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Les prisons suisses n'ont jamais été aussi remplies

La prison de Champ-Dollon vue de la nouvelle prison de la Brenaz. [martial trezzini / keystone]
Les prisons des cantons latins, ici Champ-Dollon à Genève, sont les plus remplies. - [martial trezzini / keystone]
Les prisons suisses affichent presque complet: au 1er septembre dernier, plus de 6000 personnes étaient détenues dans des établissements pénitentiaires du pays. Il s'agit du chiffre le plus élevé depuis 2005, selon l'Office fédéral de la statistique (OFS). Les cantons latins souffrent de saturation.

Avec un effectif de 6181 individus, soit 97 de plus qu'un an auparavant (+1,6%), le nombre de personnes détenues en Suisse a atteint un nouveau sommet en 2010. C'est l'effectif le plus élevé depuis 2005 (6137), selon l'enquête publiée mardi sur la privation de liberté réalisée dans 114 établissements et institutions. Ces prisons disposent au total de 6683 places.

Nombre d'étrangers stable

Pour l'ensemble de la Suisse, le taux d'occupation des prisons a augmenté de 1,5 point pour atteindre 92,5% en moyenne, a indiqué mardi l'Office fédéral de la statistique (OFS). Dans les cantons latins, le taux d'occupation s'élève à 105% et la situation continue de se détériorer. Les prisons sont moins remplies outre-Sarine, avec des taux d'occupation de 87,4% pour la Suisse centrale et du nord-ouest et de 86,6% pour la Suisse orientale.

Parmi les prisonniers en 2010, 31% étaient en détention préventive, 61% en exécution de peine, 6% en mesures de contrainte selon la loi sur les étrangers et 2% étaient détenues pour d'autres motifs. Depuis 2004, le pourcentage de détenus étrangers reste stable et représente 72% du total (+1,5 point par rapport à 2009).

Sur les 4428 étrangers détenus, 55% sont en exécution de peine ou en exécution anticipée de peine, 35% sont en détention préventive et 8% sont sous le coup de mesures de contrainte selon la loi sur les étrangers.

Peu de femmes, peu de mineurs

C'est en détention préventive que les étrangers sont le plus surreprésentés, avec une proportion de 81% du total de 1894 personnes. Ceux-ci sont généralement détenus pour prévenir un risque de fuite, car 60% de ces détenus n'ont pas de domicile connu en Suisse. Il s'agit de touristes, de frontaliers ou de personnes en situation illégale. Les effectifs de cette catégorie sont en forte augmentation depuis 2004 (+63%).

Le nombre de demandeurs d'asile en détention préventive a en revanche fortement chuté. Les requérants ne représentent plus que le 5% des personnes en détention préventive.

Avec 347 détenues, les femmes ne constituent que 5,6% des effectifs. Quant aux mineurs, ils sont 39 à se trouver en détention (0,6%), soit 15 de moins qu'un an plus tôt. C'est le nombre le plus bas depuis 1999. Sur les dix dernières années, le pic avait été atteint en 2000 avec 100 mineurs détenus.

Genève, mauvaise élève

La surpopulation carcérale dans les cantons latins est liée à la suroccupation de quelques établissements, précise l'OFS. Selon des chiffres récoltés en 2010 par l'ATS, le problème est le plus aigu à la prison de Champ-Dollon (GE). Prévue pour 270 détenus, elle a atteint le record de 622 personnes en juillet, pour une moyenne de plus de 550 sur l'ensemble de l'année.

Deux établissements vaudois sont aussi "dans le rouge", selon des données du printemps 2010: à Lausanne, Bois-Mermet (100 places) était occupé à 160%; à Orbe, La Croisée (170 places) à 130%. Le pénitencier cantonal tessinois de "La Stampa" à Lugano n'est actuellement pas suroccupé.

Il compte 100 détenus pour une occupation maximale de 120 personnes. La situation s'est améliorée dès l'été 2010 après une saturation enregistrée en début d'année, a indiqué à l'ATS son directeur Fabrizio Comandini.

A noter que la détention préventive est proportionnellement beaucoup plus pratiquée en Suisse latine qu'outre-Sarine. Alors que les cantons latins comptaient en septembre 869 personnes sous ce régime, elles n'étaient que 548 en Suisse orientale et 477 en Suisse centrale et du nord-ouest.

agences/cab

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Le confort des prisons suisses? Peut mieux faire

Les centres de détention de Granges (VS), de Brigue (VS) et de Hindelbank (BE) ne sont pas sans reproche. Dans ses premiers rapports la Commission nationale de prévention de la torture (CNPT) émet une série de critiques à l'encontre de ces établissements.

En Valais, le service de santé pénitentiaire a été externalisé et confié au Réseau Santé Valais. La situation ne semble satisfaire ni le service de la santé ni celui des pénitenciers, écrit la commission dans son rapport. Elle recommande "d'éliminer ces différends le plus rapidement possible".

Concernant la prison de Brigue, le rapport relève certaines mesures dégradantes lors de transports de courte durée. "Il faut éviter de mener des personnes menottées par des places et des rues très fréquentées, de les faire attendre dans des salles d'attente et autres lieux publics". La commission juge aussi "disproportionnée et dégradante" la fouille corporelle de tous les détenus de sexe masculin.

A Granges, la nécessité de ligoter les détenus lors de visites médicales doit être examinée au cas par cas en fonction du risque concret de fuite. Le caractère carcéral et les conditions de détention de ce centre de rétention doivent être assouplis. Les espace récréatifs sont trop petits, estime la commission.

Dans les cellules occupées par deux personnes, les toilettes, "à la turque", ne sont pas séparées. La commission critique également le placement dans une même cellule de détenus fumeurs et non-fumeurs. La commission relève que "la propreté, l'hygiène et la restauration sont irréprochables".

Le traitement de certaines détenues du quartier de haute sécurité de la prison de Hindelbank "se justifie difficilement d'un point de vue humain, légal et médical", écrit la commission. Le fait que certaines détenues soient en isolement depuis plusieurs années peut être considéré comme un traitement "indigne".