Serial Teller - Les années 90 et 2000

Grand Format Couleur 3

Introduction

"Serial Teller", l'histoire des séries télé américaines et leur évolution à travers les décennies, des années 1940 aux années 2000!
Des séries pour les jeunes au phénomène "Friends", en passant par le règne de HBO et l'OVNI "X-Files", Crystel Di Marzo poursuit son exploration jusqu'au début du XXIe siècle.

Chapitre 1
A la conquête des jeunes

A l'aube des années 90, les postes de télévision se multiplient dans les foyers américains. Il y a le petit poste à la cuisine, le poste dernier cri au salon et l'ancien poste dans la chambre de l'aîné. Cette généralisation motive les chaînes à cibler davantage leurs programmes. Si "Les années coups de cœur" et la comédie "Sauvé par le gong" s'intéresse déjà aux adolescents à la fin des années 80, la première bombe pour adolescents arrive en 1990 sur la FOX.

Le casting de la série "Beverly Hills 90210". [FOX]
Le casting de la série "Beverly Hills 90210". [FOX]

Imaginée par Darren Star et produite par le roi du divertissement Aaron Spelling, "Beverly Hills 90210" se concentre sur les préoccupations des lycéens. C'est une sorte de soap, mais pour les jeunes. Avec ses trames plutôt moyennes et sa réalisation plate, la série a néanmoins beaucoup de succès dans le monde entier. Son casting devient l'idole de toute une génération.

Dans un style plus dramatique, "My So-Called Life", "Angela, 15 ans" en français, met en scène une adolescente angoissée. La série diffusée par ABC ne dure qu'une seule saison, mais se fait remarquer pour la justesse de son propos, pour ses thèmes allant de l'homophobie à l’alcoolisme, et pour son actrice principale Claire Danes, qui n'a même pas 15 ans au moment du tournage.

Sarah Michelle Gellar dans le rôle de Buffy, la tueuse de vampires. [Archives du 7eme Art / Photo12]
[Archives du 7eme Art / Photo12]

En 1998, c'est "Dawson" qui récolte tous les suffrages auprès des ados, en révélant Katie Holmes et James Van der Beek. Proposée par la petite chaîne WB – qui plus tard deviendra The CW –  "Dawson" se concentre sur les passions amoureuses et sexuelles de ses héros, et en parle sans détour.

Quant à la série "Buffy contre les vampires", incarnée par Sarah Michelle Gellar, elle mélange le fantastique, l'action et les déboires adolescents tout en réussissant à rassembler un public mixte. Le succès est tel que la Buffy est rapidement copiée et surtout analysée sous toutes ses coutures. Des articles, des livres, des études universitaires sont menés sur l'univers de la série de Josh Wedon: ce sont les "Buffy Studies".

Chapitre 2
Les sitcoms générationnelles

Photo12/Archives du 7eme Art/AFP

La sitcom, l'un des genres phares des années 80, se transforme à l'orée des années 90 et change de public cible. La force économique du pays ne repose plus sur les épaules de la famille, mais sur une génération d'adultes célibataires, qui ont d'autres attentes.

Les personnages principaux ne sont plus des parents: ils peuvent être artistes de stand-up new-yorkais, comme dans "Seinfeld", l'une des sitcoms les plus acclamées, saluée pour son écriture brillante et son originalité. La série créée par Jerry Seinfeld et son acolyte Larry David donne surtout un nouvel élan au genre, avec un humour plus rythmé et incisif. Elle reste aujourd'hui encore une référence dans le domaine.

La sitcom qui deviendra l'un des phénomènes télé des années 90 s'appelle "Friends". Elle rassemble une bande de jeunes amis, qui aiment se retrouver au Central Perk. Également lancée par NBC qui a le vent en poupe, "Friends" s'adresse à la génération X et connaît immédiatement un énorme succès. La terre entière se prend d'affection pour les six amis, qui possèdent tous leur "spécialité" caractérielle. Tout le monde a son Friend préféré et suit cette saga fraternelle au ton décomplexé. Très bien écrite, la série est surtout parfaitement interprétée. Il y a une véritable osmose entre les comédiens, comme si chacun d'eux permettait de sublimer les autres.

