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Festival Aoi Matsuri, Nicolas Bouvier

Nicolas Bouvier, Festival Aoi Matsuri, Kyoto, 1964 [Musée de l'Elysée, Lausanne - © Nicolas Bouvier]
Festival Aoi Matsuri, Kyoto, 1964. - [Musée de l'Elysée, Lausanne - © Nicolas Bouvier]
Tous les mois, RTS Découverte vous emmène, petits et grands, au Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne, au Musée de l'Elysée ou au Musée de design et d'arts appliqués contemporains de Lausanne - le mudac - pour découvrir une œuvre de ces institutions vaudoises appelées à se regrouper pour former le futur Pôle muséal de la capitale vaudoise. En sus de ce décryptage, nous vous proposons une biographie de l'artiste. Pour cette troisième édition de "L'œuvre du mois", le Musée de l'Elysée commente pour vous une photographie prise par Nicolas Bouvier.

Cette photographie a été prise par Nicolas Bouvier, célèbre écrivain-voyageur suisse, auteur de L'Usage du Monde. Elle représente une jeune femme participant au festival Aoi Matsuri,  la fête de la rose trémière, au Japon.

Le calendrier japonais comprend quatorze jours de fêtes et de jours fériés. Ces journées proviennent pour la plupart des rites du Shintoïsme et du Bouddhisme, deux grandes croyances japonaises.

La fête de la rose trémière donne lieu à un défilé à Kyoto le 15 mai de chaque année. Cette procession est composée d'environ cinq cent personnes richement vêtues qui défilent dans les principales rues de Kyoto.

Le nom du festival Aoi Matsuri vient de la tradition d'offrir des roses trémières aux dieux/esprits et de décorer les temples, les participants et les chariots de bœufs avec les feuilles de celles-ci. Le festival remonte à la période de l'empereur Kimmei, il y a environ 1400 ans.

Nicolas Bouvier et le Japon

Ecrivain-voyageur et iconographe, Nicolas Bouvier part en 1953 avec son ami Thierry Vernet pour un voyage de plus de deux ans entre Genève et Kaboul, un périple qui donnera naissance à l'ouvrage L'Usage du Monde (Editions Droz, 1963).

En 1956, il prend seul le bateau pour le Japon Ce sera la dernière étape de son voyage. Il y retourne ensuite avec sa femme et son premier fils de 1964 à 1966. Il publie ensuite le texte Japon, en 1967.                                                                  

La photographie traduit les émotions de Nicolas Bouvier et définit l’atmosphère du voyage par des prises de vue d'une grande simplicité.

"Le voyage ne vous apprendra rien si vous ne lui laissez pas aussi le droit de vous détruire. C'est une règle vieille comme le monde. Un voyage est comme un naufrage, et ceux dont le bateau n'a pas coulé ne sauront jamais rien de la mer. Le reste c'est du patinage ou du tourisme" (extrait des carnets de voyage inédits de Nicolas Bouvier).

Le contexte social

Nicolas Bouvier laisse peu de place, dans ses photographies, à la beauté des paysages japonais. Il va à l'essentiel. Ce qui lui importe, ce n’est pas tant le cadre de vie, mais les êtres humains et leur vie quotidienne. Il définit le Japon comme un pays où, dans la société, l'esprit collectif tient une place beaucoup plus importante qu'en Suisse, où l'individualisme est plus marqué.

Il constate aussi que le Japon, encore très attaché à ses valeurs ancestrales, commence à se diviser avec la naissance du prolétariat. Cette photographie, qui s'inscrit dans ce contexte de changement social important, montre le tiraillement  du Japon entre l'attachement à son histoire et la volonté et la nécessité d'aller de l'avant.

RTS Découverte/Musée de l'Elysée

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Brève biographie

Nicolas Bouvier est né en 1929 à Grand-Lancy, dans le canton de Genève. Fils d'Antoinette Maurice et d'Auguste Bouvier, directeur de la Bibliothèque publique universitaire, Nicolas Bouvier est un enfant rêveur. Il est passionné par les couleurs des atlas de géographie et se révèle un grand lecteur de romans d'aventures.

Encouragé par son père, il fait son premier voyage solitaire en Norvège à l'âge de 17 ans. De retour à Genève, il suit des cours d'histoire médiévale et de sanskrit à l'université, où il obtient deux licences en droit et en lettres. Il effectue également des reportages pour les quotidiens "La Tribune de Genève" et "Le Courrier".

Il consacre sa vie à l'écriture - une prose et des poèmes magnifiquement ciselés - aux recherches iconographiques et aux voyages.

Après un premier périple de Venise à Istanbul en 1951 avec Thierry Vernet et Jacques Choisy, il parcourt les routes de Belgrade à Kaboul en Fiat Topolino, toujours avec Thierry Vernet.

Le voyage suivant, décrit dans Le Poisson-Scorpion, le voit faire un long séjour douloureux et solitaire à Ceylan. Plus tard, avec son épouse et complice Eliane et leurs deux enfants, il part au Japon. D'autres pays d'Asie ou d'Europe suivront.

Dans son roman le plus connu, L'Usage du monde, il écrit: "Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu'il se suffit à lui-même. On croit qu'on va faire un voyage, mais bientôt c'est le voyage qui vous fait, ou vous défait".

Ami attentionné et conteur accompli, il est lié aux gens de théâtre, aux peintres et aux écrivains. Il s'éteint à Genève en 1998.

Tiré de "Faces à Faces", Université de Genève, 2009

Le fonds Nicolas Bouvier au Musée de l'Elysée

Le fonds Nicolas Bouvier a été déposé au Musée de l'Elysée en 1998.

Il comprend plus de mille photographies (Usage du Monde, Japon, Corée, Indonésie), des milliers de négatifs, contacts et diapositives.