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Schubertiade d'Espace 2 à Yverdon, premières impressions

Dès samedi à 10 heures, le public est venu nombreux à Yverdon-les-Bains malgré la grisaille et la pluie. Récit.

Ce samedi, il pleuvait (des cordes) à Yverdon. Mais le public ne s’est pas laissé intimider pour autant. Ils sont venus nombreux, des quatre coins de la Suisse romande, pour participer à la Schubertiade.

A 10 heures, les gens faisaient déjà la queue au Théâtre Benno Besson pour obtenir leur bracelet qui sert de sésame pour accéder aux manifestations. Ils se sont armés de parapluies pour se déplacer d’un site à un autre. Des bus estampillés "Schubertiade" étaient par ailleurs mis à disposition des visiteurs pour les déplacements à plus grande distance.

Gérer son timing

Pas évident d’assister à tous les événements sans se mettre sous stress. "On va au numéro 3, au Garage!", lance cette dame qui sort d’un concert pour aller à un autre. Il s’agit de gérer son timing et de sacrifier l’envie de tout voir, de tout entendre. La Schubertiade a pour habitude de laisser les visiteurs entrer et sortir des salles pendant les concerts.

Or, plusieurs de ceux-ci étaient bondés, comme celui de Rachel Kolly d’Alba, Nadège Rochat et Christian Chamorel, à 12h30 à la Maison de Paroisse, ou celui de l’Ensemble Vocal de Lausanne à 15 heures à l’Eglise catholique. Il a fallu refuser du monde. On voyait par ailleurs les gens faire la queue pour accéder à certaines salles.

Beaucoup de monde pour écouter le Quatuor Sine Nomine au Temple. [RTS - Jay Louvion]
Beaucoup de monde pour écouter le Quatuor Sine Nomine au Temple. [RTS - Jay Louvion]

D’ores et déjà un succès

C’est donc d’ores et déjà un succès, malgré les intempéries. En matinée, le chef néerlandais Arie van Beek et ses musiciens de l’Orchestre de chambre de Genève ont joué à La Marive, un grand bloc de pierre et de béton qui abrite une salle polyvalente. Malgré l’acoustique sèche, ils sont parvenus à exprimer le lyrisme des "Danses allemandes" de Schubert transcrites par Webern.

Le chef d'orchestre Arie van Beek. [Ludovic Leleu]
Le chef d'orchestre Arie van Beek. [Ludovic Leleu]

La soprano anglo-suisse Olivia Doutney (voix ronde, précise et expressive) a fait belle impression dans les "Sechs Lieder nach Gedichten von Georg Trakl " de Webern avec des solistes de l'OCG. Il reste que cette musique demeure difficile pour certains, et on a vu des gens sortir de la salle pendant l’exécution. Le ténor bulgare Marin Yonchev s’est distingué par sa délicate voix (quoiqu'un peu sur la réserve) dans un choix de lieder de Schubert transcrits par Webern.    

Le grand "Trio en la mineur" de Tchaïkovski

Beaucoup de ces concerts étaient en direct commentés par des animateurs d’Espace 2. Le public amassé à la Maison de Paroisse a pu savourer le grand "Trio en la mineur opus 50 " de Tchaïkovski. Christian Chamorel a dominé la redoutable partie de piano – malgré un peu de tension au départ. Sa sonorité belle, dense, sculptée, n’écrase jamais les parties de violon et de violoncelle. Rachel Kolly d’Alba a fait valoir son tempérament de feu tandis que Nadège Rochat a joué avec beaucoup d’expressivité. Certains passages – comme cette variation du deuxième mouvement au caractère fantomatique­ – sont empreints de mélancolie. On espère que ces musiciens, qui jouaient pour la première fois l’œuvre ensemble (d’où certaines imperfections), la reprendront ailleurs. Ils ont été très applaudis.

La violoncelliste Nadège Rochat, la violoniste Rachel Kolly d'Alba et le pianiste Christian Chamorel en concert à la Maison de paroisse d'Yverdon-les-Bains pendant la 20e Schubertiade. [RTS - Julie Collet]
La violoncelliste Nadège Rochat, la violoniste Rachel Kolly d'Alba et le pianiste Christian Chamorel en concert à la Maison de paroisse d'Yverdon-les-Bains pendant la 20e Schubertiade. [RTS - Julie Collet]

L’EVL et Nima Sarkechik

Les "Liebeslieder Walzer" de Brahms chantés par l’Ensemble vocal de Lausanne sous la direction de Daniel Reuss furent aussi un grand moment. Le public de la Schubertiade, friand de chant choral, a vivement salué cette exécution pleine de vie et de sensibilité.

Quant à Nima Sarkechik, il s’est livré à une performance en compagnie de danseurs et de peintres-dessinateurs, à 13h30 au Kiosque Benno Besson. Le pianiste franco-iranien a mélangé des pièces de Brahms et Schubert avec des improvisations persanes. Il a fallu un moment avant que cette performance ne prenne forme – mais peu à peu, quelque chose a émergé. A l’aide de gros stylos noir, les peintres ont dessiné des motifs figuratifs et abstraits sur des plaques de plexiglas suspendues à des cordages autour du piano. Parce qu'il pleuvait, le public était amassé sous la toiture du kiosque – un joli spectacle à lui seul.  

Julian Sykes/mh

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