Publié

Les 19-20 ans penchent de plus en plus à droite en Suisse

Le positionnement politique des jeunes est lié à plusieurs facteurs: l'orientation politique et l'éventuel parcours migratoire de leurs parents, ainsi que leur parcours de formation. [Keystone - Salvatore Di Nofli]
Le positionnement politique des jeunes est lié à plusieurs facteurs: l'orientation politique et l'éventuel parcours migratoire de leurs parents, ainsi que leur parcours de formation. - [Keystone - Salvatore Di Nofli]
La jeunesse suisse vire à droite et un Romand sur dix ne suit plus aucune formation après la fin de l'école obligatoire, selon une étude qui vise à prendre le pouls des 19-20 ans tous les quatre ans, publiée vendredi.

Où en sont les jeunes adultes en Suisse? Quels sont les valeurs et les idées des 19-20 ans à propos du travail, de la formation, des loisirs ou du sentiment de bien-être et comment évoluent-elles au fil des années? Telles sont les interrogations de la Confédération.

Pour y répondre, elle a lancé une nouvelle étude à long terme, intitulée "Young Adult Survey Switzerland" (YASS), qui interroge au total quelque 34'000 jeunes recrues dans les sept centres de recrutement nationaux, ainsi que 3000 jeunes femmes de 19 ans, en 2010-2011 et 2014-2015.

Politique: les jeunes issus de l'immigration plus à gauche

Lors du premier sondage YASS en 2010-2011, 28% des jeunes sondés se positionnaient à gauche, 36% au centre et 36% à droite. En 2006, ces chiffres étaient de 41% pour les partisans de la gauche, 31% pour ceux du centre et 28% pour ceux de la droite. "On peut donc constater un glissement à droite", affirme l'étude.

Les auteurs remarquent que le positionnement politique des jeunes est lié à plusieurs facteurs: l'orientation politique et l'éventuel parcours migratoire de leurs parents, ainsi que leur parcours de formation.

En effet, les personnes sans formation de niveau secondaire II  et celles qui ont suivi une école de culture générale sont plus enclines à se positionner à gauche (40% dans les deux cas), tandis que les jeunes adultes ayant suivi un apprentissage se déclarent, eux, plutôt partisans de la droite (à 41%).

Les jeunes adultes et leurs parents professent majoritairement la même position politique. Mais les 19-20 ans dont les parents ont un vécu migratoire sont plus fortement orientés à gauche.

En ce qui concerne la participation politique, le rapport se veut optimiste et montre un regain d'intérêt des jeunes contrairement aux idées reçues. Cependant, les 19-20 ans sont tout de même 57% à se déclarer "pas du tout" ou "plutôt pas" intéressés par la politique, contre 44% de "plutôt" ou "très" intéressés.

Valeurs: amis et famille en priorité

"Depuis les années 1960, on constate un changement qui consiste à accorder plus d'importance à l'épanouissement personnel qu'aux valeurs prescrites", rappelle le rapport.

La question à laquelle plus de 90% des 19-20 accordent le plus d'importance est "d'avoir des amis qui vous respectent et vous acceptent". Suit "avoir un partenaire en qui on peut avoir confiance" (89%), "profiter de la vie et de sa famille" (80%), avant d'avoir "une bonne santé" (60%).

En queue de peloton, dans les choses qui paraissent de moindre importance aux jeunes, on trouve "faire ce que les autres font aussi", "croire en dieu" ou "être attaché aux traditions nationales". Cependant des valeurs liées au sens du devoir (sérieux dans le travail, sécurité, ordre) restent importantes, notent encore les auteurs de YASS.

Le plus important pour les jeunes adultes, c'est donc le réseau social et la possibilité d'organiser leur vie de manière indépendante et autonome.

Formation: les Romands à la traîne

L'étude note qu'une formation de degré secondaire II (une formation gymnasiale ou professionnalisante de type apprentissage après l'école obligatoire) est une "condition indispensable en Suisse pour entrer avec succès sur le marché du travail".

Et les jeunes Romands sont parmi les plus mal lotis en comparaison avec les autres régions suisses à ce niveau puisque 11% des jeunes femmes et 8% des jeunes hommes n'ont pas de formation post-obligatoire au moment du sondage, soit le double qu'en Suisse alémanique, constate l'étude. Celle-ci ne donne cependant pas de pistes sur les raisons de cette différence.

Les ressources financières des parents ont un rôle à jouer dans la poursuite d'une formation post-obligatoire, remarquent aussi les auteurs. Au total, seuls 5,6% des jeunes en Suisse ne suivent pas de formation de niveau secondaire II, rappelle YASS.

>> Ecouter aussi l'analyse de Sandro Cattacin, professeur de sociologie à l’Université de Genève :

Sandro Cattacin, spécialiste de l’intégration. [Keystone - Lukas Lehmann]Keystone - Lukas Lehmann
Les jeunes en Suisse sont de moins en moins de gauche / Le 12h30 / 5 min. / le 4 novembre 2016

Sophie Badoux

Publié

Qui fait le YASS?

Suite à un appel d'offre, l'équipe scientifique du YASS a été constituée par des spécialistes de la Haute Ecole pédagogique de Zoug, ainsi que des universités de Berne, Genève et Zurich pour ce projet de longue durée.

Jusqu'au milieu du XXe siècle, les examens pédagogiques des recrues militaires étaient un instrument pour sonder les performances scolaires des jeunes Suisses. Aujourd'hui plus vaste, le questionnaire est à la base d'une véritable enquête fédérale auprès de la jeunesse. Celle-ci s'effectue tous les quatre ans auprès de tous les conscrits ainsi qu' auprès d’un échantillon représentatif de jeunes femmes par une enquête complémentaire. Le procédé permet de toucher toutes les couches socioprofessionnelles, font valoir les chercheurs.

Les auteurs du rapport soulignent aussi que les résultats gagneront en stabilité et en validité par le cumul des enquêtes année après année.