Un grand format de Martine Béguin et Miruna Coca-Cozma
CCS, le documentaire
A travers des archives qui remontent aux années précédant l'ouverture du lieu, et des témoignages actuels d'acteurs de la scène culturelle, ce documentaire retrace l'histoire du centre, de sa naissance jusqu'à aujourd'hui.
Il en évoque les moments marquants en allant à la rencontre de celles et ceux qui l'ont imaginé, voulu, investi, boudé ou fait briller.
Un machin. Pas une ambassade. Pas une boutique de souvenirs.
Une folle histoire née d'une folle envie. Découvrez les 30 ans d'histoire du CCS en images.
Un outil plutôt. Pas une massue pour casser la tête des Parisiens et leur dire que "y'en a point comme nous". Pas non plus un frigo pour artistes morts. Plutôt un ChouetteCouteauSuisse. Avec, à la place des deux lames, deux salles d’exposition. Une grande pour les grandes oeuvres. Une petite pour les petites.
Avec aussi, en guise de loupe, une salle de spectacle de 85 places en sous-sol, avec sono pour chanter fort, projecteurs pour faire joli, tables longues pour tables rondes, et des sièges rabattables pour faire du bruit quand on quitte ostensiblement un spectacle qui vous énerve. Parce que les artistes contemporains, c’est bien, mais des fois, c’est difficile…
Extrait de la performance de Tamia et Pierre Favre.
Avec encore, à la place du tire-bouchon, une cour intérieure et un foyer pour faire la fête.
Et enfin, à la place de la lime à ongles, une librairie. Pour affuter son oeil et son esprit. Avec pignon sur rue, et un design branché signé Jakob+MacFarlane, parce qu’on y parle architecture, graphisme, design, littérature et humour suisse. Car les Suisses ont de l’humour, et les Français l’apprécient. Si si. Evidemment, il y a aussi des romans. Mais pas que. Parce que, pour un Français, Joël Dicker, Jacques Chessex ou Nicolas Bouvier ne sont pas forcément suisses. Et qu’il les trouve aussi chez son libraire préféré.
Le CCS est né d’une folle envie. Celle de pionniers comme Irène Lambelet qui organisaient - au début des années 1980 déjà - des actions dans Paris, des "Espaces" pour faire vivre la culture suisse et la faire dialoguer avec les milieux culturels parisiens.
Il faut dire que Pro Helvetia, à la fin des années 1970, s’était fait frotter les oreilles par le rapport Clottu, qui trouvait que la fondation n’en faisait pas assez pour soutenir la jeune création.
Les passionnés de culture du moment se sont mobilisés. Ils se sont donnés, réunis, défoncés. Puis il y a une une opportunité: celle d’acheter le rez-de-chaussée de l’hôtel Poussepin. Un vieil hôtel particulier dans un quartier presque insalubre à l'époque: le Marais.
Mais voilà, acheter un bâtiment pour faire de la culture à l’étranger, ça ne s’était jamais fait. Il aura donc fallu une sacrée mobilisation populaire, sous la houlette du journal l’Hebdo, pour que la Confédération et le Conseil de fondation entrent en matière.
Travaux en 1983-84, inauguration en 1985 en fanfare, avec à la tête du CCS pas moins de six co-directeurs pour commencer. Après, ils se sont calmés (sur le nombre de directeurs simultanés).
À quoi sert un centre culturel?
Ah ben ça, ma bonne dame! Ca sert…ça sert à…. Dans l’esprit du public, ça devrait servir à ce que chacun aime. Si vous aimez les poyas et le yodel, ça sert à montrer les poyas et le yodel. Si vous aimez les débats sur les minarets, ça sert à faire des débats sur les minarets. Si vous faites de la peinture alpestre, vous considérez que vous devriez y être exposé. Et si vous vous trouvez drôle, vous aimeriez bien y lancer votre carrière de comique.
Alors qu’en fait, ce n’est pas si simple. Oui, toutes les disciplines culturelles doivent y être présentées, et ça depuis les origines. Cinéma, théâtre, danse, musique, littérature, arts, photo, design, architecture, tables rondes et gai savoir. Tout. Absolument tout.
Le but? Disons que chacun des directeurs du CCS vous répondrait la même chose: un CCS, ça sert à permettre aux créateurs de Créer des Contacts Superutiles. L’essentiel, pour eux, c’est cette fonction de relais. De "marieur". Faire venir des journalistes, des programmateurs de salles, des organisateurs de festivals, d’expositions, de concerts. Faire en sorte que les petits Suisses se fassent voir ailleurs.
