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A Genève, le MAMCO remet en lumière l'art singulier de Rosemarie Castoro

Rosemarie Castoro, autoportrait, vers 1967 [The Estate of Rosemarie Castoro - Rosemarie Castoro]
Expo: Rosemaryʹs babies / Vertigo / 5 min. / le 14 novembre 2019
Le Musée d'art moderne et contemporain de Genève, le MAMCO, remet en lumière, le temps d'une exposition, une artiste américaine que l'histoire avait un peu oubliée. Pourtant Rosemarie Castoro fut une pionnière.

Rosemarie Castoro est une artiste américaine qui pratique aussi bien le dessin que la peinture, la sculpture et l'installation. Elle fréquente dans les années 1960 la crème de la scène artistique dont elle fait partie. Son œuvre est peu à peu oubliée. A Genève, le MAMCO remet en lumière ce travail fort et précurseur.

En arpentant les salles du MAMCO qui sont consacrées à l'artiste, le public prend une vraie baffe. Rosemarie Castoro pousse très loin l'art du monochrome. Elle convoque le spectateur et son rapport à l'oeuvre et à l'espace, invente des vocabulaires formels passionnants, réalise des sculptures à la fois mystérieuses et organiques.

Art minimal et conceptuel

Rosemarie Castoro est une grande artiste qui a fait partie de la grande scène américaine de l'art minimal et conceptuel et dont on ne parlait plus depuis un moment. Le MAMCO remet cette figure à la place appréciable qu'elle mérite.

Dans les années 1960, Rosemarie Castoro vit dans un loft du quartier de SoHo à New York, cotoyant toute la crème de l'art: Lawrence Weiner, Sol LeWitt et bien entendu Carl Andre dont elle fut l'épouse. L'épouse mangée sans doute par l'ombre immense de son minimaliste de mari. Même si aujourd'hui on devrait être capable d'apprécier cette oeuvre telle qu'elle se présente, magistrale et précurseuse, difficile de ne pas la remettre en contexte, se déployant à l'époque dans un monde extrêmement masculin, comme l'explique à la RTS Julien Fronsacq, curateur de l'exposition: "C'est un milieu masculin. L'art minimal est essentiellement un mouvement artistique constitué d'hommes. Il y a quelques femmes, notamment Rosemarie Castoro. Elle est une des trois artistes féminine présentes dans l'art conceptuel et peut-être l'une des deux femmes présentes dans l'art minimal ou post-minimal."

Une oeuvre déroutante

Rosemarie Castoro ne voulait pas être considérée comme une "artiste femme". Elle était une artiste. En janvier 1971, elle disait: "Je pense que les artistes transgressent toutes les frontières et ne devraient pas être séparés en fonction des créneaux universitaires confortables fournis par les conservateurs et encore moins par la société. Hommes, femmes, noirs, blancs, gros seins, pénis, italiens, juifs, chaque artiste est quelque chose. Je ne suis pas devenue artiste parce qu'il y avait un poste vacant", cite Julien Fronsacq.

Elle avait un point de vue singulier et minoritaire qu'il faut avoir en tête pour apprécier ses propositions particulières. Face à l'évidence du travail de Rosemarie Castoro, il semble difficile à croire que l'histoire l'ait oubliée.

L'oeuvre de l'artiste court de 1965 à 2015, soit 50 ans de travail. Pour Julien Fronsacq: "Ce qui frappe immédiatement, c'est la façon dont, de décennie en décennie, elle est en lien avec l'avant-garde, avec les artistes les plus reconnus aujourd'hui par le marché ou l'histoire. Je pense que ce qui a étonné le monde de l'art, c'est les ruptures dans le travail. C'est quelqu'un qui a régulièrement rompu avec la forme qu'elle parvenait à mettre en place. C'est un parcours en zigzag, en rebonds et peut-être que ça n'a pas facilité la reconnaissabilité de son oeuvre qui n'est pas reconnaissable au premier coup d'oeil".

Propos recueillis par Florence Grivel

Adaptation web: Lara Donnet

L'oeuvre pionnière de l'artiste américaine Rosemarie Castoro est à découvrir au MAMCO de Genève, jusqu'au 20 février 2020.

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