"Fight Club", violence et anarchie

Grand Format

AFP - Fox 2000 Pictures

Introduction

Fight Club, le roman culte de Chuck Palahniuk, s'est imposé comme l'un des must du cinéma grâce à l'adaptation de David Fincher en 1999.

Chapitre 1
Critique de la violence

"Fight Club". Peut-être l'un des films les plus critiqués de la fin du siècle dernier. A cause de sa violence, et surtout de son encouragement à la baston et à l'anarchie, et parce qu'il fustige la société de consommation.

Après le massacre de Colombine et avant les attentats de 2001, "Fight Club" fait mauvais genre. Adapté du roman de Chuck Palahniuk, réalisé par David Fincher après le grand succès de "Seven", "Fight Club" sort en 1999. L'ambiance fin de siècle et fin de millénaire plane alors sur le cinéma et les mines déconfites des chantres de l'apocalypse contribuent au climat morose.

L'affiche du film "Fight Club". [AFP - Fox 2000 Pictures]

Le film, construit comme une comédie noire, évoque la figure de Tyler Durden, personnage anticonformiste, nihiliste et anarchiste prêt à tout pour lutter contre la société de consommation, à l'instar d'un Unabomber qui aurait créé un club de combats clandestins.

"Fight Club" dérange ou conquiert, et tandis que les admirateurs de David Fincher crient au génie, d'autres parlent de violence gratuite, de sadomasochisme et de fascisme.

Edward Norton, Brad Pitt et Helena Bonham Carter incarnent les personnages principaux de cette fable destroy qui oscille entre sophistication et destruction.

Première règle du Fight Club: "on ne parle pas du Fight Club"... L'émission de radio "Travelling" s'autorise une dérogation pour décrypter ce film sur fond d'archives, d'anecdotes et d'extraits.

>> A écouter, l'émission "Travelling" sur le film :

Brad Pitt dans "Fight Club" de David Fincher (1999).
Fox 2000 Pictures/Archives du 7eme Art/Photo12
AFP [Fox 2000 Pictures/Archives du 7eme Art/Photo12]Fox 2000 Pictures/Archives du 7eme Art/Photo12
Travelling - Publié le 28 janvier 2018

Chapitre 2
Synopsis

[AFP - Fox 2000 Pictures]

Le narrateur de "Fight Club" ne dort pas, s'ennuie mortellement dans son job d'expert en assurances, spécialisé dans les accidents de voiture. C'est un trentenaire désabusé qui comble son ennui en meublant son appartement comme un magazine de décoration. Il s'achète tout ce qu'il peut acheter, remplissant ainsi son vide existentiel. Son médecin refuse de le médicamenter et l'envoie dans les thérapies de groupe des cancéreux pour relativiser son état de souffrance.

Dans un premier temps, pleurer sur l'épaule des hommes atteints du cancer des testicules, ou des mourants et autres malades qui partagent leurs peines semble lui faire du bien. Jusqu'au jour où une femme, Marla Singer, s'incruste dans les mêmes groupes de parole que lui. Mais surtout, il va faire la connaissance de l'étrange Tyler Durden, représentant en savon.

Très vite, les deux hommes se mettent à partager des valeurs communes. Ils deviennent colocataires dans une maison en ruine, et compagnons de baston. Ils fondent le Fight Club, un cercle exclusivement réservé aux hommes, où les combats ultra-violents, à mains nues, se succèdent.

Le Fight Club fait boule de neige, et les angoissés de tout bord viennent y chercher, dans la castagne, un défouloir et un sens à leur vie, sclérosée par la surconsommation. Tyler Durden devient le gourou anarchiste, libre-penseur nihiliste, de tout un groupe d'hommes endoctrinés.

Avec sa milice, Durden monte le mystérieux projet Chaos qui s'attaquera aux représentants principaux de notre société de consommation.

"Fight Club" est à la base un livre signé par Chuck Palahniuk, un auteur américain, journaliste indépendant né en 1962. Il lit Heidegger, Derrida, Foucault et Marx. Il écrit son premier roman, "Monstres Invisibles" au début des années nonante. Le livre est refusé par les éditeurs. Trop provocant. Trop violent. Il écrit alors "Fight Club". Et là, ça marche. Le livre est publié en 1996.