Reprendre "Mars", de Fritz Horn, avec le tout jeune Jean-Quentin Châtelain, pour le lancer sur orbite sur les scènes de France et de Navarre…
Découvrez une archive de 1986 avec Jean-Quentin Châtelain dans "Mars" de Fritz Horn.
Organiser des rétrospectives qui font découvrir aux Parisiens nos plus grands cinéastes: Michel Soutter, Fredi Murer ou Daniel Schmid. Et rencontrer un public enthousiaste!
Inviter Botta ou Peter Zumthor pour attirer les amateurs d’architecture.
Donner tribune à Jacques Chessex pour faire connaître le livre suisse, ou à Mathieu Amalric lisant Antoine Jaccoud, pour que les Parisiens s’intéressent à nos auteurs. Et réalisent qu’ils sont Suisses.
Pourquoi ça énerve, un CCS?
Parce que c’est bizarre, comme machin. Ca a l’air comme ça perdu au fond d’une impasse, entre une boutique de fringues, un marchand de parfums et un magasin de bijoux. Un peu invisible, quoi. Avec une enseigne discrète désormais.
Parce que ce Centre a des volumes d’expo pas super pratiques. Une salle de spectacle qui a pris un coup de vieux, et une programmation largement méconnue du grand public.
Parce que la difficulté c’est que, si on y montre des stars qui se débrouillent déjà très bien grâce à leurs agents, on fait double emploi. Et que si on y montre des tout frais tout neufs, personne ne vient, car personne ne les connaît. Dans les deux cas, le public ne s’y retrouve pas. Et les artistes non plus, ma foi.
Thomas Hirschhorn déclanche la polémique avec son exposition au Centre culturel suisse. L'irrévérencieux artiste fustige Christophe Blocher et sa politique. Découvrez son interview.
Et puis, parce qu’il y a des artistes qui sont des polissons. Des briseurs de rêves. Des Casseurs de ConfortSurvoltés. Et ça, les politiciens n’aiment pas, vraiiiiiiiment pas du tout.
Cette Suisse-là, il n’en voulait pas. Alors, pour que sa voix porte plus fort, il est venu le dire au CCS. Là où la culture suisse est en vitrine. Le scandale fera le tour du globe, de la Liberté de Fribourg au New York Times. Un sacré coup de pub, ma foi.
La très controversée exposition "SwissSwiss Democracy" de Thomas Hirschhorn en 2004 au Centre culturel suisse à Paris. [CCS]
Parce que la liberté d’expression, quand ça fait joli dans le salon, passe encore. Mais faudrait voir à pas tomber dans la provocation tout de même. Thomas Hirschhorn, en 2004, s’en est pris à Christoph Blocher.
Cette Suisse-là, il n’en voulait pas. Alors, pour que sa voix porte plus fort, il est venu le dire au CCS. Là où la culture suisse est en vitrine. Le scandale fera le tour du globe, de la Liberté de Fribourg au New York Times. Un sacré coup de pub, ma foi.
Résultat: sanction des chambres, coupes dans les budgets de Pro Helvetia. Quand je vous dis que des fois, les politiques, ça rigole pas...
La magie du lieu
La magie, ça existe aussi au CCS? Ca peut, oui. Pas à tous les coups. Mais ça peut. Vraiment. Quand les lieux sont mis cul par-dessus tête par les artistes…
Quand les plus grands, tout petits déjà, s’emparent des lieux et bouleversent nos habitudes avec ce si charmant humour suisse des petits riens…
Des images rares de l'exposition de Peter Fischli et David Weiss au Centre culturel suisse, en 1985.
Et surtout, quand se produisent des Conjonctions Cosmiques Sidérantes…
Quand les artistes se transforment en bibelots ou en superhéros juste pour faire plaisir à Michel Ritter.
Archives RTS
La Ville Lumière attire depuis longtemps les artistes suisses qui y trouvent une ouverture, de multiples possibilités de rencontres et une effervescence propices à la création.
Certains s'y installent définitivement, d'autres en reviennent, mais leurs séjours dans la capitale s'avèrent toujours fructueux. Rencontres avec des comédiens, des musiciens et des artistes qui sont montés à Paris pour tenter leur chance.
Découvrez notre dossier d'archives consacré aux 30 ans d'histoire du Centre culturel suisse de Paris.
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