La couleur et la fluorescence sont toutes deux liées à l'interaction entre lumière et matière. La couleur sous laquelle un objet nous apparaît dépend de deux choses: elle correspond à la couleur de la lumière incidente, de laquelle sont soustraites les couleurs correspondant aux longueurs d'onde absorbées par l'objet. Ainsi, les feuilles de la plupart des plantes apparaissent vertes sous la lumière du jour parce que leurs pigments absorbent principalement les longueurs d'onde situées dans le bleu et dans le rouge, donnant une lumière réfléchie dans le vert.

La fluorescence, elle, est une propriété de certaines molécules qui peuvent absorber des photons de longueurs d'onde déterminées (dépendant de la structure des molécules); cette absorption d'énergie les fait passer dans un état dit "excité", et en l’espace de quelques nanosecondes elles reviennent à leur état basal (leur état par défaut) et évacuent l'excès d'énergie en émettant un photon de plus grande longueur d'onde. Ainsi, la chlorophylle peut absorber de la lumière ultra-violette ou bleue et, en retour, elle émet de la lumière rouge.

Dans les deux cas il s’agit donc d'interactions entre des photons et des molécules… et à chaque fois qu'une telle interaction se produit, les choses risquent de mal se passer (du point de vue de la molécule, tout du moins!). En effet, chaque photon est porteur d'une certaine énergie et, lors de chaque interaction, il y a une certaine probabilité pour que cette énergie soit absorbée par la molécule d'une manière qui la dénature chimiquement. Suite à cette dénaturation, la molécule se retrouve irrémédiablement modifiée, d'une façon qui l’empêche d'interagir avec la lumière: elle devient donc incolore et, si elle était fluorescente, elle perd cette propriété-là (on appelle cela le photo-blanchiment).

C’est de là que vient la différence de couleur et de fluorescence entre des échantillons de plantes conservés à la lumière et d’autres conservés à l’obscurité. Ce problème n’est d’ailleurs pas spécifique aux plantes, on observe la même différence de couleur si on compare les pages d’un cahier restées exposées au soleil pendant des semaines aux pages d’un cahier resté toujours fermé, ou si on compare le dessus et le dessous d’un coussin coloré qui serait resté immobile pendant des mois sur un balcon.

La probabilité qu’une interaction destructrice entre pigment et photon ait lieu dépend de la longueur d’onde de la lumière incidente, de son intensité et de la nature de la molécule considérée: certains pigments sont plus résistants que d’autres à la décoloration par la lumière, et certaines molécules fluorescentes sont très sensibles au photo-blanchiment, alors que d’autres y résistent beaucoup mieux. C’est pour cette raison que des échantillons de plantes que l’on laisse sécher à la lumière vont changer de couleur au fil du temps, et non simplement devenir blanchâtres: alors que certains pigments vont rapidement se dénaturer, d’autres vont subsister plus longtemps et continuer à apporter une coloration.

Enfin, en plus de cet effet dépendant de l’intensité de la lumière, la décoloration est plus forte pour des objets qui ne bénéficient pas ou peu de la protection de l’atmosphère. Ainsi, il y a fort à parier que le drapeau américain déposé sur la Lune en juillet 1969 … soit depuis devenu un drapeau blanc !