Il n’est pas dans les habitudes des experts de RTS Découverte de répondre à des questions qui relèvent de la sphère scolaire (ce serait trop facile…!). Cependant, la question de la force ionique n’a jamais été abordée ici et elle mérite quelques éclairages.

La force ionique (paramètre I) caractérise la concentration de tous les ions (cations chargés positivement et anions chargés négativement) présents dans une solution, en tenant compte des charges portées par ces ions.

L’équation permettant de calculer la force ionique est donnée par I = 0.5 × ∑ ([Ci] × zi2), où I est la force ionique (exprimée en moles par litre), [Ci] est la concentration de chaque ion en solution (exprimée en moles par litre), et zi est la charge (positive pour les cations, négative pour les anions) portée par chaque ion en solution.

Dans cette équation, la charge des ions est portée au carré pour que les charges négatives des anions n’annulent pas les charges positives des cations.

A titre d’exemple, considérons 4 solutions de 1 litre préparées à partir de 0.1 mole de:

     - (a) chlorure de sodium NaCl (qui se dissocie en Na+ et Cl-),

     - (b) sulfate de magnésium MgSO4 (qui se dissocie en Mg2+ et SO42-),

     - (c) sulfate de sodium Na2SO4 (qui se dissocie en 2 × Na+ et SO42-),

     - et (d) chlorure de magnésium MgCl2 (qui se dissocie en Mg2+ et 2× Cl-).

Le calcul de la force ionique pour ces 4 solution nous donne:

     - (a) Pour NaCl: I = 0.1 mole/litre

     - (b) Pour MgSO4: I = 0.4 mole/litre (car chaque ion porte deux charges)

     - (c) Pour Na2SO4: I = 0.3 mole/litre (car un ion porte une charge et l’autre en porte deux)

     - (d) Pour MgCl2: I = 0.3 mole/litre (car un ion porte deux charges et l’autre en porte une).

On voit donc que la force ionique n’est pas la mesure des espèces en solution (ce serait la simple concentration) mais la mesure des charges portées par les ions.

Dans le cas d’une solution de chlorure de fer ferrique FeCl3 à laquelle on ajoute de l’hydroxyde de cuivre Cu(OH)2, il est évident que la force ionique de la solution va augmenter avec l’ajout du Cu(OH)2, puisque des charges sont ajoutées.

Notons également que la force ionique peut être estimée très simplement en mesurant la conductivité électrique de la solution et en convertissant cette conductivité électrique en force ionique au moyen d’une équation empirique.

Pour les non-initiés, la force ionique est un paramètre important lorsqu’il s’agit de déterminer l’activité des ions dans une solution (plutôt que la simple concentration de ces ions en solution). En effet, plus la concentration de substances augmente, plus les "contraintes et gênes" entre ions augmentent (il n’y a pas que dans le métro en heure de pointe qu’il peut y avoir promiscuité, mais aussi dans des solutions trop concentrées). Dans ce cas, l’activité sera une estimation de l’influence réelle des ions, tenant compte de leur "promiscuité" (par analogie au métro, la liberté de mouvement des individus est nettement plus faible en heure de pointe qu’en heure creuse; plus l’heure de pointe approche, plus la "concentration d’individus" augmente dans le métro, mais plus leur "liberté de mouvement" augmente). Il existe plusieurs modèles théoriques permettant d’estimer l’activité des ions en fonction de la force ionique et de la charge des ions présents.

Finalement, la détermination par calcul (voir tout en haut) de la force ionique DOIT IMPERATIVEMENT tenir compte des ions réellement présents en solution. Par exemple, si le mélange de deux substances ne conduit pas à la dissolution complète des ions constituant les deux substances, mais par exemple à la précipitation d’une nouvelle espèce, alors la concentration des ions en solution sera très faible.

C’est par exemple le cas des deux sels nitrate d’argent (très soluble; se dissocie en ions Ag+ et NO3-) et chlorure de sodium NaCl (très soluble). Lorsque ces deux sels sont ajoutés dans la même solution, du chlorure d’argent AgCl solide précipite, et une infime concentration d’ions Ag+ et Cl- reste effectivement en solution. Le calcul de la force ionique de cette solution serait totalement erroné si les concentrations initiales de tous les ions étaient introduites dans l’équation.

Il reste maintenant à notre internaute à savoir si l’hydroxyde de cuivre en présence de chlorure de fer ferrique conduit à une précipitation ou à la solubilisation complète des ions. Répondre à cette question, c’est répondre à l’examen de l’internaute…!