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Andy Rihs, un mordu de la petite reine

Andy Rihs est un amoureux des balades à vélo.
Andy Rihs est un amoureux des balades à vélo.
Andy Rihs est un fou de vélo. L'ancien propriétaire de l'équipe Phonak est de retour au premier plan à la tête d'une formation BMC très ambitieuse. Du pain bénit pour les jeunes coureurs suisses, qui ont une chance de découvrir l'élite.

Son nom est associé depuis plusieurs années au cyclisme. Grâce à
lui, de jeunes coureurs suisses ont pu se mesurer à l'élite
mondiale. Lui, c'est Andy Rihs (67 ans), un homme d'affaires
zurichois qui a découvert sur le tard les bienfaits de la petite
reine.



L'ancien propriétaire de l'équipe Phonak revient en 2010 sur le
devant de la scène, à la tête de BMC, une formation de 2e division
à licence américaine mais à forte connotation helvétique. Composé
de 23 éléments, dont 9 Suisses, BMC a effectué un recrutement de
choix pour cette saison avec notamment Cadel Evans, George Hincapie
ou encore Alessandro Ballan. Interview à coeur ouvert avec son
grand patron, Andy Rihs.

"J'ai commencé le vélo à 40 ans"

J'ai résolu plus de
problèmes sur un vélo que dans des bureaux

Andy Rihs

tsrsport.ch:

Comment est née votre passion
pour le vélo
?



ANDY RIHS:

C'est venu assez tard, en fait. J'ai
d'abord pratiqué l'aviron jusqu'à 21-22 ans. Puis avec ma
profession, je ne faisais plus beaucoup de sport. Ce n'était pas
une bonne façon de vivre car on prend du poids! J'ai commencé le
vélo vers 40 ans, un peu par hasard. Rouler 2-3 heures dans la
nature et admirer les paysages m'a beaucoup plu. Ca me
rafraîchissait les idées et ventilait la tête. Je me sentais
vraiment bien mentalement après une promenade à vélo. Je partais
souvent avec des soucis en tête et puis après 2-3 heures tout était
clair. J'ai toujours dit que j'avais probablement résolu plus de
problèmes sur un vélo que dans des bureaux!



tsrsport.ch:

Aujourd'hui, vous faites encore
beaucoup de vélo
.



ANDY RIHS:

Oui, de plus en plus. Je fais environ
7 à 8000 kilomètres par année! Bon, avec la météo de ces dernières
semaines, je n'ai pas encore beaucoup roulé cette année, seulement
un peu en Australie en janvier. J'irai prochainement rouler dans le
Midi.

Le business avant tout

tsrsport.ch:

Avec
BMC, vous revenez dans le cyclisme de pointe. Le contrôle positif
de Floyd Landis - vainqueur déchu du Tour de France 2006 -, qui a
entraîné la fin de l'équipe Phonak, ne vous a donc pas dégoûté du
milieu..
.



ANDY RIHS:

Il est vrai que cette période à été
très difficile à vivre. Mais à l'époque, on avait déjà la petite
équipe continentale BMC, aux Etats-Unis. La raison pour laquelle je
reviens est purement commerciale. C'est le business! On fabrique
des vélos BMC qu'on exporte mondialement. Il faut avouer que les
ventes se font principalement à travers le sport. Les gens veulent
les vélos des vainqueurs, comme ça se passe également dans le ski
alpin. Donc vous avez beau construire le meilleur vélo, si vous
n'êtes pas dans le sport, vous ne vendez pas autant.



tsrsport.ch:

Votre but est-il maintenant que
BMC soit admise rapidement dans le Pro Tour
?



ANDY RIHS:

Pas nécessairement. Il ne faut pas
forcément faire partie du Pro Tour pour disputer les courses
importantes du calendrier. BMC est actuellement qualifié pour
presque toutes les grandes épreuves, comme le Tour d'Italie ou le
Tour d'Espagne.

