film hors norme, pensé d'avantage comme une installation - ce qui fut le cas au Théâtre de Vidy - que comme un film classique à projeter sur grand écran.

Jean-Luc Godard n'aime pas les festivals mais Emilie Bujès, directrice de Visions du Réel à Nyon, a su, au gré de leurs échanges et conversations téléphoniques, convaincre le cinéaste d'exposer au Château de Nyon. "sentiments, signes, passions" revisite ainsi "Le Livre d'image", poème cinématographique qui traverse 200 ans de l'histoire de l'humanité.

De la pertinence de l'étagère

Dans l'exposition, le film est décomposé en quarante boucles fonctionnant de manière aléatoire, quarante écrans qui se font écho. A cela s'ajoutent photos et étagères Ikea. "Les étagères sont à l'origine de tous les projets de Jean-Luc. Quand il construit un film, il constitue d'abord une matière, des films et des livres le plus souvent, qu'il dispose ensuite, comme un scénario, sur des étagères: le premier rayon correspond à la première séquence, le deuxième rayon à la seconde, et ainsi de suite. Avec ce dispositif, le film est presque déjà là", explique Fabrice Aragno, producteur et ami de Jean-Luc Godard, qui s'est chargé de la scénographie de "sentiments, signes, passions".

Les cinq parties de l'exposition, comme les cinq parties du film, parlent d'amour, de guerre, du Moyen-Orient, des trains et de mort. Ni prétentieuse, ni imposante, elle a l'avantage de laisser le spectateur libre de ses propres associations, ce qui était le désir de Godard.

Sujet TV: Julie Evard

Adaptation web: Marie-Claude Martin

"sentiments, signes, passions", à voir au Château de Nyon jusqu'au 13 septembre