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Plus on ment, et moins on se sent coupable de le faire, révèle une étude

Plus on ment et plus notre cerveau nous incite à mentir, levant les barrières émotionnelles qui nous font nous sentir mal. [AFP - Fred de Noyelle/Godong/Leemage]
Plus on ment et plus notre cerveau nous incite à mentir, levant les barrières émotionnelles qui nous font nous sentir mal. - [AFP - Fred de Noyelle/Godong/Leemage]
Plus on ment, plus il devient aisé de mentir: des chercheurs sont parvenus à mettre en évidence expérimentalement cet effet "boule de neige" et le mécanisme biologique qui le facilite.

Au départ, le menteur ressent un inconfort lorsqu'il déforme la vérité, souligne une étude parue lundi dans la revue Nature. Mais cette gêne s'estompe à mesure que la liste de ses mensonges s'allonge.

L'amygdale du cerveau qui gère certaines de nos émotions s'est en quelque sorte accoutumée. Elle génère d'abord un sentiment négatif qui limite l'ampleur du mensonge. Mais à chaque nouveau mensonge, la réponse de l'amygdale décline et les mensonges se font de plus en plus gros.

C'est la première fois que l'on montre de façon empirique qu'un comportement malhonnête s'accroît à mesure qu'il se répète

Neil Garret, du département de psychologie expérimentale de l'University College London (UCL)

"Les gens mentent le plus quand c'est bon pour eux-mêmes et pour un autre, probablement parce que cela ne les fait pas se sentir mal", relève une des chercheuses (lire le déroulé de l'expérience ci-dessous). "Quand c'est seulement bon pour eux mais que cela nuit à l'autre personne, ils mentent moins".

ats/sbad

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L'expérience

Quatre-vingts adultes (de 18 à 55 ans) se sont vu soumettre une photo haute résolution représentant un pot en verre rempli de pièces de monnaie. Par ordinateur, ils devaient aider un partenaire à estimer le montant d'argent contenu dans le récipient. Cette personne (en fait un acteur) ne disposait que d'une photo de médiocre qualité.

Dans un premier scénario, les opérateurs ont demandé aux participants d'estimer de la façon la plus exacte possible le montant, en leur disant que cela bénéficierait à la fois à eux-mêmes et à leur partenaire (ils gagneraient tous les deux davantage d'argent). On peut penser qu'ils ont dit alors la vérité.

Les résultats de ce premier test ont servi de référence aux autres scénarios dans lesquels sous-estimer ou surestimer volontairement le montant contenu dans le pot pouvait présenter un intérêt pour le participant au détriment de son partenaire, ou bien l'inverse, ou encore profiter aux deux.

La pente glissante du mensonge

Pour comprendre ce qui se passait dans leur cerveau, 25% des participants ont réalisé une IRM (imagerie par résonance magnétique) pendant l'expérience.

Les chercheurs se sont aperçus que l'amygdale cérébrale, associée aux émotions, était plus active lorsque les personnes mentaient pour leur intérêt personnel. Au départ, "elle produit un sentiment négatif qui limite l'ampleur du mensonge".

Mais à chaque nouveau mensonge, la réponse de l'amygdale déclinait et l'ampleur des bobards grandissait. "Il y a une sorte d'adaptation émotionnelle", pointe Tali Sharot.

"Cela peut conduire à une 'pente glissante', lorsque de petits arrangements avec la vérité peuvent déclencher une escalade et devenir des mensonges importants", relèvent les chercheurs.