Quelle est la vocation de cette émission ?
S’il y a de plus en plus d’émissions interprétées en langue des signes aujourd’hui comme le 19h30, ABE ou 36.9°, Signes est la seule émission qui offre un espace de parole au public sourd et malentendant, où celui-ci peut exposer son point de vue et rendre compte de sa réalité. L’émission s’adresse à tout le monde puisque les personnes s’exprimant en langue des signes sont doublées par des comédien.nes. La vocation de l’émission est aussi de sensibiliser le public non-sourd aux réalités de ce handicap très invalidant.
Que représente ce jubilé pour la RTS ?
Pour moi, ce doit être un motif de fierté que de s’être engagé.es pendant 40 ans sans discontinuité. Les émissions de ce type ne sont pas nombreuses en Europe et dans le monde. On trouve l’équivalent en France, en Allemagne, au Royaume-Uni et dans les pays scandinaves, et c’est à peu près tout.
Qu’est-ce qui a changé en quatre décennies ?
Presque tout. A commencer par le nom de l’émission mais sur la forme et le fond aussi. Il faut savoir qu’en 1982, il n’y avait pas de sous-titres à la télévision et encore moins d’émissions interprétées. Les personnes en situation de handicap sensoriel étaient tout simplement exclues des programmes télévisuels. Aujourd’hui, l’accès aux informations s’est considérablement amélioré et Signes a pu évoluer. L’émission a quitté le studio et s’est ouverte sur le monde. Chaque mois, nous proposons un magazine de reportages avec une thématique unique, toujours présenté en alternance par Carole Prekel et David Raboud. Tous les deux sont sourds et s’expriment en langue des signes française. Signes, c’est un peu le point de vue des sourds sur le monde.
En quoi l’émission répond au mandat RTS ?
La RTS a pour vocation de s’adresser à tous les publics. Les personnes sourdes et malentendantes sont au cœur du service public et l’émission ne pourrait évidemment pas exister sans cela.
Signes se décline en trois langues nationales, comment fonctionne le travail entre les différentes régions linguistiques ?
Signes s’est étendue à SRF et RSI en 2018. Il n’y avait plus d’émissions de ce type depuis vingt ans en Suisse alémanique et il n’y en a jamais eu au Tessin. Lorsque la SSR nous a demandé de produire des émissions dans les trois régions, on s’est heurtés à un problème de taille : la langue des signes n’est pas universelle. Il a donc fallu trouver un.e présentateur.trice ainsi que des interprètes pour chaque région. Aujourd’hui, nous travaillons avec deux productrices, Christina Pollina à SRF et Consuelo Marcoli à la RSI. Au total, nous produisons neuf émissions par année. Six à la RTS, deux à SRF et une à la RSI. Toutes les émissions produites sont adaptées dans les autres langues pour y être diffusées. On organise une séance de rédaction nationale par année et c’est très impressionnant, c’est un peu la tour de Babel avec six langues au total, trois langues parlées, trois langues des signes et plein d’interprètes dans tous les sens !
Un programme spécial est-il prévu pour fêter ce jubilé ?
Plutôt qu’un bilan rétrospectif de notre parcours, nous souhaitons à l’occasion de cet anniversaire poser des jalons pour l’avenir, nous questionner sur l’inclusion des sourds dans la société, sur le devenir de la langue des signes. Pour marquer le cap, Signes propose une émission spéciale qui s’adresse autant aux personnes sourdes qu’entendantes. Elle se profile comme une passerelle entre les unes et les autres pour mieux cerner la réalité du monde de la surdité et pour déconstruire certains préjugés. L’émission sera menée par un duo inédit : la présentatrice de Signes Carole Prekel, sourde de naissance et s’exprimant en langue des signes, aux côtés d’Alexis Favre, producteur et animateur d’Infrarouge, dans le rôle du candide.
Communiqué de presse présentant l’émission spéciale du 8 novembre