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La baisse de la natalité

Natalité, berceau [Fotolia - ©  brimeux]
Pour comprendre les origines de la baisse de la natalité, il est important de retracer l'histoire du 20e siècle. - [Fotolia - © brimeux]
Émancipation féminine, travail des enfants, état providence... Tant de facteurs qui ont influencés la baisse de la natalité. Retrouvez dans cet article, en parcourant l'histoire du 20e siècle, quelques explications.

L'affaiblissement du taux de natalité préoccupe de plus en plus les pays développés. Pour comprendre ses origines, il est important de retracer l'histoire du 20e siècle. En effet, c'est à travers les grands évènements de ce siècle que la société s'est modifiée et que bon nombre de choses se sont mises en place.

Au début du 20e siècle, le monde assiste à une période de désenchantement, c'est-à-dire à une perte des valeurs de la religion. Ce n'est plus l'église qui a le pouvoir. Les mentalités commencent fortement à changer. Par ailleurs, les pays européens connaissent une forte industrialisation, avec pour conséquence une migration des paysans vers les villes (exode rural). En outre, se créent progressivement des dispositifs de sécurité sociale, particulièrement de retraite, faisant que les parents ne comptent plus sur leurs enfants pour assurer leurs vieux jours. En outre, l'interdiction du travail des enfants et l'école obligatoire ont changé le rôle économique des enfants. Ils ne sont plus facteurs de gains pour la famille, mais plutôt un facteur de coûts.

Cependant, la réelle rupture a eu lieu avec la Première Guerre mondiale. Les hommes, pour la plupart partis en guerre ou mobilisés (Suisse), sont moins disponibles. Cette absence amène une forte demande féminine dans certains secteurs masculins de type armement ou transport. Les femmes se rendent alors compte qu'elles sont capables de travailler dans ces domaines et survient alors une prise de conscience d'une large partie de la population. Ce sont les prémices de l'émancipation féminine.

S'ensuivent les années folles de 1920 à 1929. En 1929, une crise économique et sociale sans précédent éclate dans le monde entier. La situation économique mondiale étant catastrophique, on observe un effet dépréciateur sur l'indice synthétique de fécondité. Il n'est plus possible d'assumer monétairement un ou plusieurs enfants. En outre, l'émancipation féminine perd de son ampleur.

Arrive alors 1939. La Deuxième Guerre mondiale éclate. Cette fois, les femmes concrétisent leur émancipation car durant cette guerre elles montent au front auprès des hommes. A côté, l'Etat commence à investir et à prendre en charge la population. Les politiques natalistes font leur apparition. La société valorise le statut de mère, le taux de natalité remonte.

Entre 1945 et 1974, la grande majorité des pays développés connaît une période de forte croissance économique, les Trente Glorieuses. Le contexte économique étant favorable, les pays mettent en place ou consolident leur Etat-providence. Le taux de natalité croît au début non seulement parce que les femmes font un peu plus d’enfants qu'avant la guerre, mais aussi parce qu'elles les font un peu plus jeunes. Il diminue cependant à partir de la deuxième moitié des années 60, parallèlement à un retardement de l'âge à la naissance des enfants. Cette fois, l'émancipation féminine est entendue et dans les années 70, on observe une généralisation de cette émancipation. Grâce aux différentes prestations sociales, le statut de mère est largement valorisé et avoir un ou deux enfants suffit. Les couples n'ont plus besoin d'enfants pour assurer leur retraite. Par ailleurs, c'est également à cette période que la pilule contraceptive, inventée au tout début des années 1960, devient légale et libéralisée. La sexualité change: elle devient liée au plaisir et on passe d'une fécondité subie à une fécondité choisie.

L'indice conjoncturel qui était de 2,5 enfants par femmes en 1965 en Suisse s'est stabilisé aux environs de 1,5 à partir de 1975. Aujourd'hui, les pays développés se trouvent encore dans une société qui valorise le rôle de mère. On privilégie les congés maternité et il est souvent difficile d'allier carrière et vie de famille. En outre, les études sont aujourd'hui plus longues et on entre sur le marché matrimonial bien plus tard. L'âge du premier enfant recule, ce qui laisse "moins de temps" pour en avoir beaucoup. Selon l'Office fédéral de la statistique (OFS), en 1950 en Suisse, les femmes avaient leur premier enfant en moyenne à 26,8 ans. En 2013, l'âge moyen est passé à 30,6 ans.

Nous nous trouvons aujourd'hui dans un monde vieillissant et certains pensent que pour renverser la situation, il est indispensable d'augmenter le taux de natalité. La mise en place de politiques natalistes telles qu'en Suède (congé paternité obligatoire) ou en France (assurer une place en crèche) pourrait être des solutions.

RTS Découverte, avec la collaboration de Jean-Marie Le Goff, docteur en démographie, Maître d'enseignement et de recherche, Université de Lausanne, chercheur au pôle de recherche lives

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