Voilà une question fascinante ! Pour revivre un rêve que nous avons déjà fait dans le passé, une solution facile serait que nous puissions diriger le cours de nos rêves pendant qu’ils ont lieu. Cependant, il semble que dans la plupart de nos rêves nous ne pouvons pas vraiment décider où nous allons, qui nous rencontrons, et ce que nous faisons. Mais ce n’est pas toujours le cas !

En effet, certaines personnes sont capables de changer à volonté le contenu de leurs rêves, ce sont des rêveurs « lucides ». En général, faire un « rêve lucide » veut dire que dans un rêve on se rend compte qu’on est en train de rêver. Le rêve lucide est une compétence qui peut s’apprendre. Par exemple, cette méthode a été utilisée récemment pour aider les patients qui souffrent de cauchemars fréquents. Les patients sont invités à se dire à plusieurs reprises, juste avant de s’endormir, que la prochaine fois qu’ils feront un rêve effrayant, ils se souviendront qu’ils sont dans un rêve. Dans un autre exercice, les patients doivent imaginer la situation effrayante du cauchemar et se répéter qu’il ne s’agit que d’un rêve. En utilisant de tels entraînements pendant la journée, il serait ainsi possible de changer le cours de nos rêves pendant la nuit.

Certaines personnes ont l’impression de véritablement pouvoir diriger ce qui se passe dans un rêve lucide. Dans une telle situation, le rêveur pourrait se dire : « ah, comme je suis en train de rêver, je vais aller me battre contre des monstres très féroces car je ne risque rien, ensuite je m’envolerai dans les airs pour aller dans un restaurant où je mangerai de la nourriture délicieuse ». Bien que le rêve lucide est un phénomène extrêmement intriguant, nous ne connaissons actuellement pas quels mécanismes cérébraux distinguent un rêve lucide d’un rêve « normal ».

Une autre manière d’aborder la question est de s’inspirer d’une observation bien documentée dans les recherches sur le rêve : nous rêvons le plus souvent de ce qui nous préoccupe. L’étudiant qui prépare ses examens va en rêver pendant la nuit, l’amoureux qui pense à sa bien-aimée va la revoir dans ses rêves, celui qui apprend à skier va « re-exercer » virages et freinages divers en rêve. Ainsi, les soucis et les expériences que nous vivons pendant la journée changent le contenu de nos rêves. Si nos rêves rejouent un peu ce que nous avons vécu pendant la journée, est-ce que notre cerveau lui aussi se réactive pendant le sommeil ?

Des travaux chez le rat et chez les canaris ont montré que les neurones peuvent se réactiver pendant le sommeil selon la même séquence que pendant le jour précédent. Des études récentes chez l’homme ont montré que si des sujets humains sont entraînés à faire des séquences de mouvements de doigts (comme lorsqu’on joue du piano), les régions du cerveau qui s’activent pour ces mouvements pendant la journée se réactivent spontanément pendant la nuit de sommeil qui suit l’entraînement. Pour des autres sujets non-entraînés, on ne voit pas une forte activation dans les régions du mouvement pendant la nuit. Ces découvertes toutes fraîches suggèrent que lorsqu’on apprend à faire du ski, notre cerveau peut en effet continuer à s’entraîner pendant la nuit pour nous permettre de skier encore mieux le lendemain.

Imaginons que nous soyons complètement libres de choisir nos préoccupations et nos activités de la journée, alors nous pourrions influencer le contenu de nos rêves nocturnes et l’activité de notre cerveau pendant la nuit. Quel programme !

Pourquoi finalement ne pas se laisser surprendre et divertir par des rêves différents chaque nuit ?