Les notions de morale, de dieu, de violence, de mort, ainsi que la publicité, le sexe et la consommation reviennent régulièrement dans son œuvre.

Je voulais montrer des héros, disons… marginaux... qui ne ressemblent pas à ceux que l'on voit habituellement dans les films hollywoodiens. Des mecs qui ne veulent pas sauver le monde, mais plutôt le détruire… Bref, qui n'ont, a priori pas tout à fait la même définition du Bien et du Mal que celle de l'administration Bush.

Chuck Palahniuk, auteur de "Fight Club"

Du côté de Hollywood, les chasseurs d'histoires se montrent très vite intéressés. C'est un employé de la Fox qui, adorant le livre, le soumet à la productrice Laura Ziskin qui achète les droits du roman pour 10'000 dollars. Jim Uhls, alors scénariste débutant, fan de l'univers de Palahniuk, fait littéralement campagne pour obtenir le travail. C'est lui qui fera l'adaptation du livre. La réalisation est confiée à David Fincher.

[AFP - Fox 2000 Pictures]

David Fincher, ce sont des clips qui ont marqué l'histoire de la musique, c'est "Alien 3", c'est "Seven" en 1995, et "The Game" en 1997, traitant de faux semblants et de manipulation.

David Fincher est très motivé par le projet "Fight Club". L'univers de Chuck Palahniuk est un peu le sien. Celui qu'il a déjà mis en scène dans "Seven" et dans "The Game". A chaque fois, des films aux portes de l'étrange.

David Fincher est né en 1962, comme Palahniuk. Ils appartiennent à cette génération X, celle qui n'a pas connu la guerre, qui vécu avec les chocs pétroliers, la fin de la guerre froide, le sida, le chômage. Trop jeunes pour le Vietnam, trop vieux pour l'Irak.

Une génération sans repères ni religion à laquelle se raccrocher, à part le Capitalisme qui fait de nous des esclaves en col blanc, pressés par le besoin de consommer des choses dont nous n'avons pas besoin.

David Fincher, réalisateur de "Fight Club"

Chapitre 3
Les acteurs

AFP - FOX 2000

C'est à Russel Crowe que l'on va proposer dans un premier temps le rôle de Tyler Durden. Mais sur le marché se trouve Brad Pitt, un peu dépité par l'échec du film "Rencontre avec Joe Black". Un Brad Pitt qui veut casser son image de jeune premier et qui rêve de retourner avec David Fincher après "Seven". Brad Pitt est engagé comme tête d'affiche pour 17,5 millions de dollars.

Pour jouer le narrateur, on pense dans un premier temps à Matt Damon, puis à Sean Penn. C'est David Fincher qui suggère Edward Norton. Il a aimé sa performance dans "Larry Flynt". Il aime son côté gentil garçon de bonne famille. Un peu lisse. Son côté ébahi. Il a, de plus, fait une excellente performance en nazi repenti dans "American History X". 2,5 millions de dollars pour Edward Norton et voilà les rôles principaux masculins distribués.

Le tournage de "Fight Club" va durer 138 jours, de août à décembre 1998. David Fincher étant un réalisateur méticuleux, précis, amoureux du montage, il va tourner un nombre impressionnant de plans.

On tourne principalement de nuit, avec des éclairages au néon pour donner au film une couleur particulière. David Fincher choisit volontairement des lieux ombragés pour les scènes de jour. Tout est sombre.

[AFP - FOX 2000]

Chapitre 4
La sortie du film

AFP - FOX 2000

Le réalisateur et ses acteurs s'énervent de voir le débat se cristalliser sur la violence, qui n'est pas le sujet du film. La réaction des critiques est pourtant évidente. Elle traduit simplement la tendance, aux Etats-Unis, d'accuser le cinéma de tous les maux. Après le massacre et la tuerie dans le lycée de Littleton, Hollywood s'interroge sur la violence au cinéma et son influence.

Le film divise. Certains adorent, d'autres détestent. Son esthétique est saluée. Le film est nommé pour l'Oscar du meilleur Montage son. Chacun des protagonistes continue sa carrière.