La tortue de Floride, ou Trachemys scripta elegans pour les puristes, est une espèce américaine que l’on rencontre sur un large territoire du centre-Ouest des Etats-Unis mais pas en Floride! On l’appellera donc plus justement «tortue à tempes rouges», en raison des deux bandes rouges-oranges qui ornent ses régions temporales.

Cette espèce a été largement exportée en Europe depuis les années 1970, au départ de fermes d’élevage américaines, pour contrer l’interdiction de collecte et de vente de la tortue d’Hermann européenne, alors largement vendue dans les animaleries, les fêtes foraines et les marchés pour le plus grand bonheur des enfants

La petite nouvelle, plus colorée et plus active, était classiquement vendue avec un petit «aquarium» en plastique, muni d’une petite île et d’un palmier. Oui mais voilà La petite tortue, carnivore, croît rapidement, demande de plus en plus de place et risque de mordre les jeunes enfants qui s’en saisissent!

Quoi de plus normal donc, que de s’en débarrasser et de lui rendre sa liberté Voilà donc, en résumé, comment cette espèce s’est retrouvée dans les étangs suisses.

Elle s’y est même merveilleusement adaptée, se retrouvant sous les mêmes latitudes que dans son habitat d’origine, avec une nourriture abondante et peu, voire pas, de prédateurs. Cette «invasion» américaine a continué jusqu’à la fin des années 1990, quand les premiers bébés tortues à tempes rouges, nés de manière naturelle dans leur nouveau milieu, ont vu le jour. Dès lors, ce sont les associations écologistes et de protection de la Nature qui se sont mêlées du dossier. L’interdiction de l’importation de l’espèce sur le territoire européen a été obtenue, et de grandes campagnes de capture et d’éradication se sont mises en place. Voilà pourquoi, pour répondre à votre question, les «tortues de Floride» sont en mauvais état dans nos étangs : elles n’y ont tout simplement pas leur place!

Mais le problème n’est pas définitivement résolu. Suite à cette interdiction d’importation, les fermes américaines ont eu tôt fait de trouver une parade. Ce sont désormais des milliers de petites tortues d’une autre sous-espèce, la tortue à tempes jaunes (Trachemys scripta scripta) qui arrivent chaque année sur le territoire européen. Par chance, cette espèce semble moins bien s’adapter sous nos climats, et ne survit généralement pas aux hivers rigoureux.

Et la cistude dans tout ça ?

Elle a bien failli disparaître de Suisse! Mais que l’on soit clair, pas uniquement à cause de l’introduction se sa cousine américaine. En réalité, sa raréfaction date du début du 19è siècle, suite à une accélération de l’urbanisation et de la démographie, avec, pour conséquence, un assèchement des zones humides et un morcellement de son habitat. L’introduction d’espèces exotiques ayant les mêmes habitudes alimentaires que la cistude n’a rien arrangé. Il y a quelques années, ce sont des canards et oies asiatiques et américains qui sont entrés en compétition avec notre tortue. De manière plus surprenante, la compétition avec la tortue à tempes rouges n’est pas tant alimentaire que territoriale, ces dernières occupant largement les sites de «bain de soleil» généralement utilisés par les cistudes.

A l’heure actuelle, et après plusieurs programmes de réintroduction, la cistude revient peu à peu dans les marais suisses et, même, s’y reproduit. Les populations les plus importantes se rencontrent dans les cantons de Genève, de Thurgovie et d’Argovie et sont suivies et recensées par de nombreuses personnes. L’espèce semble donc en bonne voie pour couler des jours heureux dans notre pays!

Suggestion de lien : http://etat.geneve.ch/dt/nature/cistude-274-4742-11394.html

Suggestion de lecture : Conservation de la Cistude d’Europe en région Rhône-Alpes (France) Manouria 3 (9), Décembre 2000

Suggestion de promenade à la découverte des cistudes : Réserve du Moulin-Vert, canton de Genève

Suggestion de visite : Centre de Protection et récupération des tortues, 1373 Chavornay.