Objectif Tour de France

tsrsport.ch: Là, vous attendez une
invitation pour le Tour de France. Avec le recrutement effectué
(Evans, Kroon, Hincapie, Burghardt ou encore Ballan), c'est plutôt
en bonne voie, non?




ANDY RIHS: Il est vrai qu'avec l'arrivée de Cadel
Evans, on devient logiquement un candidat pour le Tour. De notre
côté, on ne peut plus rien influer. Ce sont les organisateurs qui
prendront la décision. Mais avec Evans, champion du monde en 2009,
on a vraiment un argument de poids. Car il peut être un favori pour
le Tour. La réponse devrait tomber ces prochains jours.



tsrsport.ch: Parmi les coureurs que vous avez
recrutés figure un certain George Hincapie, un ancien "lieutenant"
de Lance Armstrong. Ses performances incroyables dans les cols du
Tour ont fait couler beaucoup d'encre à l'époque. N'est-ce pas un
risque d'avoir ce genre de coureur dans votre équipe?




ANDY RIHS: Hincapie est pour moi un gentleman. On
l'appelle Mister George et il a toujours été "propre". C'est un
gros rouleur, notamment dans la plaine mais aussi en montagne. Mais
il n'a pas le profil d'un grand grimpeur. On a vu en 2009
Cancellara remporter le Tour de Suisse. Ces deux coureurs ont les
capacités pour rouler fort en montagne.

Sanctions dissuasives pour les dopés

tsrsport.ch:

La crainte de voir un de vos
coureurs controlé positif est-elle grande
?



ANDY RIHS:

Je pense que le cyclisme a pris la
bonne direction, ce qui n'est pas le cas de tous les sports. Mais
c'est clair qu'on n'a jamais de garantie. Par contre, si un coureur
est attrapé aujourd'hui, sa carrière est plus ou moins terminée.
Ceci n'était pas le cas il y a cinq ou six ans. Les contrôles sont
désormais très pointus, il y a un suivi longitudinal et il est
vraiment très difficile de passer au travers des mailles du
filet.



tsrsport.ch:

Contrairement à d'autres sports,
le cyclisme n'a pas de lobby. Cela explique aussi pourquoi on parle
beaucoup de dopage dans ce sport..
.



ANDY RIHS:

Oui, exactement. Les affaires du Dr
Fuentes n'ont jamais été publiées parce que l'Espagne n'est pas
intéressée d'entendre que ses stars du foot ou du tennis sont
impliquées...

Coureurs espagnols pas souhaités

tsrsport.ch: Un mot sur Fabian Cancellara,
un coureur suisse qui pourrait venir un jour chez BMC?




ANDY RIHS: Evidemment, c'est un très grand
coureur et je crois qu'il peut encore progresser. Il a vraiment un
énorme potentiel.



tsrsport.ch: Donc, il sera chez BMC en
2011...




ANDY RIHS: (rires) Je ne peux pas vous dire ce
que nous planifions. Il fait partie du genre de coureurs que nous
aimons recruter. L'objectif est d'avoir comme cette année une
ossature de Suisses et d'Américains entourée de quelques coureurs
d'autres nationalités pour former une équipe homogène.



tsrsport.ch: Par contre, les Espagnols vous
n'en voulez plus?




ANDY RIHS: Je ne peux pas l'affirmer comme cela.
Mais il est vrai que tant que l'Etat espagnol ne veut pas entrer
dans la lutte antidopage, c'est problématique. Pour le moment, on
ne recherche pas de coureurs de ce pays-là.



tsrsport.ch: Le retour de Lance Armstrong
l'an dernier était-il une bonne chose?




