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Prix du livre: le peuple pourrait avoir le dernier mot

Les partisans du prix unique du livre ne sont pas au bout de leurs peines. [Martial Trezzini]
Les partisans d'une nouvelle loi sur le prix du livre ne sont pas au bout de leurs peines. - [Martial Trezzini]
Après sept ans de débats nourris, le texte de la nouvelle loi instaurant notamment un prix unique du livre, a passé vendredi le cap du Parlement en votations finales. Mais un référendum va être lancé par l'UDC et le PLR avec des consommateurs alémaniques.

Le peuple aura sans doute le dernier mot sur la nouvelle réglementation sur le prix du livre. En gestation depuis sept ans, le texte a passé vendredi le cap du Parlement en votations finales, mais un référendum va être lancé.

Toujours opposés à la loi, l'UDC et le PLR ont déjà convoqué la presse en fin de matinée pour le lancer avec des consommateurs alémaniques. La victoire des partisans de la nouvelle loi pourrait ainsi être de courte durée.

Au Conseil des Etats, le texte a pourtant passé le cap des votations finales par 23 voix contre 19 et 1 abstention. L'aval du National a été plus large avec 96 voix contre 86 et 5 abstentions. Avant le vote, partisans et adversaires du texte ont une dernière fois croisé le fer à la tribune du National.

Dernière passe d'armes

Les auteurs et les lecteurs suisses ne profiteraient pas du prix unique, a fait valoir Caspar Baader (UDC/BL). Seuls les libraires en ligne, les éditeurs étrangers et les grands diffuseurs en bénéficieraient. Gabi Huber (PLR/UR) a dénoncé une loi contraire à la concurrence, la branche se porte bien et rien ne justifie les subsides ou le soutien de l'Etat.

Il ne s'agit pas d'une intrusion de l'Etat, mais d'une simple reconnaissance, a répondu Dominique de Buman (PDC/FR). Il faut offrir à toutes les idées la possibilité de s'exprimer de manière large et à chances égales sur le papier. "Celui qui veut une offre culturelle diversifiée vote oui", a renchéri Hildegard Fässler (PS/SG). Toute la branche soutient la réglementation, a encore relevé Louis Schelbert (Verts/LU).

Serpent de mer

La question du prix unique du livre est un serpent de mer politique: elle a déjà été examinée sept fois, sans jamais aboutir jusqu'ici. La nouvelle loi doit concrétiser une initiative parlementaire déposée en 2004 par feu le conseiller national Jean-Philippe Maitre (PDC/GE) pour encourager la diversité culturelle en préservant notamment les petites librairies face aux tarifs agressifs des grandes surfaces.

Le projet est très controversé depuis son élaboration en commission et les Chambres ont ferraillé longtemps. Le National a dû céder sur la fourchette qu'il voulait introduire pour limiter les écarts de prix pratiqués en Suisse et à l'étranger pour les ouvrages importés. Craignant des écarts de tarifs trop élevés, le Conseil des Etats a préféré charger le surveillant des prix de jouer les arbitres et d'intervenir en cas d'abus.

Internet déterminant

La Chambre des cantons a apparemment cédé en revanche au National sur le commerce électronique. A une voix près, elle a finalement accepté de soumettre les ventes d'ouvrages via internet à la nouvelle réglementation.

Mais il semble qu'une partie de la droite y ait consenti pour couler le projet en votations finales. L'appel avait d'ailleurs été lancé lors du débat. Comme le Conseil fédéral, la droite économique estime en effet qu'une réglementation des tarifs sur la Toile serait impossible à contrôler et contreviendrait aux accords internationaux en la matière.

Partisans et adversaires de la nouvelle loi n'ont de toute façon jamais réussi à se mettre d'accord sur l'effet qu'elle aurait sur les prix des livres.

Durant plus d'un siècle, les ouvrages en langue allemande ont été soumis à une réglementation de tarifs, jusqu'à son abrogation en mai 2007, sur pression notamment de la Commission contre la concurrence et avec l'aval du Conseil fédéral.

La partie latine du pays n'a jamais connu un tel régime. Mais les détaillants romands s'étaient fixés leur propre système jusque dans les années 90.

ats/olhor

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Frédéric Mitterrand défend le prix unique pour le livre numérique

Entérinée vendredi par le Parlement au bout de sept ans de gestation, la nouvelle loi sur le prix du livre en Suisse inclut les ventes par internet.

En France, le ministre de la culture Frédéric Mitterrand réclame cette extension d'urgence. L'Hexagone connaît le prix unique du livre depuis 1981.

Lors de l'inauguration du salon du livre de Paris jeudi soir, l'actuel ministre de la culture, cité par l'AFP, a salué ces 30 ans en présence de son prédécesseur Jack Lang, "père" de la loi. Il en a profité pour lancer un appel en faveur du prix unique pour le livre numérique.

"Quel que soit le lieu d'implantation des opérateurs", M.Mitterrand a estimé "urgent" de définir "un cadre de régulation approprié pour accompagner la chaîne du livre dans un processus de transformation sans précédent depuis l'invention de l'imprimerie il y a cinq siècles".

Selon lui, le prix unique du livre numérique est un pilier essentiel de cette régulation. Le Sénat doit examiner en deuxième lecture, le 29 mars, la proposition de loi en ce sens.

Alors que le Sénat voulait appliquer la réglementation à tous, l'Assemblée nationale a décidé en février de l'imposer en France mais pas aux plateformes de diffusion établies à l'étranger type Amazon, ce qui inquiète les éditeurs et les diffuseurs français.

La FRC et les libraires romands saluent cet épilogue

La loi sur le prix du livre est "un bon dénouement" après sept ans de débats, considère la Fédération romande des consommateurs (FRC).

La FRC reçoit de nombreuses plaintes sur les prix pratiqués en Suisse romande. Les livres étrangers y sont vendus jusqu'à 30% plus cher que sur leur territoire. "Les consommateurs lisent aussi le prix imprimé sur la couverture et font le calcul", signale Florence Bettschart, avocate à la FRC.

La loi acceptée vendredi permettra d'atténuer cette différence mais il est trop tôt pour évaluer concrètement la baisse.

"C'est un jour historique", se réjouit pour sa part Françoise Berclaz, présidente des libraires de Suisse romande. La loi "va défendre toute la branche du livre: des éditeurs aux lecteurs en passant par les auteurs".

"Le lecteur est gagnant avec une telle loi car elle va faire descendre le prix moyen de tous les livres." La nouvelle réglementation va également redynamiser tout le secteur. "Je suis persuadée que de nouvelles librairies vont ouvrir leurs portes en Suisse romande.

Au milieu des années 2000, la guerre entre Payot et la Fnac en a fait disparaître 50 en trois ans. Il y en a actuellement une centaine." Elle fait aussi remarquer que plus il y a de librairies indépendantes, plus les éditeurs élargissent la palette de leurs publications. Cette diversité culturelle va donc profiter aux lecteurs des deux côtés de la Sarine.