Les mutations génétiques sont aléatoires, c’est à dire dues au hasard. Elles sont imprévisibles individuellement. Mais certaines se reproduisent régulièrement, ici ou là dans les populations. On peut alors prédire, statistiquement, leurs fréquences d’apparition et de maintien. Les prochaines mutations génétiques que l’on observera sont donc d’abord, et en majorité, celles que l’on connaît déjà. Certaines ne changent rien, d’autres provoquent des variations bénignes ou des maladies, comme l’albinisme, la mucoviscidose ou des myopathies. Ce que l’on sait, c’est que le nombre de cas de ces mutations augmentera, à la fois du fait de l’augmentation des effectifs humains et par l’exposition croissante de nombreuses populations aux pollutions mutagènes chimiques et radioactives. Des mutations jusqu’ici inconnues se produiront aussi, qui se répartiront comme les précédentes, en une majorité de mutations "neutres", qui ne changent rien à leurs porteurs, une minorité de mutations détériorantes, causes potentielles de maladies plus ou moins graves. Et sans doute quelques mutations favorables. Certaines pourraient, par exemple, améliorer la résistance de leurs porteurs aux effets de la pollution ou à certaines maladies. Tout ceci n’est que spéculations puisque nous sommes ici dans l’imprévisible. Ce qu’il faut préciser, c’est que la plupart des nouvelles mutations ne survivent que peu de générations et disparaissent avant de se répandre dans les populations et de modifier les espèces. De plus, celles qui persistent mettent, la plupart du temps, très longtemps – des centaines ou des milliers de générations - avant d’atteindre des fréquences élevées ou de se "fixer" pour changer l’espèce. Ainsi, les mutations qui ont produit les caractéristiques génétiques de la lignée humaine et celles des bonobos, des chimpanzés ou des gorilles, ont sans doute, pour la plupart, mis des centaines de milliers d’années à se fixer. Ce que confirme les très grandes similitudes des génomes des quatre espèces de grands primates africains depuis leur origine commune, il y a six à neuf millions d’années: leurs génomes n’ont pas eu le temps de devenir très différents. Surtout que leurs ancêtres ont poursuivi des échanges génétiques longtemps après leurs premières séparations. Il existe pourtant une minorité de mutations qui ont pu apparaître et se répandre rapidement, parce qu’elles apportaient de forts avantages à leurs porteurs. Parmi elles, celles qui produisaient des résistances à des épidémies graves ou celles qui permettaient l’exploitation de nouvelles sources de nourriture – par exemple en digérant le lait chez les éleveurs adultes. Et puis aussi celles qui ont contribué à l’amélioration de la communication et de la coopération sociale en permettant, dans notre seule espèce, le langage à double articulation, des signes et de leurs sens. Mais la plupart des évolutions génétiques sont très lentes. On ne peut qu’imaginer, sans certitudes, celles du futur, qui se feront à long terme, tandis que des évolutions démographiques, technologiques et écologiques, très rapides, semblent nous précipiter droit dans le mur à court terme! Toutefois, des études sur les mouches du vinaigre ont montré qu’en cas de crise et de stress environnemental grave, leurs rythmes de mutation s’accélèrent, au point de donner des chances d’apparaître et de se fixer à des mutations "révolutionnaires". Des mutations qui permettent à leurs porteurs de résister au stress, et à une minorité de survivre aux crises. S’il en est de même chez les primates, ce mécanisme permettra peut-être l’émergence de "post sapiens", de la même espèce ou d’espèce différente, dans un petit groupe de "surviveurs". Mais ce ne serait pas une bonne nouvelle pour la majorité des populations… qui disparaîtrait ! Bon, arrêtons la science-fiction, ma boule de cristal fatigue ! Et pensons plutôt à préserver ce qui nous reste de nature, de ressources et d’environnement vivable…