Le Musée Rath expose les différentes formes de silence exprimées dans l’art

L'exposition propose un parcours en 10 étapes, soit dix façons de montrer ce silence: la plus évidente reste la nature morte ("still life" en anglais). Mais on se plonge aussi dans des paysages silencieux, dans des portraits qui affichent une certaine mélancolie, ou dans des scènes calmes de la vie quotidienne comme le travail de couture ou de dentelle.

Le sujet peint nous invite donc au silence, mais également la couleur des pastels de Liotard, ou l'obscurité entourant le portrait d'un abbé par Quentin de la Tour. On perçoit ce silence encore dans le non-dit qui pèse au sein d'un couple, avec une série de gravures sur bois de Félix Vallotton.

Et bien sûr le silence de la mort. Plusieurs vanités sont exposées: ces tableaux allégoriques qui nous rappellent, par exemple avec des fruits ou des fleurs qui fanent, à quel point nous sommes périssables. Une nature morte du 17e siècle, représentant une corbeille de verres, dialogue ainsi avec l'armure en cristal de l'artiste contemporain Matt Collishaw.

Des salles complètement noires

Pour aider le visiteur à entrer dans ce silence, le Musée Rath montre les oeuvres dans une lumière tamisée, et pour la première fois, les salles du premier étage sont complètement noires, du sol au plafond. Lada Umstätter, conservatrice en chef des Beaux-Arts au MAH et commissaire de l'exposition, souhaitait faire de cette exposition une expérience: "Je voulais, non seulement à travers la proposition des oeuvres mais aussi à travers l'ambiance, amener une sorte de silence pour que les gens puissent profiter de ce moment de contemplation, de réflexion et de dialogue entre eux et l'oeuvre".

L'effet de cet environnement obscur est surprenant et réussi. Tout comme le sont les dialogues entre des oeuvres anciennes et contemporaines. Parmi ces dernières, à relever dans les "espaces du silence" la surprenante barque d'Alexandre Joly - une vraie vieille barque en bois - remplie d'une eau noire qui vibre légèrement et se fige, comme si elle gelait.

A noter dans la section "Mélancolie" deux grands autoportraits de Zoran Music, et enfin, un autoportrait de Marguerite Burnat-Provins, le regard fier et le doigt sur la bouche. Une manière de signifier qu'à son époque les femmes n'avaient guère droit à la parole et qu'elles étaient difficilement considérées comme des artistes.

Sujet radio: Sylvie Lambelet

Adaptation web: aq

_{"Silences", du 14 juin au 27 octobre 2019, Musée Rath, Genève.}