C’est une question passionnante car elle interroge différentes notions qui toutes sont importantes et pas intuitives.

La première notion est cette notion de flore commensale, qui peut se révéler très complexe, très spécifique à chacun et dont les rôles et fonctions sont multiples. C’est d’une certaine façon ce qui nous habite, ou plutôt ce avec quoi nous cohabitons. Elle peut varier d’un individu à l’autre selon de nombreux critères, elle varie dans le temps en fonctions de nos habitudes alimentaires, de notre état de santé physique (maladie, épisodes infectieux…) et "mental" (stress, fatigue, etc). Je ne suis clairement pas un spécialiste de cette flore, mais il y a une chose que je sais, c’est que la flore commensale n’est pas peuplée que d’"amis" qui nous veulent du bien; c’est juste un état des lieux à un moment "t" de la vie d’un individu. En situation "normale", s’établit un équilibre entre les différents protagonistes, avec comme dans la vraie vie ceux qui sont clairement utiles, ceux dont on ne sait pas bien, et ceux pour lesquels on pense qu’on pourrait s’en passer, encore qu’il faudrait être prudent sur cette notion et faire attention aux mots que l’on utilise; souvent les choses sont plus complexes qu’on ne pense (un utile peut devenir nuisible, et un nuisible peut avoir son utilité…). Mais, comme évoqué plus haut, cet équilibre est sujet à changement (changements alimentaires, maladies, infections, stress… mais aussi traitement (le plus objectif est le traitement par antibiotique, qui a un effet direct sur certaines bactéries et pas d’autres…mais, dans les faits, toutes sortes de traitements peuvent avoir un impact sur cette flore). Avec les changements dans l’équilibre de cette flore viennent les problèmes potentiels: des populations bactériennes potentiellement protectrices qui diminuent au profit d’autres moins protectrices, des bactéries "agressives" qui soudainement prolifèrent et atteignent un niveau qui déclenchent des symptômes (elles étaient là mais à un niveau insuffisant pour faire des dégâts); toutes sortes de scénarios peuvent être possibles qui peuvent être soit sans conséquences en termes de santé, soit en avoir de plus ou moins sévères.

En lien étroit avec tout cela vient également la notion de l’immunité innée de nos muqueuses. L’immunité innée est cette première ligne de défense qui nous protège contre les infections quelles qu’elles soient, et on comprend bien que les muqueuses, respiratoires ou digestives, représentent des interfaces privilégiées en tant que porte d’entrée des agents infectieux (dans notre système digestif on trouve au moins autant de bactéries que de cellules dans notre organisme (10 à la puissance 13, soit dix mille milliards…), cela laisse songeur sur "les dangers" qui nous guettent :-) ainsi que sur l’importance de l’immunité innée pour nous garantir contre ces dangers.

Ainsi, même une bactérie dite agressive ou pathogène pourra être contenue à un niveau infra-clinique (sans symptôme, car tout est apprécié via ce prisme parfois trompeur) grâce à notre immunité innée qui contrecarre efficacement la prolifération de ces bactéries. Mais que cette immunité vienne à "défaillir" pour différentes raisons, parmi lesquelles on va trouver celles que l’on a déjà évoquées, fatigue, stress, infections… mais aussi des traitements plus spécifiques comme des traitements immunosuppresseurs employés pour toute sorte de raisons, ou des infections connues pour induire des immunodépressions et, à nouveau, l’équilibre dans la flore est rompu avec les risques évoqués plus haut.

On le voit bien, tout est lié à tout, rendant les choses encore plus complexes. Ces bactéries qui n’attendent qu’une baisse de cette immunité innée pour proliférer au sein de la flore et provoquer des dégâts peuvent être qualifiées de bactéries opportunistes; elles font partie de la flore commensale et n’attendent d’une certaine façon que les conditions optimales pour se développer (en l’occurrence une baisse de l’immunité innée…). Une autre forme d’agents infectieux dits opportunistes peut venir de l’extérieur et, dans ce cas, l’infection ne pourra se développer que lorsque l’immunité innée est défaillante. Cette fois, l’"ennemi" vient de l’extérieur car n’est pas issu de la flore elle-même, mais les conditions de la flore ont un impact sur ce type d’infection (certaines bactéries peuvent être protectrices et donc leur disparition créer les conditions de cette infections extérieure…).

Tout est dans tout.

Je pense que cette réponse peut-être avantageusement complétée et donner lieu à débat.