ANDY RIHS: Oui, je pense mais c'est surtout le
grand public qui a apprécié. Son retour a vraiment réveillé le
cyclisme. En janvier, lors du Tour du Down Under en Australie, il a
invité un jour les cyclistes amateurs à rouler avec lui. Il y avait
plus de 5'000 personnes, c'était incroyable. Le trafic a même dû
être interrompu! Ca montre quand même qu'il est une personnalité
charismatique. Mais Cadel Evans est aussi une grande star en
Australie. Il y avait un monde fou sur les routes qui criait son
nom. L'enthousiasme était vraiment inimaginable.



Propos recueillis par Stéphane Altyzer

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"Il faut revenir à l'école de la piste"

tsrsport.ch: Que peut-on attendre des coureurs suisses de BMC en 2010?

ANDY RIHS: Nous avons 9 Suisses. Les Thomas Frei, Mathias Frank et autre Steve Morabito vont faire leur chemin. Ils pourront beaucoup apprendre des coureurs expérimentés de notre équipe et effectuer un saut en avant. Danilo Wyss a notamment fait un très bon Tour du Down Under, en se mêlant avec les plus grands sprinters. J'attends de ces jeunes éléments, d'ici 2-3 ans, des résultats dans des courses par étapes ou des classiques.

tsrsport.ch: Le cyclisme suisse est quand même en perte de vitesse depuis quelque temps, faut-il s'en inquiéter ?

ANDY RIHS: Oui, beaucoup de courses en Suisse ont disparu, faute de sponsors. A cause du dopage, les sponsors n'ont plus voulu investir dans le cyclisme. Il faut absolument maintenir les clubs et peut-être réinventer un peu les choses.

tsrsport.ch: Que proposez-vous?

ANDY RIHS: De revenir à l'école de la piste et de développer des pistards. Mais en Suisse, à part une petite piste à Aigle, nous n'avons rien. J'étudie actuellement un projet pour construire pourquoi pas une piste dans la région de Granges/SO, où est basé notre fabrique BMC. On le voit maintenant, beaucoup de coureurs britanniques et australiens viennent de cette école-là, comme des Mark Cavendish ou des Bradley Wiggins.

Andy Rihs express

Plat préféré: un osso bucco avec du risotto que je prépare d'ailleurs moi-même. J'aime bien cuisiner. J'adore aussi le papet vaudois et la cuisine asiatique.

Boisson préférée: le vin rouge. J'ai des vignobles en France et en Nouvelle-Zélande. Je vis avec le vin.

Lieu de vacances favori: le Lubéron, en Provence. C'est plutôt un lieu de séjour car je ne fais plus de vacances comme on l'entend. Je vis 3-4 mois par année en France. En hiver, j'aime bien aller à Crans-Montana.

Sportif préféré: Simon Ammann. C'est vraiment un grand sportif avec un gros mental. Il a également une personnalité fantastique.

Principale qualité: je prends la vie du bon côté.

Principal défaut: l'impatience.

Meilleur souvenir: quand les affaires marchent bien dans mon business. Côté sportif, c'est la toute première victoire de Phonak.

Pire souvenir: quand j'ai appris le contrôle positif de Floyd Landis sur le Tour de France 2006.

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BMC Racing Team, contingent 2010

Alessandro Ballan (ITA), Chris Barton (USA), Chad Beyer (USA), Brent Bookwalter (USA), Marcus Burghardt (GER), Cadel Evans (AUS), Mathias Frank (SUI), Thomas Frei (SUI), George Hincapie (USA), Martin Kohler (SUI), Alexander Kristoff (NOR), Karsten Kroon (NED), Jeff Louder (USA), Steve Morabito (SUI), Alex Moos (SUI), John Murphy (USA), Scott Nydam (USA), Mauro Santambrogio (ITA), Michael Schär (SUI), Florian Stalder (SUI), Jackson Stewart (USA), Danilo Wyss (SUI) et Simon Zahner (SUI).

Directeur sportif: John Lelangue (BEL).
Assistants du directeur sportif: Fabio Baldato (ITA), Noel Dejonckheere (BEL), Jacques Michaud (FRA), René Savary (SUI) et Mike Sayers (USA).