Les amis de "Friends". [NBC]
Les amis de "Friends". [NBC]

Les sitcoms générationnels envahissent les télés et des networks comme NBC y consacrent près de cinq soirées par semaine. Prenant une teinte féminine avec "Les dessous de Veronica" ou politique avec "Spin City" et son acteur star Michael J. Fox, elles se multiplient jusqu'à la fin des années 90, puis s'essoufflent. Ou disons plutôt que le public s'essouffle.

La sitcom, sans disparaître totalement, va donc se faire plus discrète jusqu'en 2005 et l'arrivée de "How I Met Your Mother". Cette série ne va pas connaître le même engouement en Europe qu'aux Etats-Unis, où elle est plébiscitée par 10 millions de téléspectateurs au début de son existence.

Avec sa narration non linéaire et ses excellentes vannes, elle redonne du pep au genre. Malheureusement, elle s'affaiblit en milieu de parcours et son final ne plaît pas à la majorité des fans.

20th Century Fox Television / Archives du 7eme Art / Photo12 - 20th Century Fox Television

Chapitre 3
"X-Files", aux frontières du réel

20th Century Fox Television / Archives du 7eme Art / Photo12 - 20th Century Fox Television

Au départ, la chaîne FOX ne croit pas trop en "X-Files". Le réseau est frileux à l'idée de le passer en prime time. De plus, la production ne voulait pas de Gillian Anderson pour interpréter le rôle de Dana Scully. Mais Chris Carter, le créateur de la série, insiste, disant que c'était celle qu'il fallait pour le rôle. Une petite rousse un peu boulotte et inspirant l'autorité. Car n'oublions pas qu'il y a d'un côté la sceptique et scientifique qui ne croit à rien, et de l'autre, l'agent Fox Mulder, campé par David Duchovny, qui est convaincu de l'existence des extra-terrestres. Ces deux agents du FBI enquêtent sur des cas paranormaux parfois effrayants, rencontrent des créatures fantastiques et finissent par découvrir une conspiration.

La série est osée et n'explique pas grand-chose à la fin de ses épisodes. Pourtant, le succès est immédiatement au rendez-vous. De 12 millions de curieux pour l'épisode pilote, l’audience atteindra  27 millions de téléspectateurs au début de la cinquième saison.

"X-Files" marque un cap en prouvant que la science-fiction et le fantastique peuvent toucher le grand public. Elle montre aussi qu'il est possible de développer une intrigue sur le long terme, d'avoir un arc narratif, une mythologie courant sur plusieurs saisons, tout en incluant des "standalone", des épisodes qui tiennent tout seuls, et racontent une histoire du début à la fin. "X-Files" change le cadre rigide de la trame.

Chapitre 4
Le règne de HBO

La chaîne payante HBO est surtout plébiscitée au départ pour ses programmes sportifs et ses films. Mais ce serait du gâchis de ne pas profiter de la liberté de ton qu'elle permet. Il n'y a pas de pub sur HBO, et aucun annonceur à satisfaire. On peut donc parler de sexe, montrer de la violence et dire des vilains mots, le tout dans un format libre. Les séries ne sont pas non plus soumises aux durées classiques de 26 ou 44 minutes.

C'est dans cet esprit que la chaîne lance "OZ" en 1997, un drame violent et psychologique se déroulant dans une prison expérimentale. C'est tellement violent et tellement cru qu'on n'a jamais vu ça à la télé. L'année suivante, en 1998, HBO s'intéresse aux pérégrinations sexuelles de quatre copines, sans tabous, avec "Sex and The City", une petite révolution dans l'univers des fictions pour filles.

L'acteur américain Frank Vincent (à droite), dans la série "Soprano". [Archives du 7eme Art / Photo12 - Archives du 7eme Art / Photo12]
[Archives du 7eme Art / Photo12 - Archives du 7eme Art / Photo12]

En 1998 aussi arrivent "Les Sopranos", le chef d'œuvre de HBO, la série qui va bouleverser le monde du petit écran vers une nouvelle ère. Non seulement "Les Sopranos" nous plonge au cœur d'une bande de mafieux hyper violents, mais la série se penche également sur la psychologie du chef anxieux Tony Soprano. Véritable bombe scénaristique, la série bénéficie d'une mise en scène de cinéma, d'un casting aux petits oignons, d'une histoire passionnante et d'une recette encore jamais testée. Tantôt provocante, tantôt drôle, tantôt réflexive, la fiction créée par David Chase apporte le politiquement incorrect à la télé en nous faisant aimer un assassin.

Deux ans plus tard, HBO nous propulse dans une famille de croque-morts, les Fisher. Une fois de plus, le public découvre une fiction d'un nouveau genre. Un drame touchant, bouleversant, passionnant, à l’esthétisme soigné. La force de HBO est de faire confiance à ses créatifs et de ne jamais s’immiscer dans leur travail. Un pari qui paye, puisque les abonnées viennent de plus en plus sur la chaîne câblée pour ses séries "différentes". Elle prouve également que le public est avide de nouvelles formes de fiction, plus ciblée dans leurs thèmes.

La saison 6 de "Game of Thrones" débarque le 25 avril 2016 sur RTS Un. [HBO]
La saison 6 de "Game of Thrones" débarque le 25 avril 2016 sur RTS Un. [HBO]

Suivront "The Wire", "Deadwood", "Band of Brothers", "Big Love", "Rome". Et même si HBO perd un peu de son aura à la fin des années 2000, car fortement concurrencée par les autres chaînes câblées, elle renoue avec le succès et le pactole en 2011, grâce à "Game of Thrones".

Chapitre 5
La réponse des autres networks

Fox-TV / The Kobal Collection

Au tournant du siècle, la créativité et l'audace de la chaîne HBO attirent bien évidemment l'attention des autres chaînes câblées, qui vont sans vergogne copier le modèle, en se montrant encore plus provocantes.

FX lance "The Shield" et son flic ripou Vic Mackey en 2002, et l'année suivante, elle exploite l'obsession du paraître et de la beauté avec "Nip/Tuck". Créée par Ryan Murphy, la série est une fiction dérangeante, hyper sexualisée et léchée au niveau visuel.

De son côté, la chaîne Showtime commence par parler à la communauté gay avec "Queer as Folk" en 2000, puis "The L World" quatre ans plus tard. Elle connaît son grand succès en 2006 grâce à Dexter, un serial killer travaillant pour la police de Miami, et qui nous confie ses pensées par l’intermédiaire d'une voix off. Avec "Dexter", Showtime se fait des couilles en or et prouve aux téléspectateurs que l'on peut s'attacher à un tueur sans aucune empathie.

La FOX, elle, tape dans le suspense à haute dose, en livrant "24 heures chrono" en novembre 2001. Ironiquement, la première saison de cette série, qui deviendra le symbole de l'ère post 11 septembre 2001, été écrite bien avant la date de l'attentat. Le principe est simple: le héros Jack Bauer doit déjouer une menace terroriste en moins de 24 heures. La série est racontée en temps réel, s'étalant donc sur 24 épisodes d'une heure. Le pari paraît risqué, car ce type de narration nous oblige à suivre assidûment la saison. Heureusement, le DVD est maintenant là et il va changer une fois de plus la manière de consommer les fictions.

Les gros networks se mettent eux aussi à produire des feuilletons à suivre. J. J. Abrams apporte la mystérieuse "Lost" sur ABC en 2004,  et, la même année, Marc Cherry présente les "Desperate Housewives" et leurs petits secrets.

>> A écouter: l'épisode 5 de "Serial Teller" :

Serial Teller Episode 5
Serial Teller - Publié le 3 août 2018

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